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Phénomènes aérospatiaux non identifiés

Une heure plus tard, le Princeton traque toujours des AAV, et un troisième observateur, le capitaine de frégate Chad Underwood, décolle à son tour du porte-­avions, remplaçant David Fravor qui vient d’apponter. C’est Underwood qui réalise l’enregistrement filmé de l’objet avec son senseur infrarouge (FLIR) sans obtenir de contact visuel en raison de la distance (14). Dans une interview donnée en 2019, il explique : « Le Princeton traquait un objet spécifique qu’ils voulaient que nous chassions, faute d’un meilleur mot. Et tout d’un coup, j’ai eu ce blip sur mon écran radar : l’objet vole entre 15 000 et 24 000 pieds dans les airs, et ne présente aucun échappement. » Underwood déclare regarder son FLIR, alors qu’il se trouve à moins de 20 nautiques de l’objet, ajoutant qu’il n’aurait pas été en mesure de suivre visuellement l’ovni « à moins qu’il ne se soit trouvé à moins de cinq nautiques comme le capitaine de frégate Fravor  ». Ce qui marque le plus Underwood, c’est « la trajectoire erratique  » de l’objet (15).

Le rapport note que si «  l’AAV ne fait preuve d’aucune agressivité contre le groupe aéronaval, sa capacité d’opérer de façon incontestée laisse [celui-ci] avec des moyens limités pour le détecter et l’engager (16) ».

2014-2015 : les incidents du « Gimbal » et du « Go Fast »

Le 26 mai 2019, le New York Times publie les interviews de deux pilotes en activité de la flottille VFA‑11, les lieutenants de vaisseau Ryan Graves et Danny Accoin. Il s’agit des deux rencontres avec des objets surnommés « Gimbal » et « Go Fast » filmées par les chasseurs embarqués sur l’USS Theodore Roosevelt, début 2015.

Mais les incidents se sont déroulés sur une plus grande période, depuis l’été 2014. Graves indique qu’une formation d’ovnis paraît suivre le groupe aéronaval du Roosevelt pendant plusieurs mois, le long de la côte est des États-Unis, entre la Virginie et la Floride, alors que le Roosevelt se prépare pour un déploiement au Moyen-­Orient. Le lieutenant de vaisseau rapporte un incident qui a concerné deux F/A‑18 volant en tandem au large de Virginia Beach, à seulement 100 pieds de distance. Un objet frôle le cockpit du premier. Le pilote le décrit comme « une sphère contenant un cube  ». L’autre pilote interviewé, le lieutenant de vaisseau Accoin, déclare avoir rencontré des ovnis à deux reprises, à quelques jours d’intervalle. Si ses équipements radars et infrarouges parviennent à les traquer, lui n’est pas en mesure de les voir avec la caméra fixée sur son casque. L’une des deux vidéos infrarouges, prises le 20 janvier 2015 au large de Jacksonville en Floride, montre un objet en forme de toupie voler contre le vent sans être affecté. Le pilote évoque une flottille d’objets, mais le champ restreint du film n’en montre qu’un seul. En mars 2015, juste avant le déploiement du Roosevelt pour le golfe Arabo-­Persique, les ovnis réapparaissent une dernière fois dans la zone d’exercice du porte-avions.

Interprétations et réactions

Dans les trois cas, les radars des chasseurs-­bombardiers ne sont pas toujours en mesure d’accrocher ces véhicules qui peuvent néanmoins être poursuivis et filmés par la caméra infrarouge et parfois observés visuellement. Les radars des bâtiments antiaériens AEGIS qui escortent le porte-­avions sont en mesure de détecter les engins, mais avec un préavis et un retour faibles. Sur les incidents de novembre 2004 et plus particulièrement sur la journée du 14, le rapport officiel divulgué par Tom DeLonge apporte six conclusions :

«  – L’Anomalous Aerial Vehicule (AAV) n’est pas un aéronef ou un engin aérien connu actuellement dans l’inventaire des États-Unis ou d’aucune autre nation.

– L’AAV présente des caractéristiques avancées faiblement observables par les différentes bandes radar, rendant inefficaces les radars.

– L’AAV révèle des performances aérodynamiques avancées sans surfaces mobiles de contrôle et sans moyens visibles de générer une portance.

– L’AAV révèle un mode de propulsion avancé, en vol stationnaire avec peu ou pas de variations d’altitude puis en passant de vitesses horizontales à des vitesses verticales de manière beaucoup plus élevée qu’aucun autre véhicule aérien connu, avec une signature radar faible ou invisible.

– L’AAV démontre peut-être la capacité de “se cacher” ou de devenir invisible à l’œil ou à l’observation humaine.

– L’AAV révèle peut-être une capacité d’opérer sous l’eau sans être détecté par nos meilleurs senseurs [sous-marins]. (17) »

Invité à donner son avis, Chad Underwood ne croit pas à un avion ou à un drone en raison de la trajectoire « erratique » : « Ces changements d’altitude, de vitesse étaient tout simplement différents de tout ce que j’ai jamais rencontré. Il se comportait d’une manière qui n’est pas physiquement normale… Parce que les avions, qu’ils soient avec ou sans pilote, doivent obéir aux lois de la physique. Ils doivent avoir une source de portance, une source de propulsion. Le “TicTac” n’obéissait à rien de tout cela. Il passait de 50 000 pieds à, vous savez, 100 pieds en quelques secondes, ce qui n’est tout simplement pas possible. (18) » Il écarte aussi l’hypothèse d’un phénomène ou d’un ballon météorologique : « C’était juste ce que l’on appelle un ovni. Je ne pouvais pas l’identifier. Il volait. Et c’était un objet. Aussi simple que cela. (19) »

Le lieutenant de vaisseau Graves s’étonne des durées de vol : « Ces choses étaient en l’air toute la journée… Garder un avion en l’air exige une quantité importante d’énergie. Avec les vitesses observées, rester 12 heures en l’air, c’est 11 heures de plus que ce que l’on peut comprendre.  » L’incident de la sphère qui passe à grande vitesse entre deux chasseurs F‑18 achève de convaincre Graves et les pilotes de son détachement qu’il ne peut pas s’agir d’un programme classifié de drones à hautes performances, car, dans leur opinion, le gouvernement américain ne risquerait pas ainsi la vie de ses pilotes (20).Quant à David Fravor, il affirme qu’il n’a jamais rien vu de comparable dans sa vie et que l’aéronef « n’est pas de ce monde » (21).

Porte-parole de la marine américaine, M. Gradisher déclare à NBC News que les observations de « phénomènes aériens non identifiés  » sont à la hausse, ajoutant que tous font l’objet d’une enquête approfondie : « Toute incursion dans nos aires d’entraînement par un aéronef ou un phénomène, identifié ou non, est problématique tant en matière de sécurité que de sûreté. (22) »

L’US Navy reconnaît avoir préparé de nouvelles instructions pour ses pilotes (23). Parallèlement, elle refuse de déclassifier les documents en sa possession concernant l’incident du Nimitz de 2004, dont ceux qui ont déjà été divulgués par des fuites (24).

Le programme avancé d’identification des menaces aérospatiales (AATIP)

Le programme d’identification avancée des menaces aérospatiales de la Defense Intelligence Agency est rendu public le 16 décembre 2017. Le programme débute en 2007 avec un financement de 22 millions de dollars qui aurait été poursuivi après l’épuisement de ce crédit en 2012 (25). Le programme AATIP aurait également changé de désignation en 2012. Manifestement autorisé à s’exprimer publiquement, Luis Elizondo, le dernier responsable d’AATIP, rallie la société d’ufologie de Tom DeLonge, qui recrute d’autres militaires concernés par les trois incidents de 2004 et 2014-2015. Elizondo explique qu’il s’agit d’étudier des technologies exotiques. Ces études sont confiées à des physiciens renommés appartenant à dix universités et deux constructeurs aéronautiques, et supervisées par la société d’ingénierie aéronautique d’un autre ufologue, le milliardaire Robert Bigelow, qui a remporté l’appel d’offres.

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