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Russie-Ukraine : anciens et nouveaux leviers du conflit

Malgré quelques mouvements de la ligne de front, la guerre dans l’Est de l’Ukraine est, au bout de cinq années, surtout devenue un instrument politique, pour Kiev comme pour Moscou, et un levier de mobilisation symbolique dans des États confrontés à une crise économique fortement ressentie par les populations.

Depuis 2014, en parallèle d’un vaste chantier de réformes des principaux secteurs de son appareil étatique à la suite de la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne, l’Ukraine doit faire face à deux fronts sur son territoire : la péninsule de Crimée est annexée par la Russie depuis le mois de mars 2014, et le conflit armé dans la région du Donbass ayant fait plus de 13 000 morts et plus de 1,3 million de déplacés selon les estimations officielles (1). L’incident entre navires russes et ukrainiens qui s’est déroulé dans le détroit de Kertch, en novembre 2018, a montré l’actualité des tensions entre les deux États, et rappelé l’absence de cadre de négociations, en dépit de l’omniprésence du thème de l’occupation de la péninsule dans les discours des dirigeants ukrainiens.

Malgré la signature des accords de Minsk en février 2015, le conflit dans l’Est de l’Ukraine se poursuit, ayant mobilisé plus de 250 000 militaires du côté ukrainien (2) et piégeant près de 600 000 civils de part et d’autre de la ligne de front qui traverse les régions de Donetsk et de Louhansk, dans le bassin industriel du Donbass (3). L’arrivée au pouvoir de Volodymyr Zelensky, le 21 avril 2019, face au président sortant Petro Porochenko, a révélé la cristallisation d’une défiance de la population ukrainienne à l’égard des élites politiques, et la lassitude à l’égard de la rhétorique instaurée par son prédécesseur sur la guerre en cours. La politique de « passeportisation » reprise par la Russie dans les régions de l’Est de l’Ukraine après l’élection présidentielle (voir infra) est emblématique de la volonté de poursuivre l’utilisation de ces « États de facto » comme un levier de déstabilisation de la scène intérieure ukrainienne.

Genèse du conflit
Un enjeu géopolitique et identitaire : l’échec de l’intégration de l’Ukraine au projet eurasiatique

L’orientation pro-européenne prise par l’Ukraine à la suite des mobilisations « Euromaïdan » qui se sont déroulées durant l’hiver 2013-2014 a mis en échec les ambitions de la Russie d’associer Kiev à son projet d’Union économique eurasiatique (UEE), un processus intégrationniste rival de l’intégration européenne instaurant une zone d’exclusivité commerciale dans plusieurs pays de l’ex-Union soviétique.

L’Ukraine, pays de plus de 40 millions d’habitants et deuxième puissance économique, militaire, nucléaire et démographique de l’URSS occupant une place symbolique dans l’historiographie russe comme étant « le berceau du monde slave », devait être un des piliers du projet régional économique et politique russe d’UEE, qui comprenait également la Biélorussie et le Kazakhstan. Le basculement pro-européen de l’Ukraine en 2014 avait constitué une perte majeure pour la politique étrangère de Moscou dans son « étranger proche », mettant à mal son projet de rétablissement d’un pôle de puissance (4).

Après la présidence du candidat pro-occidental Viktor Iouchtchenko (2005-2010), au cours de laquelle avait pu être observée une cristallisation des tensions entre la Russie et l’Ukraine, notamment vis-à-vis du transit du gaz russe par l’Ukraine, l’arrivée au pouvoir de Viktor Ianoukovitch en 2010 représentait une opportunité pour la Russie de favoriser un tropisme ukrainien vers l’union douanière voulue par Moscou. Le refus du président ukrainien de signer l’accord d’association avec l’Union européenne lors du sommet du Partenariat oriental à Vilnius, en novembre 2013, avait suscité plusieurs mois de mobilisation dans la capitale et dans les principales villes d’Ukraine. Le départ de Kiev du président Viktor Ianoukovitch après trois journées ayant fait une centaine de morts dans la capitale ukrainienne au mois de février 2014 avait conduit à l’instauration d’un gouvernement intérimaire et à l’organisation d’élections présidentielles et législatives anticipées après sa destitution par le Parlement. Réfugié en Russie, le président déchu s’était proclamé « président légitime » et avait demandé à la Russie une aide militaire pour « défendre la population ukrainienne » (5).

Ce changement de pouvoir est considéré comme illégitime par Vladimir Poutine qui, dans son discours du 18 mars 2014, condamne « un coup d’État perpétré par des fascistes » (6). L’utilisation de références aux leaders nationalistes ukrainiens lors des mobilisations est fortement mise en avant dans le discours russe qui accentue le rôle des groupes d’autodéfense constitués lors de la révolution dans le changement de régime (7). Cette rhétorique, qui s’articule dans les médias russes aux images de violence de la révolution, fait référence aux crimes de l’armée nationaliste s’étant ralliée à l’armée allemande en 1941 pour lutter contre l’occupant soviétique. La manipulation des images et la forte visibilisation des groupes nationalistes avait nourri une représentation du mouvement fondée sur un nationalisme ethnique trouvant écho dans les mémoires post-soviétiques d’une partie de la population ukrainienne, ayant développé une logique d’identification plus marquée au passé soviétique. En raison des caractéristiques économiques et sociales de la région du Donbass, certaines populations des régions industrielles de l’Est de l’Ukraine se sentaient en effet plus proches d’un passé soviétique resté synonyme de prospérité et de stabilité économique dans les représentations collectives.

Pour les manifestants au contraire, la dimension identitaire du mouvement était liée à sa place dans la trajectoire historique et politique de l’Ukraine, et à son rôle dans la formation d’une identité nationale construite dans l’altérité vis-à-vis de la Russie. Depuis l’indépendance de l’Ukraine, les politiques mémorielles au sein du bloc occidental ukrainien avaient entretenu une identification collective à un projet national dénonçant l’occupation soviétique en glorifiant les leaders nationalistes ayant combattu pour l’indépendance du pays, et le discours européanisant s’était imposé comme un des marqueurs-clés dans la construction d’une identité nationale en Ukraine depuis les années 2000 (8).

La création d’États de facto sur le territoire ukrainien et des négociations « gelées »

Le changement de pouvoir et l’échec de ce projet d’intégration avaient conduit à une réaction offensive de la Russie qui avait annexé la péninsule de Crimée, puis organisé et militarisé les mobilisations séparatistes à l’Est de l’Ukraine.

Les mobilisations séparatistes qui prennent forme à l’Est de l’Ukraine sont nourries par l’appréhension des conséquences économiques du changement de pouvoir dans ces régions dont l’économie est principalement tournée vers la Russie, et du risque de fragmentation de la violence. Les médias russes mettent l’accent sur les premières déclarations et mesures symboliques des autorités postrévolutionnaires de Kiev, notamment sur la suppression du statut de langue régionale du russe mis en place en 2012 sous la présidence de Viktor Ianoukovitch, nourrissant une rhétorique sur l’« oppression des russophones d’Ukraine ». À partir du mois d’avril 2014, l’occupation des bâtiments d’administration publique des principales villes de l’Est de l’Ukraine par des groupuscules armés conduit à la création de la « République populaire de Donetsk » et de la « République populaire de Louhansk », constituant des « États de facto » bénéficiant d’un territoire, d’une population et d’institutions sur le modèle des autres républiques séparatistes de l’espace post-soviétique. Cette situation amène au déclenchement d’une « opération antiterroriste » par le gouvernement ukrainien et, en l’absence d’appareil militaire d’État, celui-ci n’ayant pas été réformé depuis la chute de l’URSS, la mobilisation s’organise à partir de vagues de conscription mobilisant près de 250 000 Ukrainiens, et de « bataillons de volontaires » (9), des milices d’autodéfense constituées à l’échelle locale, par la suite intégrés aux rangs de l’armée régulière et de la garde nationale.

L’avancée sur le territoire ukrainien des troupes séparatistes appuyées par l’armée régulière russe amène à une renégociation en urgence des accords de Minsk en février 2015, sous l’égide de Paris et de Berlin, après l’échec du cessez-le-feu de septembre 2014. Le mémorandum de Budapest signé en 1994, par lequel l’Ukraine acceptait de se défaire de son arsenal nucléaire en échange de la garantie de la préservation de son intégrité territoriale, est écarté. En l’absence de reconnaissance officielle par la Russie de son implication dans le conflit à l’Est de l’Ukraine, les accords sont officiellement signés par la Russie, la représentante de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), les représentants des républiques séparatistes et le gouvernement ukrainien, l’Allemagne et la France étant parties aux négociations en tant qu’États observateurs. Ces accords permettent de « geler » la ligne de démarcation sans pour autant mettre fin aux combats.

Malgré des mesures prévoyant l’interdiction de l’utilisation de l’artillerie lourde, une guerre de position prend forme dans le Donbass avec des tirs sporadiques le long d’une ligne de front de près de 450 kilomètres séparant les « territoires non contrôlés » de la région de Louhansk et de Donetsk, des zones sous administration ukrainienne. Sur le plan militaire, le gel de la ligne de front début 2015 permet au gouvernement ukrainien d’engager un processus de restructuration des forces armées, avec l’appui de plusieurs pays de l’OTAN. Néanmoins, les mesures prévues par les accords de Minsk, comme le vote d’un statut spécial pour les républiques séparatistes et leur inscription dans la Constitution après la tenue d’élections selon une législation spéciale, sont dénoncées par les acteurs politiques ukrainiens. En janvier 2018, le Parlement vote une loi sur la réintégration du Donbass qualifiant les territoires séparatistes de « temporairement occupés » et le conflit d’« agression russe », avant de consacrer l’« orientation stratégique de l’Ukraine vers l’adhésion à part entière à l’Union européenne et à l’OTAN » dans la constitution ukrainienne en février 2019.

La guerre, instrument politique et levier de mobilisation
La guerre, une ressource politique pour les élites

Malgré une relative stabilisation de la ligne de front dans le Donbass, la guerre est restée fortement présente dans les discours des dirigeants ukrainiens et dans les médias russes comme un facteur de mobilisation au cours de ces cinq dernières années.

En 2014, l’annexion de la Crimée par la Russie avait été accueillie avec une ferveur patriotique par la population russe, nourrissant la cote de popularité de Vladimir Poutine. Cette annexion, aussi bien symbolique que stratégique, s’était déroulée quasiment sans un coup de feu après que des groupuscules armés se furent emparés des bases ukrainiennes et du Parlement dans un contexte de défection d’une partie des services de sécurité ukrainiens. Bénéficiant d’un bail de location pour le stationnement de la flotte russe dans le port de Sébastopol jusqu’en 2042 signé lors des accords de Kharkov en 2010, le « rattachement » de la Crimée était alors justifié par les autorités russes comme la réparation d’une « erreur historique » commise par Nikita Khrouchtchev et utilisé comme un vecteur de mobilisation politique sur la scène politique russe (10). En août 2016, la montée des tensions à la frontière sous couvert d’une accusation de préparation d’un acte terroriste par les services secrets ukrainiens par la Russie avait servi de prétexte pour une augmentation de la militarisation de la frontière et au déploiement de missiles S-400 sur la Péninsule, avec la menace de rupture des liens diplomatiques avec l’Ukraine. L’annexion de la Crimée a eu pour effet de transformer la mer d’Azov en « lac intérieur » russe, malgré la signature d’un traité bilatéral en 2003 toujours en vigueur partageant les eaux territoriales entre les deux États. Le pont de Kertch, reliant la région russe de Krasnodar à la Péninsule, est inauguré par le président russe en mai 2018. Dès l’été 2018, la construction du pont a eu pour conséquence de ralentir l’activité des ports ukrainiens du fait de l’inspection systématique des navires à destination ou en provenance des ports ukrainiens de Marioupol et de Berdiansk, entraînant une diminution de 30 % des revenus du port de Marioupol, la hauteur du pont limitant notamment le passage de certains navires (11). En novembre 2018, l’arraisonnement de trois navires ukrainiens par des bâtiments russes dans le détroit de Kertch et la capture des marins ukrainiens pour « avoir pénétré illégalement dans les eaux territoriales russes » en violation flagrante du traité de 2003 avaient conduit à l’instauration de la loi martiale dans plusieurs régions d’Ukraine par le président Porochenko. Initialement prévue pour une durée de soixante jours, cette mesure d’exception avait été ramenée à 30 jours sous la pression des débats parlementaires et en raison de l’imminence de l’élection présidentielle, maintenue au 31 mars 2019.

L’orientation pro-européenne et l’entrée en guerre avec la Russie ont conduit les élites ukrainiennes arrivées au pouvoir après les mobilisations « Euromaïdan » à développer un discours de légitimation politique alliant processus de démocratisation et stigmatisation des pratiques criminelles du pouvoir précédent, en parallèle de mesures symboliques entérinant l’indépendance de l’Ukraine vis-à-vis de la Russie. Dans ce cadre, la guerre et les événements y étant liés, comme les violations du cessez-le-feu dans le Donbass et la capture des marins ukrainiens en mer d’Azov, ont servi d’instruments politiques et nourri les discours des dirigeants ukrainiens. La menace d’une extension territoriale du conflit et d’une invasion à grande échelle a servi à camoufler l’échec de l’avancement de certaines réformes, notamment dans le domaine de la lutte contre la corruption, et la remise en place d’une économie de prédation au cours de ces cinq dernières années.

La guerre favorise l’institutionnalisation, par les autorités ukrainiennes postrévolutionnaires, de marqueurs d’une identité nationale ukrainienne distincte du passé soviétique, avec notamment le vote de quatre lois mémorielles en 2015 établissant un continuum entre les acteurs ayant lutté pour l’indépendance et les dissidents de la période soviétique, et des lois consacrant un processus de « décommunisation ». La reconnaissance de l’indépendance de l’Église orthodoxe ukrainienne accordée par le Patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée Ier en janvier 2019 s’est également inscrite dans cette dynamique d’émancipation de la tutelle russe, constituant la suppression d’un élément fondamental dans le projet de « Monde russe » voulu par Moscou (12). Les autorités politiques ukrainiennes avaient présenté ce schisme comme nécessaire à la sécurité de l’Ukraine, l’Église orthodoxe du patriarcat de Moscou ayant constitué un vecteur important de diffusion de la vision russe du conflit, notamment dans les régions de l’Est de l’Ukraine. Cette réforme, comme la restructuration des forces armées, a constitué un instrument politique dans le cadre de la campagne présidentielle de Petro Porochenko, qui s’était effectuée sous le tryptique « Armée – Langue – Foi ». Néanmoins, l’accaparement des structures de pouvoir, l’instrumentalisation des réformes anti-corruption à des fins politiques, et l’échec de la désoligarchisation de la scène politique au profit d’un statu quo avec les acteurs économiques du pays avaient conduit à un regain de défiance de la société à l’égard des élites politiques, qui s’est manifesté dans le résultat des dernières élections présidentielles.

Un front économique entretenant une relation asymétrique

Si les conséquences politiques du conflit sont fortement visibles au niveau diplomatique, les populations subissent de plein fouet les conséquences économiques de celui-ci, qui a eu pour effet de conduire à une paupérisation des classes moyennes, aussi bien dans la société russe que dans la société ukrainienne.

L’annexion de la Crimée et le non-respect des accords de Minsk ont provoqué des vagues successives de sanctions économiques à l’encontre de la Russie par l’Union européenne et les États-Unis dès 2014. Ces mesures ont notamment visé des entreprises dans le secteur des finances, de l’énergie et de la défense. Elles comportent des mesures restrictives individuelles ciblées avec des interdictions de visa et un gel des avoirs, et des mesures restrictives limitées au territoire de la Crimée, comme pour les entreprises ayant participé à la construction de pont de Kertch. De 2014 à 2017, malgré la difficulté à estimer et à distinguer les effets des sanctions par rapport à la baisse des prix du pétrole sur l’économie russe, certaines estimations considèrent que celles-ci ont eu pour effet de réduire le PIB de la Russie de 2 à 2,5 %, et d’être suivies d’un ralentissement de la croissance à partir de 2018 (13). Si les élites russes ont semblé s’en accommoder par des logiques de contournement, ces sanctions ont eu des conséquences majeures sur l’économie du pays, la chute du rouble touchant principalement les classes moyennes. En Ukraine, malgré la mise en place de réformes visant à restructurer l’économie et une croissance du PIB estimée à 3,5 % en 2018, la dévaluation de la hryvnia et l’inflation des prix ont fortement impacté la population, qui peine également à survivre aux mesures consécutives à la politique d’austérité instaurée dans le cadre des accords signés avec le Fonds monétaire international, comme l’augmentation du prix du gaz en 2018.

En dépit des embargos économiques et commerciaux que les deux pays se sont mutuellement opposés depuis 2014, la Russie est restée parmi les premiers pays investisseurs en Ukraine, représentant environ 17,3 % du montant des investissements directs étrangers en 2018 (14). Les relations économiques entre la Russie et l’Ukraine ont toujours été fortement rythmées par la dépendance de l’Ukraine à l’égard du gaz russe, la Russie fournissant à l’Ukraine environ 60 % du gaz consommé. Cette dépendance et la dette ukrainienne à l’égard du fournisseur russe Gazprom ont alimenté une relation conflictuelle et asymétrique entre les deux États, la politique énergétique de la Russie ayant constitué un instrument de pression dès que l’Ukraine manifestait une attraction vers l’Ouest. En 2013, la Russie avait notamment promis d’abaisser le prix du gaz pour mille mètres cubes de 400 dollars à 268,50 mais aussi de reporter l’acquittement des dettes gazières contractées l’année précédente, en plus d’un prêt de quinze milliards de dollars, si l’Ukraine acceptait de rejoindre l’Union douanière. Ce qu’elle a fait jusqu’au changement de pouvoir de 2014, après quoi elle a menacé de refaire passer au-dessus de 400 dollars les livraisons (15). Dans le contexte post-2014, l’interdépendance entre le gaz russe et l’Union européenne revêt une dimension importante sur les développements des relations russo-ukrainiennes. En effet, la construction du gazoduc NordStream 2, dont la mise en service est prévue avant la fin de l’année 2019 et qui doit doubler le gazoduc Nord Stream existant, reliant la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique, risque d’accroître l’influence de la Russie en Europe et de provoquer une récession économique en Ukraine, tout en constituant un levier supplémentaire de négociation pour Moscou.

Quelles perspectives ?

L’arrivée au pouvoir de Volodymyr Zelensky lors de l’élection présidentielle ukrainienne en avril 2019 a été accompagnée d’une proposition de consultation populaire, un référendum non législatif, sur l’issue à donner au conflit dans le Donbass. Bien que la guerre ait constitué un facteur de transformation de l’État ukrainien, les répercussions économiques du conflit ont entraîné une forte lassitude dans la population. La Russie, qui a réagi à cette élection en réinstaurant une politique de distribution de passeports russes dans les républiques séparatistes, a manifesté son antagonisme avec le discours ukrainien sur le retour de ces territoires, considérés par les autorités ukrainiennes comme « temporairement occupés ». L’asymétrie du rapport de force permet à la Russie d’utiliser les républiques séparatistes comme un facteur de déstabilisation en maintenant une pression sur le gouvernement ukrainien. En l’état actuel des choses, toute solution négociée ne pourrait être que contraire aux intérêts de Moscou. Les perspectives de résolution semblent donc être, pour le moment, bien éloignées.

Notes

(1) Selon l’UNHCR (https://​www​.unhcr​.org/​u​a​/​e​n​/​i​n​t​e​r​n​a​l​l​y​-​d​i​s​p​l​a​c​e​d​-​p​e​r​s​ons).

(2) Andrzej Wilk, « The best army Ukraine has ever had », OSW Center for Eastern Studies, juillet 2017 (https://​www​.osw​.waw​.pl/​s​i​t​e​s​/​d​e​f​a​u​l​t​/​f​i​l​e​s​/​p​r​a​c​e​_​6​6​_​a​n​g​_​b​e​s​t​_​a​r​m​y​_​u​k​r​a​i​n​e​_​n​e​t​.​pdf).

(3) Rapport de l’International Crisis Group no 252, « Nobody Wants Us » : The Alienated Civilians of Eastern Ukraine », octobre 2018 (https://​www​.crisisgroup​.org/​e​u​r​o​p​e​-​c​e​n​t​r​a​l​-​a​s​i​a​/​e​a​s​t​e​r​n​-​e​u​r​o​p​e​/​u​k​r​a​i​n​e​/​2​5​2​-​n​o​b​o​d​y​-​w​a​n​t​s​-​u​s​-​a​l​i​e​n​a​t​e​d​-​c​i​v​i​l​i​a​n​s​-​e​a​s​t​e​r​n​-​u​k​r​a​ine).

(4) Bayram Balci, « Union économique eurasienne : vers un retour de Moscou en Asie centrale ? », Les études du CERI, janvier 2015 (http://​www​.sciencespo​.fr/​c​e​r​i​/​f​r​/​c​o​n​t​e​n​t​/​u​n​i​o​n​-​e​c​o​n​o​m​i​q​u​e​-​e​u​r​a​s​i​e​n​n​e​-​v​e​r​s​-​u​n​-​r​e​t​o​u​r​-​d​e​-​m​o​s​c​o​u​-​e​n​-​a​s​i​e​-​c​e​n​t​r​ale).

(5) Jean-Sylvestre Mongrenier et Françoise Thom, « Chapitre II. Le projet eurasiatique du pouvoir russe », in Jean-Sylvestre Mongrenier (dir.), Géopolitique de la Russie, Paris, Presses Universitaires de France, 2018, p. 45-80.

(6) Dans un discours en date du 18 mars 2014, le président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine accusait le gouvernement de Kiev d’être issu d’un coup d’État exécuté par des « nationalistes, néonazis, russophobes et antisémites qui donnent toujours le ton en Ukraine aujourd’hui ».

(7) Anna Colin Lebedev, « Les Ukrainiens au tournant de l’histoire européenne », Études 3/2015 (mars), p. 7-18.

(8) Emmanuelle Armandon, Laure Delcour, Anne de Tinguy, « Un an de crise en Ukraine », Les études du CERI, 2014.

(9) Pour un exposé détaillé sur les bataillons de volontaires ukrainiens, voir Rosaria Puglisi, « Heroes or Villains ? Volunteer Battalions in Post-Maidan Ukraine », Instituto Affari Internazionali, mars 2015 (http://​www​.iai​.it/​s​i​t​e​s​/​d​e​f​a​u​l​t​/​f​i​l​e​s​/​i​a​i​w​p​1​5​0​8​.​pdf).

(10) Catherine Iffly, « Quelles perspectives pour la Crimée ? », Politique étrangère, vol. 82, no 2, été 2017, p. 133.

(11) Radio Free Europe/Radio Liberty, « Sea Of Troubles : Azov Emerging As ‘Tinderbox’ In Russia-Ukraine Conflict », 7 août 2018.

(12) Tatiana Kastouéva-Jean, Maxime Audinet, « L’autocéphalie de l’Église orthodoxe ukrainienne et ses conséquences politiques », dossier « Schisme, conflits et jeux de pouvoir en orthodoxie », Observatoire international du religieux, bulletin no 27, mars 2019.

(13) Nigel Gould-Davies, « Economic effects and political impacts : Assessing Western sanctions on Russia », BOFIT Policy Brief, Institute for Economies in Transition, 2018, p. 11.

(14) Office ukrainien des statistiques (https://​ukrstat​.org/​e​n​/​o​p​e​r​a​t​i​v​/​o​p​e​r​a​t​i​v​2​0​1​8​/​z​d​/​i​n​v​_​z​d​/​n​a​d​h​_​p​i​/​a​r​h​_​n​a​d​h​_​p​i​_​e​.​h​tml).

(15) Loïc Simonet, « La crise du gaz de 2014 entre l’Ukraine et la Russie : beaucoup de bruit pour rien ? », Géoéconomie, vol. 71, no 4, 2014, p. 95-118.

Légende de la photo en première page : Le 11 avril 2014, un activiste de Donetsk monte la garde sur une barricade devant le bâtiment de l’administration régionale de Donetsk dans le Donbass, une région en conflit depuis 2014, à la suite de la révolution ukrainienne ayant entraîné la destitution du gouvernement de Viktor Ianoukovitch et la proclamation de deux républiques séparatistes : la République populaire de Donetsk le 7 avril, et la République populaire de Lougansk le 11 mai. (© Shutterstock/Denis Komilov)

Article paru dans la revue Diplomatie n°99, « État islamique : Nouveaux fronts, nouvelles menaces », juillet-août 2019.
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