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L’exportation d’armements en URSS et en Russie

D’un point de vue historique, l’URSS s’est très rapidement lancée dans l’importation d’armements : c’est un décret daté du 19 avril 1917 qui fonde le GUZS (5), un directorat chargé des acquisitions et de la gestion d’armes achetées à l’étranger et servant les besoins de la révolution bolchevique dont les intentions étaient de s’exporter… ce qui nécessitait des armes, dont une bonne partie était importée ! Ce directorat va être transformé à plusieurs reprises avant de donner naissance le 8 mai 1953 au GIU (6), département rattaché au ministère du Commerce intérieur et extérieur de l’URSS : de fil en aiguille, ce dernier va voir son rôle évoluer et s’accroître progressivement pour devenir en 1957 le « Comité d’État du Conseil des ministres de l’URSS pour les relations économiques extérieures » qui, comme son nom l’indique, est directement rattaché au conseil des ministres de l’URSS. Encadrée par le principe des plans quinquennaux, l’économie soviétique consacrait une part très importante de ses moyens à l’industrie de la défense (7) avec environ un adulte sur cinq occupé (de près ou de loin) dans le secteur industriel de la défense.

L’importante capacité de production soviétique en matériels militaires a permis d’équiper ou de rééquiper les pays du Pacte de Varsovie, mais également tout un ensemble de pays proches et/ou non alignés qui ne pouvaient ou ne souhaitaient pas s’équiper en Occident. Cette coopération militaro – technique comprenait la fourniture d’équipements, mais également les formations nécessaires pour opérer et entretenir ces derniers. À ce titre, il est une distinction importante à effectuer entre les exportations à l’époque soviétique et celles à l’époque russe : le type de matériels exportés. Alors que l’URSS exportait principalement des matériels d’un standard d’équipement inférieur (donc moins performants) à celui employé par les forces armées soviétiques, la Russie postsoviétique a joué une partie de la survie de sa capacité de production industrielle sur l’exportation de produits aux meilleurs standards d’équipement disponibles.

Lorsque l’URSS disparaît à la fin de 1991, le tsunami politique, économique et social qui s’ensuit voit tout le système productif, et par conséquent le secteur de l’industrie de la défense, s’effondrer comme un château de cartes. Destruction des chaînes logistiques, pertes de personnels et donc des compétences, disparition des budgets disponibles : l’ensemble du secteur productif tourné vers la défense, qui occupait une part prépondérante de l’activité (et du budget !), perd quasi toute utilité du jour au lendemain. De plus, une partie de l’outil industriel se retrouve dans des républiques indépendantes qui ne sont généralement guère intéressées par une éventuelle collaboration avec la Russie.

Les industriels russes vont donc se retrouver à la tête d’usines disposant d’une grande capacité de production, mais sans avoir de clients pour leurs produits. L’export va donc se révéler être la seule porte de sortie à court et moyen et terme, les perspectives financières de l’État russe ne permettant pas d’espérer de commandes nationales dans un futur proche. Et au jeu de l’exportation, ce sont les usines/bureaux d’études disposant des produits les plus modernes et les plus performants qui vont tirer leur épingle du jeu. L’Inde et la Chine vont jouer un rôle très important dans la « survie » de certaines branches de l’industrie russe, avec notamment les discussions engagées dès 1994 et portant sur la vente d’une variante du Su-27 Flanker à l’Inde, discussions qui déboucheront sur le développement du Su-30MKI commandé en 1996. Les 272 exemplaires acquis à ce jour, produits en collaboration avec l’industriel indien HAL (8), composent actuellement la flotte de chasseurs lourds de l’IAF. La Chine précéda l’Inde de peu en faisant l’acquisition de Su-27SK puis de Su-30MK(K) à partir de 1992, une licence d’exportation dont les termes ne seront finalement pas respectés ayant été accordée. D’autres secteurs seront également concernés par des exportations d’équipements avec, de manière simplifiée, plusieurs modèles qui se sont finalement bien vendus : Su-27 (et variantes), MiG-29 Fulcrum, T-90 (et variantes), systèmes de défense antiaérienne et sous-marins d’attaque conventionnels Paltus/Varshavyanka (Projet 877/633.1).

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