Il faut inciter les patients à se fournir exclusivement en pharmacie et à rejeter le recours au marché de rue. En Afrique, où les trafiquants chinois par exemple envoient des médicaments avec des notices en français comportant de nombreuses fautes d’orthographe, il peut être efficace de jumeler programmes de prévention et de lutte contre l’analphabétisme. Des campagnes de sensibilisation doivent être menées dans les écoles.
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Le « chiffre noir », la part inconnue du phénomène – tout trafic étant par nature difficile à quantifier – est sans doute considérable pour tous ses aspects, ce qui nécessite un effort important d’approfondissement de la connaissance (rapports et études).
Les perspectives
En résumé, les faux médicaments constituent une problématique récente à croissance exponentielle. Toutefois, on constate une prise de conscience, et un début d’action est en train de prendre forme. En 2017, l’assemblée générale de l’OMS est parvenue à un consensus sur une définition inspirée de la directive européenne « Médicaments falsifiés » (2011/62/UE) : « Les produits médicaux “falsifiés” sont des produits dont l’identité, la composition ou la source est représentée de façon trompeuse, que ce soit délibérément ou frauduleusement. » (12)
Par ailleurs, l’IRACM a impulsé deux processus très prometteurs. En Afrique francophone, sept États – Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Mali, République centrafricaine, Tchad – joignent désormais leurs efforts pour mettre en place des législations adaptées et harmonisées. En Asie du Sud-Est (13), les cinq États du Mékong viennent de se réunir pour la première fois et ont décidé de travailler ensemble pour endiguer le fléau. Tout cela est encourageant.
https://www.iracm.com
Notes
(1) Bernard Leroy a été successivement juge d’instruction spécialisé dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, chef du programme d’assistance juridique de l’ONUDC et avocat général à la Cour d’appel de Versailles. Il est également membre de l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS).
(3) Sur ce sujet, voir Éric Przyswa, « Contrefaçon de médicaments et organisations criminelles », Rapport d’étude de l’IRACM, Paris, septembre 2013.
(4) Adoptée le 8 décembre 2010 par le comité des ministres du Conseil de l’Europe, la convention Médicrime est le premier traité international criminalisant et sanctionnant la production, le trafic et la vente de médicaments falsifiés. En France, elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2017.
(5) Les systèmes judiciaires nationaux, même quand le pays a ratifié l’outil international conçu à cette fin, ont du mal à s’y mettre parce que la complexité du droit international souvent les effraie.
(6) Soren Seelow, « Captagon : un rapport démonte le mythe de la “drogue des djihadistes” », Le Monde, 27 juillet 2017.
(7) Les opérations Vice Grips 2 en 2012, Biyela 1 en 2013, Biyela 2 en 2014 et ACIM en 2016. Voir : http://www.contrefacon-riposte.info/la-contrefacon/5332-afrique-113-millions-de-produits-pharmaceutiques-illicites-et-potentiellement-dangereux-saisis-en-10-jours et http://www.iracm.com/wp-content/uploads/2014/10/Dossier-dePresse-IRACM-sept14_3.pdf
(8) https://nabp.pharmacy/social-media-sites-the-new-wild-west-for-illegal-online-pharmacies/ et https://eaasm.eu/cache/downloads/dqqt3sge9hwssgcgcos440g40/455_EAASM_counterfeiting%20report_020608(1).pdf
(9) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=LEGISSUM%3Al23110
(10) « La Côte d’Ivoire déclare la guerre aux faux médicaments », Le Monde, 10 octobre 2018.
(11) Voir le site de l’IRACM destiné au grand public : http://www.le-faux-medicament-kesako.com/quiz/
Légende de la photo en première page : Le 5 mars 2018, un officier de la Food and Drug Administration (FDA) – agence de l’administration américaine en charge des denrées alimentaires et des médicaments – inspecte un colis soupçonné de contenir des médicaments contrefaits dans un entrepôt postal international de New York. (© FDA)