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Les drones sous-marins peuvent-ils révolutionner la guerre navale ?

Si la marine américaine peut s’appuyer sur les réalisations des industries offshores, le Congrès conteste cette marche forcée, exigeant des technologies abouties pour ne pas répéter les dépassements de coûts du Littoral Combat Ship. La coopération de plusieurs drones sous-marins augmente les capacités de détection, de classification et de neutralisation. Les drones sous-­marins pourront ainsi contribuer à la lutte ASM par petits fonds.

Plusieurs entreprises occidentales développent des technologies qui devraient faire évoluer les drones. La société norvégienne Yara International, associée à Kongsberg et à Rolls-Royce, prévoit d’opérer un porte-­conteneurs sans équipage d’ici à 2022 (14). De telles plates-­formes pourraient servir de bâtiments de ravitaillement, voire d’arsenal ship augmentant le nombre de missiles d’une force navale. L’industrie offshore offre une gamme de véhicules télécommandés (ROV) ou autonomes (AUV). Les ROV de la société de robotique américaine Ocean Infinity se sont distingués le 17 novembre 2018 et le 22 juillet 2019 en retrouvant les sous-­marins argentin San Juan et français Minerve disparus l’un le 15 novembre 2017 et l’autre le 22 juillet 1968.

En 2012, la Russie a créé le FPI, un Fonds pour la recherche avancée et l’innovation des systèmes de défense (Фонд перспективных исследований в системе оборонных инноваций) destiné à rattraper son retard sur les États-Unis. Le FPI, qui s’inspire de la DARPA américaine, finance des recherches permettant l’émergence de hautes technologies à usage militaire ou dual. En 2013, il identifiait dans un rapport six technologies prioritaires, dont celle des «  robots autonomes en haute mer » (15).

On dénombre sept principaux concepteurs/fabricants de drones navals en Russie : Region/Tactical Missile Armament Corporation, l’Institute of Marine Technology Problems of the Far Eastern Branch of the Russian Academy of Sciences (IPMT FEB RAS), Mako et le TsNIITochMash/Rostec, Rubin, Kometa, Marine Geo Service et Okeanpribor. Par ailleurs, Tetis Pro se spécialise dans l’importation de drones et leur adaptation aux besoins russes. En 2018, la Russie a formé un « Cluster industriel de la robotique pour les applications marines » qui comprend Okeanos, PbGMTU, le groupe « bateaux rapides », Marine Robotic Systems, Geoscan, Standart, Telros, MGBOT, Astrasoft Development, la Compagnie nationale des eaux, Akuta et le Centre de prototypage Technopark SPb.

L’autonomie des drones de surface et sous-­marins est cruciale pour des missions appartenant jusqu’à présent aux sous-­marins et destroyers. Elle est étroitement liée à l’énergie qui peut être stockée et produite. La Russie semble le seul pays au monde à disposer de la capacité d’intégrer des turbogénérateurs nucléaires dans des drones ou dans des installations sous-marines de petite taille. Elle déploie déjà la torpille autonome stratégique intercontinentale Poseidon propulsée par un turbogénérateur nucléaire. Ces petits réacteurs peuvent aussi alimenter en électricité des bornes destinées à recharger des drones. Les réacteurs nucléaires occidentaux n’ont pas cette capacité et Pékin semble négocier avec Moscou leur acquisition.

Notes

(1) Rapport de recherche 2020 sur l’industrie des équipements sans pilote », 2 novembre 2020 (https://​www​.sohu​.com/​a​/​4​2​8​9​9​7​5​3​0​_​3​5​8​040).

(2Ibid.

(3) Jon Harper, « Navy Wants 12 Billion for Unmanned Platforms », National Defense, 26 mai 2020.

(4) « Des drones sous-marins sont en cours de développement pour la marine russe » (https://vrns.ru/news/podvodnye-bespilotniki-razrabatyvayutsya-dlya-vmf-rossii//#.Ve_RX4Znb6o).

(5) « Drones sous-marins », Live Journal, 9 septembre 2015 (https://art201045.livejournal.com/tag/флот%20России).

(6) « Robots sous-marins et protection anti-torpilles : un besoin urgent », 18 août 2010 (https://​www​.vpk​-news​.ru/​a​r​t​i​c​l​e​s​/​5​934).

(7) Maxime Klimov, « Nous sommes au bord d’un nouveau “Tsushima”… », 1er mars 2016 (https://​vpk​.name/​n​e​w​s​/​1​5​0​5​2​6​_​m​y​i​_​s​t​o​i​m​_​n​a​_​p​o​r​o​g​e​_​o​c​h​e​r​e​d​n​o​i​_​c​u​s​i​m​y​i​.​h​tml).

(8) « Le potentiel militaire de la Chine à mettre en place un réseau de surveillance sous-marine alarme l’Occident », BBC News, 6 juin 2017 (https://www.bbc.com/zhongwen/trad/chinese-news-40175219?xtor=AL-73-%5Bpartner%5D-%5Bnews.ebc.net.tw%5D-%5Blink%5D-%5Bchinese%5D-%5Bbizdev%5D-%5Bisapi%5D)

(9) « Devons-nous être heureux ou inquiets ? Des pêcheurs du Jiangsu “rassemblent” des espions sous-marins américains et en capturent sept à la fois », 24 avril 2021 (https://​www​.mdeditor​.tw/​d​l​/​0​g​bBA).

(10) Rapport de recherche 2020 sur l’industrie des équipements sans pilote », art. cité.

(11) « Le potentiel militaire de la Chine à mettre en place un réseau de surveillance sous-marine alarme l’Occident », art. cité.

(12) « China finds polymetallic sulphide deposits in Indian Ocean », The Economic Times, 14 août 2018.

(13) « Qianlong 3 makes debut in Shenyang », China Daily, 22 mai 2018.

(14) « Google and Rolls-Royce Partner on Autonomous Ships », 3 octobre 2017 (https://​maritime​-executive​.com).

(15) Ilya Klabukov, Ilya Kramnik et Vasily Lebedev. « Фонд перспективных исследований в системе оборонныхинноваций » [« Fonds de recherche avancée pour le système d’innovation de défense », Research Report], Public Council of the Military-Industrial Commission of Russia, mars 2013.

Légende de la photo en première page : Un drone A18 d’ECA. La France n’est pas mal placée sur la carte mondiale des UUV, mais le domaine se montre particulièrement dynamique. (© ECA)

Article paru dans la revue DSI n°156, « Rupture australienne : quelles conséquences ? », Novembre-Décembre 2021.
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