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L’artillerie en France : une adaptation opérationnelle continue

En 2002, un nouveau système SL2A de localisation de l’artillerie adverse par l’acoustique est mis en service. Relié au système ATLAS canon (11), il est couplé au radar de contre-­batterie COBRA (Counter-battery radar), permettant de localiser en temps réel les batteries adverses jusqu’à 40 kilomètres. Il détecte les départs de coups et les explosions. À partir de 2003, le Système de drone tactique intermédiaire (SDTI) et le Drone de reconnaissance au contact (DRAC) équipent les batteries du 61e RA. En 2008, le système de Maillage des radars tactiques pour la lutte contre les hélicoptères et aéronefs à voilure fixe (MARTHA) entre en service. La même année, le Camion équipé d’un système d’artillerie (CAESAR) est déployé en Afghanistan. Ce canon de 155 mm mobile et extrêmement précis donne rapidement entière satisfaction pour couvrir la zone de responsabilité française en Kapisa et Surobi. À partir de cet engagement, les Détachements de liaison d’observation et de coordination (DLOC) remplacent les anciens DLO.

Leur mission est la gestion des feux d’appui interarmes à travers la coordination des « effecteurs » dans la 3e dimension et le contrôle des feux. Ils permettent au chef inter-armes de décider de l’emploi, de la mise en œuvre et du déclenchement des feux en toute connaissance des risques et de pouvoir annuler une frappe à tout moment. Pour ce faire, un Conseiller des appuis-­feux (CAF) est placé auprès du chef du GTIA et un Officier coordinateur des feux (OCF) auprès de la compagnie interarmes. Les DLOC regroupent le personnel spécialisé dans le guidage aérien et des appuis : les Forward air controllers (FAC) ou Joint terminal attack controllers (JTAC). Ces artilleurs détachés auprès des troupes combattantes pour guider les appuis redeviennent incontournables sur le champ de bataille. En 2015, à la faveur de la nouvelle réforme « Au contact » marquant une remontée en puissance de l’armée de Terre, l’échelon divisionnaire regroupant les brigades réapparaît. Une fois encore, l’artillerie s’adapte au nouveau contexte stratégique, tout en faisant face sur le terrain à de fortes contraintes opérationnelles qui poussent à l’innovation.

Les artilleurs sont déployés dans de nombreuses missions d’interposition ou de maintien de la paix. Les 19 et 30 août 1995, les canons de 155 mm AuF‑1 du 40e RA contribuent par des tirs à la levée du siège de Sarajevo. Du Liban au Congo (« Artemis » en 2003), en passant par les Balkans, le Rwanda (opération « Turquoise » en 1994), les Comores (1995) et la Côte d’Ivoire, les artilleurs sont sollicités. À partir de 2001, ils sont engagés sur des théâtres d’opérations de haute intensité en Afghanistan (2001-2014), au Sahel (opérations « Serval » puis « Barkhane » depuis 2013) et au Proche-­Orient. Dans le cadre de l’opération « Chammal », le pilier artillerie est fourni par le GTA de la Task Force Wagram. Engagés contre l’État islamique en Irak et en Syrie entre septembre 2016 et avril 2019, huit GTA se succèdent, regroupant 1 100 artilleurs et réalisant plus de 2 500 missions d’appui-­feu. L’artillerie française contribue de manière décisive à la libération de Mossoul en 2017 et à la réduction des derniers bastions djihadistes en Syrie. L’avenir est l’intégration des matériels indispensables à l’adoption de la brigade SCORPION. Évolution nécessaire pour préparer de potentiels engagements de haute intensité, elle se traduit par l’adoption de nouveaux matériels (Griffon PC ATLAS, mortiers embarqués, observation d’artillerie, etc.). Le 11e RAMa sera le premier régiment entièrement équipé, avec un objectif de projection en 2021. L’histoire contemporaine de l’artillerie française souligne sa grande polyvalence et consacre le retour au premier plan des armes d’appui indispensables sur le champ de bataille.

Notes

(1) Des radars AN/MPQ‑4 ou AN/MPQ‑10 de conception américaine, des radars COTAL couplés à des canons de 90 mm tirant au sol ou des radars de Surveillance du sol (SDS).

(2) Toujours sur châssis d’AMX‑13.

(3) Il s’agit du canon de 105 mm 14/56 italien. Il est décomposable en fardeaux.

(4) Seule l’artillerie antiaérienne lourde conserve sa propre numérotation.

(5) Il permet l’observation de mobiles en mouvement, mais également le réglage et l’observation des tirs, y compris dans des conditions météorologiques dégradées.

(6) Frappe préstratégique. En 1993, les Pluton sont retirés du service pour être remplacés par la force Hadès, elle-même dissoute en 1997.

(7) Station intégrée radar d’observation continue des courants aérologiques.

(8) La Cabine Roland (CAROL).

(9) Automatisation des tirs et des liaisons de l’artillerie sol-sol.

(10) La France ayant signé le traité contre les armes à sous-munitions, elle utilise ce lanceur sous forme de lance-roquettes unitaire à partir de 2010.

(11) Il remplace le système ATILA. Il assure la gestion de la fonction des feux, mais aussi des fonctions commandement, renseignement, logistique et NRBC. Ce système est interopérable avec les alliés.

Légende de la photo en première page : Pour tirer, il faut savoir où… Des observateurs du 11e RAMa en Afghanistan. (© 11e RAMa)

Article paru dans la revue DSI n°149, « Contre-terrorisme : Les armées du G5 Sahel », septembre-octobre 2020.
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