Magazine DSI HS

Missilerie hypersonique. Un changement de dimension pour les opérations navales ?

• la question du guidage terminal reste posée. En se déplaçant à une vitesse hypersonique, un missile provoque une onde de choc sous forme de plasma. Elle constitue un avantage en réduisant la détectabilité, mais elle pose également la question de l’aptitude d’un système radar à pouvoir opérer – qui plus est, en supportant les températures générées par les hautes vitesses ;

• demeure également une inconnue d’ordre politico-industriel. S’il ne semble pas qu’une commande massive du missile ait été déjà été passée par Moscou, l’aptitude à les construire en quantité reste incertaine. Outre que NPO Mashinostroyeniya, son constructeur, pourrait faire face à un problème d’approvisionnement en composants touchés par les sanctions ayant suivi l’invasion de l’Ukraine, la priorité, d’un point de vue industriel, pourrait être donnée au recomplètement des stocks utilisés durant cette même guerre.

D’un point de vue stratégique, le programme est présenté par la Russie comme l’une des armes devant lui permettre de rester compétitive face aux États-Unis. Si, d’un point de vue naval, l’assertion va dépendre des paramètres vus plus haut, le Zircon pose de délicates questions en termes de dissuasion nucléaire. D’une part, la traditionnelle question de la discrimination et donc de la stabilité de crise : il est virtuellement impossible de faire la différence, au moment du lancement, entre un engin doté d’une charge nucléaire et un qui ne l’est pas. D’autre part, avec une portée estimée à 1 000 km et une charge conventionnelle ou nucléaire, le SS-N-33 tient un certain nombre de villes et de bases militaires européennes à portée de tir, avec des délais de préavis incompatibles avec une dispersion. Un tir depuis les eaux entourant l’Irlande, neutre et sans capacités de combat de surface ou ASM significatives, pourrait ainsi atteindre Brest en quelques minutes.

Au-delà du cas du Zircon, il faut également noter que le missile aérobalistique Kinzhal est également considéré comme ayant une capacité antinavire. Si sa qualité hypersonique reste discutée – au regard en particulier de son aptitude à la manœuvre –, une portée de 1 500 à 2 000 km fait poser, là aussi, la question du ciblage, mais également celle du guidage terminal. De fait, un groupe aéronaval progresse d’environ un kilomètre en une minute, de sorte que tirer sur sa position connue au moment de la détection n’a pas beaucoup sens. Le seul cas de figure où ce pourrait être pertinent est celui d’une frappe nucléaire.

Les systèmes chinois

La Chine s’est montrée historiquement prompte à développer ses capacités hypersoniques ou de haut supersonique, avec la mise en service du missile à moyenne portée DF-17 – un engin sol-sol utilisant un planeur hypersonique – mais aussi, depuis 2019, du missile de croisière DF-100. Le statut hypersonique de ce dernier reste cependant à confirmer. Plus récemment, elle a travaillé sur d’autres systèmes dont la qualification hypersonique reste à démontrer – mais qui opèrent certainement dans le haut supersonique. Ils ont clairement des conséquences en termes de guerre navale. Mi – octobre 2020 apparaissaient les premières images d’un long missile à deux étages et probablement à propulsion solide, partiellement encastré sous le ventre d’un bombardier H-6N, un assemblage composite qui était évoqué dès 2017. Depuis lors, plusieurs photos de l’engin et de son porteur ont été publiées. Concrètement, le missile semble proche du DF-17 en termes de taille, mais sa charge paraît différente.

0
Votre panier