À cet égard, une conjoncture internationale désormais plus instable et anxiogène est à la fois la pire et la meilleure des situations : elle peut encourager la tentation du cavalier seul, qui ne peut qu’être sans avenir. En revanche, elle peut être un appel à l’imagination et une invitation à récréer les vieilles solidarités pour les hisser au niveau des exigences de relations désormais mondialisées. Refonder l’UE par le respect de la diversité des peuples est l’un des chemins par lesquels passe un retour à une considération à nouveau attentive à l’égard de la Turquie, en évitant la tentation de la condescendance ou du mépris. Il faut pour ce faire que les dirigeants actuels sachent se parler et mettent de la finesse dans des relations qui hésitent entre le formalisme et les anathèmes d’un côté et les excès nés du sentiment d’être sous-estimé ou incompris de l’autre.
Nous faisons nôtre la belle expression de Cengiz Aktar lorsqu’il nous explique : « Aujourd’hui, si l’élargissement vers l’est consiste à intégrer l’autre Europe, l’élargissement vers la Turquie consistera à intégrer l’Autre de l’Europe. » (4)
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Notes
(1) TEPAV (Fondation de recherche sur les politiques économiques de Turquie) et IKV (Fondation de développement économique), « Recherche sur le soutien de l’Union européenne et la perception de l’Europe auprès de l’opinion publique de Turquie », Iktisadi Kalkınma Vakfı, Istanbul, n° 307, 2019 (https://www.ikv.org.tr/images/files/İKV%20Kamuoyu%20araştırması(1).pdf).
(2) Nilüfer Göle, « Turquie : un “désir d’Europe” qui dérange », Lettres aux turco-sceptiques, Cengiz Aktar (dir.), Paris, Actes Sud, 2004, p. 70.
(3) Ces craintes sont néanmoins infondées puisque le traité de Lisbonne, signé en décembre 2007, a codifié un équilibre contraignant entre le principe d’égalité des États et la reconnaissance de leur poids démographique respectif (www.consilium.europa.eu/fr/council-eu/voting-system/qualified-majority/).
(4) Cengiz Aktar, « Pour l’Europe puissance », Lettres aux turco-sceptiques, Cengiz Aktar (dir.), Paris, Actes Sud, 2004, p. 34.
Légende de la photo en première page : Le 6 avril 2021, les responsables européens Charles Michel et Ursula von der Leyen sont reçus au palais présidentiel de Recep Tayyip Erdoğan pour exposer les grandes lignes du « nouveau chapitre » que l’Union européenne souhaite ouvrir dans sa relation avec la Turquie, après une année de tensions et d’invectives. Cette visite a eu lieu à l’invitation du président turc, soucieux de se rapprocher de l’Union européenne alors que son pays est sous le coup de sanctions américaines et que son économie est en crise. (© tccb.gov)