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Les succès du soft power sud-coréen

Cette commission s’est concentrée sur cinq points :

• élargir la contribution de la Corée du Sud à la communauté internationale. Elle a augmenté sa coopération pour le développement et élargi son réseau d’échanges portant sur l’intelligence économique. Par ailleurs, elle a prévu de participer plus activement aux problématiques globales comme la protection de l’environnement ou la lutte contre la pauvreté ;

• renforcer la communication en s’adaptant au multiculturalisme ;

• renforcer la prise en compte des défis globaux auprès des citoyens coréens ;

• promouvoir des points forts comme le secteur de la haute technologie, en renforçant la collaboration du gouvernement avec le secteur privé ;

• promouvoir la culture et les valeurs coréennes auprès des étrangers.

Au cours des années 2010, ces travaux s’accompagnèrent d’efforts en vue de créer un label « Made in Korea », et d’une stratégie de nation branding dans laquelle Hallyu joue un rôle de vitrine de ce que la société coréenne offre tant au niveau commercial que dans son style de vie. Le gouvernement coréen s’est également engagé à promouvoir la culture coréenne à l’échelle internationale, imposant ainsi une troisième vague Hallyu.

Une stratégie de plus en plus globale

C’est surtout en Asie que le soft power coréen est très présent. Le cas chinois est évident en raison de la présence d’une minorité ethnique coréenne, mais on retrouve ce phénomène de manière plus importante encore en Asie du Sud-Est. Cela s’explique par la compétitivité des produits coréens et leur image positive (face au Japon et à la Chine en particulier). Des sociétés comme les Philippines ou l’Indonésie, marchés gigantesques de respectivement 100 et 250 millions de personnes, sont des cibles privilégiées. En plus de l’exportation de la K-pop et des séries télévisées, on y trouve un nombre grandissant d’enseignes coréennes qui apparaissent dans les séries ou les vidéos musicales. Produits cosmétiques, mode, voitures, téléphonie, gadgets en tous genres… Les habitants du Sud-Est asiatique développent souvent une image de la Corée qui est le reflet de ces productions, et il en découle une envie de « vivre à la coréenne ».

Ce phénomène est cependant devenu global depuis une décennie, et la reconnaissance de la culture coréenne, illustrée par Parasite ou, dans un autre registre, le tube planétaire Gangnam Style en 2012, est désormais une réalité à l’échelle mondiale, notamment dans le monde occidental (7). Hallyu est ainsi parvenu à générer une succession de vagues lui permettant de se développer et d’étendre son influence. À ce titre, la gestion de la crise de Covid-19 en Corée du Sud, fondée sur la technologie et la transparence, a renforcé la capacité d’influence de ce pays et son rôle de modèle pour de nombreuses sociétés en développement. Si cette image positive n’efface pas les problèmes que rencontre la société sud-coréenne (parmi lesquels la corruption impliquant les chaebols et les problèmes d’égalité hommes-femmes), la stratégie de soft power de Séoul, associant le travail des acteurs de la société civile et l’encadrement des autorités, est un succès qui a valeur d’exemple pour de nombreux pays.

Notes

(1) Philipp Olbrich et David Shim, « South Korea’s Quest for Global Influence », Global Asia, vol. 7, no 3, automne 2012.

(2) Shim Doobo, « Hybridity and the Rise of Korean Popular Culture in Asia », Media, Culture & Society, vol. 28, no 1, janvier 2006 ; Ryoo Woongjae, « Globalization, or the Logic of Cultural Hybridization : The Case of the Korean Wave », Asian Journal of Communication, vol. 19, no 2, 2009.

(3) Wantanee Suntikul, « BTS and the global spread of Korean soft power », The Diplomat, 1er mars 2019 (https://​thediplomat​.com/​2​0​1​9​/​0​3​/​b​t​s​-​a​n​d​-​t​h​e​-​g​l​o​b​a​l​-​s​p​r​e​a​d​-​o​f​-​k​o​r​e​a​n​-​s​o​f​t​-​p​o​w​er/).

(4) Barthélémy Courmont et Kim Eojin, « Outils et succès du soft power coréen : entre reconnaissance internationale et nation branding  », Revue d’études franco-coréennes, no 64, mai 2013.

(5) Dominique Barjot, « Le “miracle” économique coréen (1953-2013) : Réalités et limites », Outre-Terre, no 39, 2014.

(6) Lee Geun, « A theory of soft power and Korea’s soft power strategy », The Korean Journal of Defense Analysis, vol. 21, no 2, 2009.

(7) Cho Wu-Suk, « Riding the Korean Wave From ‘Gangnam Style’ To Global Recognition », Global Asia, vol. 7, no 3, septembre 2012.

Légende de la photo en première page : Image tirée de la série télévisée sud-coréenne Squid Game, diffusée sur la plateforme américaine de streaming Netflix, et qui est devenue en quelques semaines un succès mondial. Lancée le 17 septembre, elle est devenue en seulement 10 jours, le programme le plus regardé de Netflix dans 90 pays. Elle pourrait rapidement devenir la série non-anglophone la plus vue sur la plateforme de streaming, voir peut être, la plus vue au monde. Le succés de cette série s’est en parallèle accompagné d’un engouement pour l’apprentissage du coréen dans le monde (+76 % au Royaume-Uni et +40 % aux USA). (© Netflix)

Article paru dans la revue Diplomatie n°111, « Europe : quelle souveraineté ? », Septembre-Octobre 2021.
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