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La reconfiguration des forces armées nigérianes

La période de deux ans qui court du début 2015 au début 2017 se caractérise par une dynamique vertueuse pour les forces nigérianes, après des décennies de marasme. Les problèmes ne sont pas tous résolus, mais il existe une volonté forte de les réduire, accompagnée d’efforts concrets. Malheureusement, cette phase s’interrompt sous l’effet de quatre facteurs concomitants.

En premier lieu, les succès militaires contre Boko Haram amènent distinctement un excès de confiance aussi bien du côté du pouvoir que de celui de l’institution militaire. Le pouvoir annonce ainsi à plusieurs reprises la victoire définitive. Or les insurgés font à chaque fois mentir ces affirmations. En second lieu, le calendrier politique, avec des objectifs à court terme (tout spécialement l’élection présidentielle de février 2019), et la contrainte de l’opinion publique conduisent le pouvoir à perdre de vue les réalités du terrain (1). En troisième lieu, la résilience de Boko Haram est grandement sous-­estimée. Les leçons du passé sont oubliées et on juge que l’érosion du potentiel militaire insurgé suffira à faire disparaître l’entité djihadiste. Il est vrai que la pression qui s’exerce sur elle la met à mal. Bousculée au Nigeria et dans les pays voisins, elle connaît également d’importantes dissensions internes qui aboutissent à son fractionnement en deux mouvements distincts (2). Mais cette situation, au lieu d’affaiblir les deux groupes armés existant désormais, profite à celui qui est « validé » par l’État islamique, qui gagne en efficience.

Enfin, en quatrième lieu, la politique d’approche globale, pourtant souhaitée par Abuja au départ, fait long feu. La détermination politique s’évapore, privilégiant la solution militaire, plus rentable à court terme. Les moyens de la reconstruction et du développement manquent et il ne subsiste que de vagues promesses (3). Un ralentissement de la dynamique vertueuse puis une stagnation de celle-ci marquent la nouvelle période qui commence début 2017. La volonté de lutter contre la corruption décline, les efforts pour améliorer la logistique ne sont pas poursuivis (4), le moral des troupes est négligé, l’approche globale n’est plus que rhétorique… Les djihadistes, et en particulier ceux de l’État islamique en Afrique de l’Ouest (Islamic State in West Africa : ISWA), profitent de ce contexte pour se régénérer. À leur tour, ils ouvrent une nouvelle phase du conflit durant l’été 2018 (avec des prémices au printemps) en donnant le sentiment de vouloir « redépasser » l’étape de la guerre irrégulière pour disputer l’initiative militaire à Abuja.

Une situation difficile (5)

Boko Haram, dans ses deux déclinaisons actuelles, apparaît comme le problème principal d’Abuja. Or d’autres foyers d’insécurité, voire d’instabilité, brûlent aussi dans le pays. Tout d’abord, la zone du delta du Niger reste sous la menace de groupes armés dont les revendications multiples et confuses (notamment environnementales) ne suffisent pas à cacher l’attrait pour le banditisme. Celui-ci passe, entre autres, par un chantage à la manne pétrolière sur fond de corruption, dans le cadre d’une amnistie bancale. Dans cette zone, le séparatisme biafrais a aussi repris un peu de vigueur en 2017, mais le phénomène reste relativement bien contrôlé. Ensuite, le Nigeria connaît une dégradation des conflits entre communautés d’éleveurs et de cultivateurs, dans la ceinture centrale du territoire. Les violences communautaires gagnent en intensité et en létalité depuis quelques années (6), tout spécialement depuis 2018 (7) dans la zone de Kaduna. Le conflit avec Boko Haram exacerbe indirectement la crise, les éleveurs étant musulmans et les agriculteurs, chrétiens (8). Le pouvoir est aussi accusé de favoriser les premiers, même si rien n’atteste sans ambiguïté cette préférence (9). Les causes de ces violences sont diverses : sécheresse, investissements pour le développement des terres détournés, conflit contre Boko Haram dans le nord-est qui pousse les uns et les autres à s’installer plus au sud, grignotage des terres fertiles par l’expansion urbaine… Enfin, le banditisme n’est pas l’apanage des groupes armés du delta du Niger ou des factions de Boko Haram : d’autres entités plus ou moins organisées le pratiquent allègrement, à commencer par des braquages, des kidnappings avec demandes de rançons dans le nord-ouest.

Même s’ils ne sont pas nouveaux, ces foyers pèsent lourd sur les Forces de Défense et de Sécurité (FDS). Elles doivent disperser leurs moyens, dont les meilleures unités, aux dépens d’une concentration contre les « deux » Boko Haram. Les faiblesses des forces de sécurité, y compris de la Mobile Police (MOPOL), alourdissent le fardeau des forces de défense. Ces dernières doivent ainsi être déployées afin d’effectuer des missions qui, en principe, devraient incomber à la police en général et à la MOPOL en particulier. Malgré quelques avancées constatées lors de la « période dynamique », à commencer par l’amélioration des dispositifs et la coopération police/armée, les forces de sécurité restent médiocres. Cela facilite la réimplantation des djihadistes dans les secteurs sécurisés par l’armée. Ces problèmes expliquent en partie l’enlèvement de 110 lycéennes à Dapchi le 19 février 2018 par l’ISWA. En conséquence de quoi, le pouvoir engage communément les militaires dans les opérations de maintien ou de rétablissement de l’ordre. Ce choix de recourir à l’armée pour pallier les défauts des forces de sécurité s’accompagne de l’idée sous-­jacente que, face aux fauteurs de troubles, la solution réside dans la puissance de feu (10). C’est notamment ce qui survient dans l’Adamawa en décembre 2017. L’aviation est ainsi utilisée pour des missions de rétablissement de l’ordre public. Des raids sont menés, provoquant la mort d’au moins 35 personnes (11) selon Amnesty International. Cet usage de l’aviation offensive est évidemment une aberration, en totale contradiction avec les progrès de discernement péniblement accomplis entre 2015 et 2017. Les mauvais choix annulent les aspects intéressants de la nouvelle doctrine contre-­insurrectionnelle (12). Autre illustration, le gouverneur de l’État du Borno annonce que la stratégie va consister à regrouper les civils dans les grandes villes et à leur périphérie (13), ce qui revient à créer l’équivalent des hameaux stratégiques du Vietnam (en plus grande taille) ou, propre au continent africain, l’équivalent des villages protégés (Protected Villages – PV) de Rhodésie, avec l’inefficacité de ces solutions.

Ces sollicitations constantes et aux quatre coins du pays se traduisent par l’impossibilité d’organiser des rotations de personnels. Les unités sont engagées au combat dans le nord-est depuis parfois plus de deux ans, avec seulement quelques très rares et courtes permissions pour les soldats. En conséquence de quoi, le moral des troupes, regonflé avec l’élection du président Buhari en 2015, baisse dangereusement courant 2018. Corrélativement, l’ISWA gagne en aptitudes. L’indiscipline n’est pas rare dans les rangs de l’armée, tout comme les abandons de postes, et des cas de désertion sont rapportés. Le mauvais moral et l’impression d’invincibilité d’un ennemi souvent insaisissable ont pour incidence l’exacerbation des réflexes de brutalité contre les civils. Ils provoquent aussi la crispation des relations – déjà tendues par le passé – avec les organisations non gouvernementales qui tentent d’aider les populations civiles dans des conditions très difficiles (14). La baisse du professionnalisme affleure dans les récents succès militaires de l’ISWA. Il est indéniable que ce dernier a gagné en efficacité. Ses combattants paraissent plus compétents, avec des schémas d’attaque qui ne sont pas sans rappeler les actions en Somalie (15), c’est‑à‑dire des actions élaborées. Cependant, cette montée en puissance doit aussi être considérée à l’aune d’une usure de l’armée nigériane et des autres facteurs (et leurs conséquences) évoqués supra.

Sur le seul plan militaire, l’indigence des positions défensives des bases assaillies témoigne du déclin du professionnalisme péniblement ébauché entre 2015 et 2017. Elle contribue à expliquer la chute des bases de l’armée. En effet, l’idée de « bases militaires » est ici trompeuse : en pratique, le terrain est très mal aménagé ; les tranchées sont insuffisamment profondes et mal placées ; les retranchements sont ridicules et ressemblent davantage à des « cabanes » qu’à des postes de tir ; les plans de feu sont à l’évidence inexistants (avec des positions incapables de s’appuyer mutuellement). La mise hors de combat d’une trentaine de soldats pendant l’attaque de Jilli, le 14 juillet 2018, n’a rien d’étonnant. D’autant moins que l’ISWA recourt aux méthodes de déception rodées du temps du Boko Haram historique (16) et désormais améliorées (17). Du mois de juillet à la mi-décembre 2018, l’ISWA mène ainsi une vingtaine d’attaques. Cette accumulation et quelques succès notables dégradent encore un peu plus le moral des gouvernementaux. Ils sont également synonymes d’un choc psychologique alors que l’ennemi était présenté comme vaincu. De plus, la situation profite de facto au Boko Haram historique (la faction commandée par Shekau) même si ce groupe reste – pour l’heure – toujours engoncé dans ses méthodes « traditionnelles (18) », ce qui ne l’empêche pas de mener des actions de guérilla et de terroguérilla (visant aussi bien des civils que des militaires) dans le nord-est, mais aussi au Niger et au Cameroun.

Aperçu de l’état des forces terrestres

Le budget de la défense nigérian pour 2018, de 1,5 milliard de dollars (19), n’est pas négligeable à l’échelle de l’Afrique subsaharienne. En 2015, l’armée aligne plus de 160 000 hommes y compris les forces paramilitaires et l’augmentation des effectifs se poursuit aujourd’hui. L’inflation se justifie au regard des circonstances. Néanmoins, la précipitation prévaut, avec des ambitions revues à la hausse quant aux recrutements. Dans un premier temps, il était prévu de faire croître les effectifs jusqu’à 200 000 hommes à l’horizon 2024, mais il a soudainement été annoncé que les forces armées atteindraient 220 000 hommes en 2019. Certes, d’importants efforts ont été consentis en matière de formation et d’infrastructures idoines. Toutefois, un tel afflux de recrues est difficile à absorber. Afin de pallier ces carences, Abuja fait appel à de nombreux partenaires étrangers pour la préparation de son armée (20), à commencer par celle de ses forces spéciales. De nombreux militaires sont ainsi formés à l’étranger : Pakistan, Russie (21). D’autres le sont dans le pays même, par exemple avec l’aide du Royaume-­Uni. Autre exemple, courant 2018, la Turquie a signé avec le Nigeria un accord de coopération pour une durée de cinq ans, ensuite reconductible chaque année. Au sujet des recrutements, il convient de rappeler que des effectifs importants sont nécessaires dans la durée pour affronter une insurrection. La technologie ne fait pas tout : le contrôle du territoire n’est qu’une illusion lorsqu’il dépend quasi exclusivement du survol de drones ou d’autres aéronefs. L’erreur du Nigeria n’est donc pas de vouloir augmenter ses effectifs, mais de les gonfler avec des personnels insuffisamment formés et entraînés. Mais il est vrai que le temps presse.

Les forces terrestres comprennent une brigade de la garde présidentielle, considérée comme une unité d’élite, ainsi qu’un commandement des forces spéciales qui chapeaute au moins cinq unités de forces spéciales ou commandos (de type rangers pour ces dernières). Il est à noter que l’ensemble des branches de l’institution militaire (terre, air et mer) possède aujourd’hui ses propres unités de véritables forces spéciales. L’armée dispose par ailleurs de la 3e division blindée, des 1re et 2e divisions d’infanterie mécanisée, des 81e et 82divisions, à vocation interarmes, et enfin des 6e, 7e et 8e divisions d’infanterie. La 81e division est en réalité de la taille d’une brigade. Ses éléments ont certaines capacités amphibies (22) qui leur permettent d’opérer dans le delta du Niger. La 7e division est quant à elle relativement spécialisée dans les opérations de contre-­insurrection. Une attention a été portée au développement des forces spéciales et d’unités commandos. D’autres innovations sont également à signaler, comme la création en 2016 d’un bataillon motocycliste au sein de la 7e division afin de contrer les combattants ennemis qui eux-­mêmes utilisent de nombreuses motos, particulièrement adaptées dans la forêt de Sambisa. Citons aussi la création de petites unités d’intervention très agiles, les Mobile Strike Teams (MST) (23) ou celle d’une aviation légère de l’armée de terre. Malheureusement, cette initiative paraît avoir pris beaucoup de retard, après des débuts pourtant prometteurs.

L’arsenal terrestre se caractérise par une non-­standardisation quasi doctrinale tant elle est de rigueur. Il comprend des chars T‑72, des Vickers Mk3. Bien qu’ils soient mécaniquement usés et dépassés, notamment en matière de combat nocturne, ces derniers gardent une valeur pour l’appui de garnisons isolées (ils servent alors surtout de bunkers/barrières mobiles aux entrées des garnisons). Plus rustiques que les T‑72, ils font parfois office de véhicules de démolition, évitant ainsi le risque d’endommager des pièces extérieures des T‑72. Par ailleurs, leur silhouette haute est un avantage là où la végétation est dense : les équipages ont ainsi une meilleure vision, sans être « noyés » au milieu des bosquets et arbustes. Une centaine de T‑55 sont également listés, mais seuls une vingtaine semblaient opérationnels en 2016-2017. Des Scorpion servent toujours aux missions de reconnaissance (24) au profit des unités mécanisées. De nombreux blindés de combat sont également en service : ERC‑90 (très appréciés de leurs équipages), AML‑90 et un reliquat d’AML‑60, des EE‑9 Cascavel. L’armée aligne aussi des VBL et surtout des Otokar Cobra. La quantité des Cobra toujours en service est inconnue : beaucoup ont été détruits ou capturés par Boko Haram (et détruits ensuite par les gouvernementaux). À cela s’ajoutent différents modèles et variantes de blindés de transport de troupes, soit au moins 22 modèles en 2016-2017. L’artillerie n’est pas mieux lotie. Le désordre prévaut aussi pour l’armement léger avec, par exemple, au moins douze types de fusils d’assaut, dont certains avec des calibres différents (25). En 2018, la non-standardisation restait une des caractéristiques majeures de l’armée nigériane, avec tout ce que cela implique de difficultés pour l’entretien des équipements, pour la logistique sur le terrain (savoir vers quelle unité acheminer quel calibre d’obus), mais aussi pour la formation : les personnels ne peuvent être formés sur un modèle standard. En revanche, la situation s’améliorera sensiblement à moyen terme dans le domaine de l’armement léger. Un contrat a été signé en mars 2018 pour la fabrication du fusil d’assaut Beryl (26) parallèlement à celle, probable, de l’OBJ‑006 Kalachnikov, le tout par la DICON (27).

À l’aube de 2019, l’armée nigériane semble être revenue au point de départ, c’est‑à‑dire à la situation qui prévalait début 2015. Toutes les bonnes initiatives lancées sont à faire renaître : lutter contre la corruption, restaurer le moral des soldats (en organisant un système de véritables permissions, etc.), lancer des processus contre les exactions commises par les FDS, revenir à une logique de professionnalisation des forces plutôt que d’inflation absolue des effectifs. En dépit des succès militaires de l’ISWA, tout n’est pas perdu. Un retour aux fondamentaux sains, aux socles ébauchés à partir de 2015, aurait un effet positif immédiat et enrayerait la montée en puissance de la faction Barnawi tout en stoppant les profits militaires qu’en tire la faction de Shekau. Surtout qu’un grand nombre de militaires nigérians font preuve de belles qualités et qu’ils savent aussi combattre. Par exemple, en décembre 2018, à Gudumbali (28), l’affrontement a mal commencé pour les gouvernementaux. Alors que les militaires distribuaient de l’aide aux civils, les djihadistes ont attaqué, espérant profiter de l’effet de surprise. Certains des combattants islamistes étaient d’ailleurs habillés comme des réfugiés. En dépit du flottement, les militaires ont repris l’ascendant, au prix de la perte d’une dizaine des leurs et de nombreux disparus (29). Si la situation est grave, elle n’a pas encore la dimension catastrophique qui prévalait à partir du printemps 2013. Militairement, donc, un nouveau sursaut amènerait des résultats rapides. Mais, pour combien de temps ? Encore une fois, la seule solution militaire ne peut donner que des résultats immédiats, mais superficiels. L’érosion du potentiel militaire des insurgés ne signifie pas leur disparition. Sans traiter les racines du mal, les phases du conflit continueront de s’égrainer.

Notes

(1) Ce qui provoque une rupture entre pouvoir politique et responsables militaires, les seconds devenant des « fusibles » quant à l’absence de résultats, ou plus exactement quant à des résultats qui ne correspondent pas à ceux proclamés par Abuja. En novembre 2018, un nouveau commandant de théâtre est nommé pour le nord-est : il est le cinquième sur une période d’à peine deux ans.

(2) Des possibilités de coopération ponctuelle entre les deux factions issues du « Boko Haram historique », au moins à l’échelle locale, ne sont pas exclues et semblent s’être déjà plus ou moins produites. Les deux entités en question sont le Groupe sunnite pour la prédication et le djihad (« véritable » nom de Boko Haram « historique ») et l’État islamique en Afrique de l’Ouest plus connu sous sa désignation anglo-saxonne, Islamic State West Africa (ISWA).

(3) Par exemple lorsque des déplacés sont convaincus de retourner dans leur village et que, sitôt sur place, ils découvrent que tout a été détruit, que les autorités se désintéressent complètement de leur sort, dans des zones insuffisamment sécurisées. Les militaires jouent alors un rôle par trop ignoré. Ils aident les civils en donnant leurs propres rations. Cette situation a accru le sentiment d’abandon des uns et des autres tout en étant symbolique du défaut d’approche globale dans un cadre d’exigence politique de résultats (caricaturalement, « si les déplacés rentrent chez eux, alors tout va bien »…).

(4) Le 29 novembre 2018, à Arege, les militaires doivent rompre le contact et abandonner leurs positions, faute de munitions, alors qu’ils ont pourtant réussi à contenir un assaut des djihadistes.

(5) Voir aussi « Nigeria : guerre de territoires et de bétail » par Julien Camy, avec une carte remarquable, Défense & Sécurité Internationale, no 139, janvier-février 2019.

(6) Ce, même si la cohabitation de la mosaïque de communautés qui composent le pays (plus de 250 ethnies) tend à être pacifique.

(7) En juin 2018, entre 86 et 200 personnes sont tuées dans les affrontements. Selon International Crisis Group, entre 2011 et 2016, au moins 2 000 personnes ont été tuées chaque année dans ces conflits communautaires.

(8) Dans les deux cas, l’animisme est fortement présent.

(9) L’armée nigériane en opération ne souffre pas ostensiblement de préférences accordées à telle ou telle communauté en fonction de son orientation religieuse, de l’appartenance ethnique, etc.

(10) Idée qui n’est pas récente au Nigeria.

(11) Selon des témoignages locaux, 78.

(12) Voir tout particulièrement le riche ouvrage d’Akali Omeni, Counter-insurgency in Nigeria : the military and operations against Boko Haram, 2011-2017, Routledge, Londres, 2017.

(13) « Strategic hamlets in Nigeria », Stratfor, 11 janvier 2018, (https://​worldview​.stratfor​.com/​h​o​r​i​z​o​n​s​/​f​e​l​l​o​w​s​/​h​i​l​a​r​y​-​m​a​t​f​e​s​s​/​1​1​0​1​2​0​1​8​-​s​t​r​a​t​e​g​i​c​-​h​a​m​l​e​t​s​-​n​i​g​e​ria).

(14) En décembre 2018, Abuja interdit durant quelques heures les activités de l’UNICEF dans le nord-est du pays au prétexte que l’organisme œuvre au profit de Boko Haram, en laissant notamment fuiter les allégations de crimes commis par les militaires et policiers nigérians. L’attitude de l’armée nigériane vis‑à‑vis des ONG est emblématique de ce qui prévaut en Afrique : les différents acteurs ne se comprennent pas et montrent peu d’empressement à essayer de le faire.

(15) Outre les actions suicides qui précèdent les assauts, le mouvement se dote de plus en plus de pick-up armés, notamment grâce aux prises sur les forces gouvernementales. De fait, il renoue avec une forme de mobilité hybride, entre la mobilité propre aux armées – motorisées et solidement équipées – et celle des guérillas, plus fluide. Cela leur permet notamment d’adopter la tactique de l’essaim afin d’obtenir localement la supériorité numérique et de puissance de feu. Il renoue aussi avec la guerre classique en utilisant des blindés précédemment capturés, dont au moins un char Vickers aligné lors de l’attaque de Gashikar le 26 septembre 2018. Toutefois, les blindés de Boko Haram ont une durée de vie réduite en raison des difficultés techniques à les maintenir en fonctionnement et parce qu’ils constituent des cibles prioritaires pour l’aviation.

(16) Laurent Touchard, « Méthodes et tactiques de Boko Haram », Défense & sécurité internationale, no 135, mai-juin 2018.

(17) L’avant-garde des assaillants leurre les sentinelles en s’approchant à bord de véhicules semblables à ceux de l’armée et en étant vêtus de treillis également portés par les militaires.

(18) Laurent Touchard, op. cit.

(19) Le montant varie selon les sources : de 1,5 à 2,1 milliards de dollars.

(20) Il est à noter que le Nigeria forme aussi des personnels du continent. Ainsi, les deux premiers pilotes libériens brevetés depuis la guerre civile l’ont été au Nigeria au printemps 2018, dans le cadre de l’aide que celui-ci apporte au Liberia.

(21) Notamment pour les équipages des Mi‑35M, pour les personnels chargés de leur entretien.

(22) Dans l’urgence de renforcer les effectifs fatigués, des éléments de la 81e division ont été déployés dans le nord-est, au sein d’une unité ad hoc détachée, la 81 Division Forward Brigade. Ce sont eux qui ont encaissé le choc de l’attaque djihadiste à Jilli le 14 juillet 2018, alors que le terrain ne leur était pas familier. Les éléments en question constituent donc une cible à la portée des combattants de l’ISWA.

(23) Qui, dans une certaine mesure, correspondent au concept de forces contre-insurrectionnelles pensé par Michel Goya.

(24) Jusqu’à 157 Scorpion en 2016-2017, leur nombre a probablement baissé depuis.

(25) Les soldats d’un même groupe de combat peuvent ainsi être armés différemment.

(26) Deux mille sont déjà en dotation dans l’armée nigériane depuis quelques années.

(27) Defence Industries Corporation of Nigeria.

(28) La localité a déjà été attaquée et prise quelques heures en septembre 2018, avant une réaction vigoureuse de l’armée.

(29) D’autres sources mentionnent 28 tués. L’armée ne reconnaît officiellement que la mort d’un seul militaire.

Légende de la photo en première page : Opération conjointe entre un BIR (Bataillon d’Intervention Rapide) camerounais et des forces nigérianes. (© MoD)

Article paru dans la revue DSI n°140, « Le T-90, cavalier des steppes », mars-avril 2019.
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