La publication du Livre blanc 2013 induit un certain nombre de changements quant aux structures de force telles qu’elles étaient projetées en 2008, à commencer par les effectifs, avec 24 000 pertes de postes supplémentaires. Depuis 2008, 78 000 postes auront donc été perdus – c’est près de deux fois le format de la Marine nationale de 2011 (elle était alors à 40 3853 personnels).

Paradoxalement, on notera l’apparition dans le lexique stratégique des « menaces hybrides », qui nécessitent pourtant une réelle masse de combat pour leur traitement, en plus de modes de combat adaptés (1). La cyberdéfense, y compris par actions offensives, est prise en compte. Plus largement, le rôle du renseignement est conforté, y compris par un meilleur partage des capacités entre les divers organismes, la place du coordonateur (comme de l’Assemblée nationale, en matière de contrôle) sera renforcée.

D’un point de vue budgétaire, de 2014 à 2025, les armées sont sensées recevoir 364 milliards d’euros – ressources exceptionnelles comprises (mais on sait ce qu’il faut en penser…) – dont 179 pour la prochaine LPM, qui couvre la période 2014-2019.

Concrètement, l’armée de Terre va se structurer autour de 7 brigades « interarmes » (- 1) qui se répartissent entre deux brigades aptes au combat de coercition contre des chars lourds, trois brigades multirôles, deux brigades légères. Un total de 66 000 hommes seraient projetables. Elles seront dotées d’« environ » 200 Leclerc (- 54) ; 250 chars médians (- 166) ; 2 700 blindés (actuellement : 3 586 VAB). La composante aérienne est la moins touchée : le format 2013 prévoit 140 machines de reconnaissance et d’attaque (80 Tigre au total ont été commandés – ce qui semble laisser de la place pour le futur X-4) ; 115 machines de transport (64 NH90 ont été commandés, 23 Cougar et 8 Caracal sont disponibles hors-Puma) ; 30 drones tactiques (le Watchkeeper est en test).

Si elle va conserver ses futurs SNA (et le Charles de Gaulle, de même que les 4 SNLE), la Marine va surtout perdre des capacités en termes d’escorte : le nouveau format prévoit 15 frégates de premier rang. Or, au terme du LBDSN de 2008, les La Fayette étaient considérées comme de premier rang. Si 2 Forbin et 5 La Fayette sont disponibles, cela veut donc dire soit que 8 Aquitaine seulement (sur 11) seront reçues, soit que des La Fayette quitteront le service à mesure de l’entrée en service des Aquitaine. La force comprendra également 15 patrouilleurs et les 6 frégates de surveillance. Trois BPC sur 4 seront reçus. Les ravitailleurs ne sont pas évoqués, par contre les capacités de guerre des mines devront être projetables.

L’ambition en matière de capacité aériennes subit une réduction majeure : il n’est seulement plus question que de 225 appareils de combat (-75 – l’objectif de 300 appareils était toutefois trop optimiste), Marine comprise. Les capacités de transport semblent également une déflation : il en est question « d’une cinquantaine » (la cible de 2008 comprenait 50 A400M, 14 C-130 et les CN235 – 27 pour l’heure). Douze MRTT sur 14 envisagés seront reçus. Les drones montent en puissance mais moins que prévu en 2008 : 12 unités (il avait été question de 16 à 18 drones MALE). Des avions légers de surveillance et de reconnaissance seront acquis et les 8 systèmes SAMP reçus sont conservés.

Les forces spéciales sont les grandes gagnantes de l’opération « LB2013 » : « leurs effectifs et leurs moyens de commandement seront renforcés, comme leur capacité à se coordonner avec les services de renseignement ».

Au niveau de la réactivité – elle a été essentielle pour Serval – il est question d’un échelon national d’urgence, interarmées, de 5 000 hommes. En son sein, une FIRI (Force Interarmées de Réaction Immédiate) de 2 300 hommes devra permettre de s’engager jusqu’à 3 000 km en 7 jours. Sous préavis plus long (jusque 6 mois), il est question de pouvoir engager « dans la durée » jusque 2 brigades représentant 15 000 hommes, en plus de 45 appareils de combat, de forces spéciales et de forces navales (porte-avions, 2 BPC et bâtiments d’escorte compris).

Le Livre blanc peut être lu à cette adresse.

(1) Sur la question des conflits/guerres hybrides, techno-guérillas et autres menaces posées, nous renverrons le lecteur à l’imposante masse des articles que nous avons publié sur le sujet depuis 2006.