Magazine DSI

La famille M-270/M-142, levier de puissance ukrainien

La MFOM ou la diversification des effets

Lorsque le M-270 entre en service en 1983, plusieurs types de roquettes et de missiles sont disponibles ou en cours de développement, baptisés MFOM (MLRS family of munitions). La première est la M-26, une roquette de 227 mm, stabilisée par quatre surfaces et ayant une portée allant de 10 à 32 km pour une durée de vie de 25 ans. Elle embarque 644 sous-munitions M-77 dites DPICM (Dual purpose improved conventional munition) non guidées, qui sont larguées de la roquette et explosent au contact. Chacune est dotée d’une petite charge creuse pouvant percer jusqu’à 10 cm d’acier, mais leur explosion crée un effet antipersonnel d’un rayon de quatre mètres. En théorie, le système de contrôle de tir permet de frapper à moins de 150 m du point visé. Les M-26A1 et M-26A2ER (Extended range) voient leur portée passer à 45 km, par la réduction du nombre de sous – munitions. Les A1ER reçoivent 518 sous – munitions M-85 et les A2ER, 518 M-77. La M-85 est israélienne et peut percer jusqu’à 11 cm d’acier, tout en conservant un effet de fragmentation.

<strong>Le Firefinder</strong>

Trouver des cibles dans le cadre de missions de contre-­batterie ne va pas de soi et les réseaux, TACFIRE américain comme ATLAS français, doivent être nourris. En l’occurrence, l’AN/TPQ-36 Firefinder a joué un rôle important durant « Desert Storm ». 

Entré en service au début des années 1980, ce radar installé sur remorque tractée par un Humvee permet de détecter les points de départ de tirs d’artillerie avant même que le projectile détecté n’ait frappé. 

Sa portée maximale en conditions optimales est de 18 km pour des obus ou de 24 km pour des roquettes. 

Une quinzaine d’exemplaires ont été livrés à l’Ukraine par les Pays-Bas et les États-­Unis depuis le début de la guerre. 

Aux États-­Unis, il en est en cours de remplacement depuis 2009 par l’AN/TPQ-53, de 60 km de portée, 170 exemplaires étant prévus à terme. Vingt exemplaires avaient été livrés à l’Ukraine en 2015.

Aux États-Unis et dans les pays européens, les M-26 sont en cours de destruction. Jusqu’à 2001, 506 718 roquettes (84 453 pods) ont été produites. Elles ont quitté le service de l’US Army en 2009, la France (22 000 roquettes), l’Allemagne (26 000 roquettes), l’Italie (3 894 roquettes) et les Pays-Bas, soumis au traité d’Oslo sur les sous – munitions, ayant détruit leurs stocks. Les M-28 et les M-28A1 et A2 sont des roquettes d’entraînement, à portée réduite (8-15 km), qui ne sont pas dotées de sous – munitions, mais d’un fumigène. Elles restent en service. L’Allemagne a quant à elle conçu l’AT-2, une M-26 dont la charge est remplacée par des mines antichars, également achetée par le Royaume – Uni. Des stocks restent en service, l’arme n’étant pas considérée comme relevant du traité d’Oslo. La XM-135 américaine, chargée de neurotoxique VX, a été abandonnée en cours de développement. Un programme pour une roquette qualifiée de Terminally guided weapon (TGW), dotée de sous-munitions antichars a également été lancé dans les années 1980, mais annulé en 1993 après le retrait américain.

Les années 1980 voient également le développement d’un système baptisé Assault Breaker. Reposant sur le radar Pave Mover – qui sera installé sur les E-8 Joint-STARS plutôt que sur des F-111, des OV-1 Mohawk et un système furtif –, il devait permettre de lancer automatiquement des missiles T-16 et T-22 dotés de sous – munitions antichars guidées Skeet. Si le programme a été annulé, plusieurs composantes ont abouti : le radar Pave Mover, les sous – munitions Skeet, mais aussi des composantes servant au développement du missile ATACMS (Army tactical missile system), qui sera développé en famille. Le M-49/MGM-140A (ATACMS Block 1), entré en service en janvier 1991, a été utilisé à raison de 32 exemplaires pendant « Desert Storm » et de 379 durant « Iraqi Freedom ». D’une portée de 165 km et bénéficiant d’un guidage inertiel, il remplaçait le missile Lance, en perdant la capacité nucléaire, mais en étant doté d’une charge de 950 sous – munitions non guidées M-74. Il a été produit à 1 650 exemplaires. La version M-49A1 (MGM-140B ATACMS Block 1A), à guidage GPS, a été produite à 610 exemplaires entre 1997 et 2003. Sa charge est réduite à 300 M-74, mais sa portée passe à 300 km.

<strong>Les GMLRS</strong>

Un Block 2, doté de 13 sous – munitions BAT (Brilliant anti – tank) a également été envisagé dans les années 1990, mais a été abandonné. Le M-48 ATACMS Quick reaction unitary est quant à lui équipé d’une charge militaire unitaire de 227 kg et sa portée est de 270 km. Des 176 produits entre 2001 et 2004, 60 ont été tirés en Irak et en Afghanistan. À partir de 2004, le M-57 prend le relais et est produit jusqu’en 2013 à raison de 513 exemplaires. Il conserve les mêmes caractéristiques que le M-48, mais est produit à moindre coût. Enfin, depuis 2017, 220 M-39 et M-39A1 sont convertis en M-57E1 (remotorisation, évolution du guidage, remplacement des M-74 par une charge unitaire) pour le compte des États – Unis. Une variante antinavire de l’ATACMS était envisagée, mais son financement a été abandonné. Le remplacement de l’ATACMS est par ailleurs à l’étude : Le PrSM (Precision strike missile) devrait avoir une portée de 500 km, une charge unitaire et sera emporté à raison de deux exemplaires par pod de lancement.

Si la dotation en missiles des MLRS a donc été rapidement envisagée, il faut attendre la fin des années 1990 pour voir une évolution majeure dans le domaine des roquettes. En 1998, Lockheed commence à travailler sur un concept de roquette guidée par une combinaison inertielle-GPS. Le programme devient multinational : les États – Unis en financent 50 %, le reliquat l’étant par la France, l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni. Concrètement, cela implique l’installation du système de guidage, mais aussi d’un nouveau bloc moteur et de quatre surfaces de contrôle sur le nez, commandées par des actuateurs électromécaniques. Actuellement, les M-30A2 et M-31A2 sont les seules encore en production, pour un total de 9 000 roquettes annuellement, la Turquie et Israël fabriquant également leurs propres systèmes.

0
Votre panier