Magazine Diplomatie

Le train au cœur des enjeux géopolitiques

L’Europe voit aussi plus loin : elle prévoit de doubler d’ici 2030 la part de marchandises sur rail. Bruxelles finance directement les mégaprojets ferroviaires, comme le Lyon-Turin dont l’UE prend en charge la moitié des 8,6 milliards du coût du tunnel. Et pour donner un essor au trafic passager, elle annonce taxer le kérosène à partir de 2023 pour les vols à l’intérieur de l’Europe. Avec la manne du plan de relance européen, les économistes de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) appellent également à accélérer encore plus la progression du transport ferroviaire : ils préconisent même la mise en place, à travers le continent, d’un train ultra-rapide (250-350 km/h), qui relierait entre elles les capitales européennes, permettant par exemple de faire le trajet Paris-Berlin en quatre heures (au lieu du double aujourd’hui). Un projet, représentant 20 000 kilomètres de lignes, avec pour but de renforcer la cohésion européenne. Recréer le sentiment européen grâce au train ?

Un pays pourrait bien servir de modèle, même s’il n’est pas dans l’Union européenne : la Suisse, qui, avec le Japon, est celui où la population prend proportionnellement le plus le train grâce à des horaires cadencés, une ponctualité et un réseau extrêmement dense. Idem pour les marchandises, dont les 70 % qui passent par le pays sont affrétés par train.

À l’autre bout du monde, le président sud-coréen Moon Jae-in, entend créer une communauté ferroviaire de l’Asie orientale, s’inspirant de l’Europe, qui s’est construite à partir de la Communauté du charbon et de l’acier. L’objectif est de créer des dessertes ferroviaires allant notamment de la Corée du Sud à la Chine en passant par la Corée du Nord. Une utopie ? On notera en tout cas que le train est aujourd’hui utilisé à la fois pour exacerber les tensions et pour chercher l’apaisement géopolitique.

Légende de la photo en première page : Le 17 janvier 2022, un passager marche dans la gare ferroviaire de Changzhou, pendant la fête du Printemps, un évènement qui amène 1,18 milliard de passagers sur le réseau ferroviaire chinois. En un peu plus de dix ans, la Chine a mis en place 38 000 km de lignes à grande vitesse, faisant du pays le plus grand réseau ferré à grande vitesse au monde (64 % de l’ensemble des réseaux grande vitesse au monde). (© Xinhua/Shi Kang)

Article paru dans la revue Diplomatie n°114, « Dossier spécial présidentielles. Quelle politique étrangère pour la France ? », Septembre-Octobre 2022.
0
Votre panier