Si la consommation énergétique mondiale est toujours extrêmement dépendante des hydrocarbures, il importe néanmoins de considérer quelles sont les technologies actuelles ou en développement qui tendent à dessiner le paysage technologique post-hydrocarbures, avec des conséquences spécifiques à la fois en termes géopolitiques et industriels.
L’interdiction de la vente des véhicules thermiques en Europe prévue pour 2035 apparaît comme un changement majeur impulsé par l’échelon politique afin à la fois de lutter contre les changements climatiques, mais aussi de limiter la dépendance aux carburants fossiles sur un continent qui est particulièrement mal pourvu en termes de ressources naturelles. En effet, l’Union européenne ne disposerait que de 0,3 % des réserves mondiales de pétrole et 0,6 % de celles en gaz, ce qui en fait le territoire mondial le plus dépendant des autres pour ses approvisionnements énergétiques. Cette situation, connue depuis de nombreuses années, a néanmoins connu une résonance particulière avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 et la mise en place de plusieurs trains de sanctions, en particulier sur l’énergie. Toutefois, cette volonté politique et géopolitique doit être accompagnée par une évolution techno-industrielle à même de proposer des solutions pour engager une évolution durable du paysage énergétique européen et mondial, vers un système énergétique post-hydrocarbures.
En préambule, il convient de nuancer ce propos en regardant la réalité statistique de la consommation énergétique. En 2021, les hydrocarbures représentaient 82 % de la consommation énergétique mondiale, chiffre qui tombe à 71 % pour l’Union européenne. Le panorama énergétique demeure ainsi très fortement marqué par les hydrocarbures et, si la part du charbon diminue tendanciellement, celle du gaz augmente et le pétrole continue d’être la ressource naturelle qui sert de base à l’économie mondiale comme source énergétique, mais aussi de plus en plus comme base d’une industrie de la chimie et des plastiques qui est toujours plus importante.
L’électrification : une solution absolue ?
Le premier des grands enjeux identifiés pour la période post-hydrocarbures est le remplacement d’une part toujours plus importante d’utilisation énergétique thermique hydrocarbure par la consommation d’électricité. En remplaçant directement les fossiles par l’électricité pour des usages comme les transports, l’industrie ou le chauffage des bâtiments, de nombreuses économies peuvent ainsi être réalisées, avec un impact certain sur les émissions de gaz à effet de serre, pour autant que l’électricité utilisée n’ait pas pour base ces mêmes fossiles, alors qu’en 2021 plus du tiers de l’électricité produite au sein de l’Union européenne (36 %) l’était grâce aux hydrocarbures, avec des situations très contrastées au niveau national.
Cela pose néanmoins la question de la décarbonation de la production électrique telle qu’elle existe aujourd’hui et telle qu’elle sera en 2050, borne temporelle finale du Green Deal de l’Union européenne. À ce titre, il importe donc de considérer que la transition énergétique est, comme son nom l’indique, un mouvement qui est engagé et dont les objectifs sont particulièrement ambitieux eu égard au point de départ mais aussi au rythme d’évolution. Les objectifs 20-20-20 de l’Union européenne (1) — seuls qui puissent pour le moment être analysés puisque visant 2020 comme borne temporelle — n’ont ainsi pas totalement été atteints, en particulier sur l’efficacité énergétique, ce qui ne peut qu’inquiéter en regard de l’augmentation très forte de l’ambition pour les horizons 2030 et 2050. Dans le domaine des énergies renouvelables, le résultat a été obtenu mais de justesse au niveau communautaire, avec un certain nombre de pays qui demeurent sous les 20 %.