Une campagne aérienne visant à la désorganisation de l’ensemble de l’appareil de défense iranien semble hors de portée d’Israël, à moins d’être directement épaulé par les États-Unis, c’est-à-dire d’avoir leur blanc-seing pour agir. Seuls ceux-ci disposent des moyens leur permettant d’acquérir une supériorité aérienne globale au-dessus de l’Iran. Cette supériorité aérienne paraît d’autant plus forte que les États-Unis pourraient engager d’importants renforts aériens et que le territoire iranien n’est qu’imparfaitement couvert par les réseaux de radars et de défense antiaérienne. L’aviation iranienne serait donc probablement rapidement détruite au sol et en vol. Il est toutefois envisageable que l’Iran puisse recevoir avant une telle confrontation des chasseurs et des missiles russes (Su-35 et S-400) dans le cadre du marchandage autour du dossier ukrainien, notamment en contrepartie des drones iraniens cédés à Moscou. Ces livraisons pourraient rendre plus difficiles des frappes ciblées israéliennes, mais elles ne changeraient pas la donne face à la puissance aérienne américaine. La neutralisation complète de l’arsenal balistique iranien serait autrement plus compliquée à obtenir. Ces missiles balistiques sont éparpillés sur le territoire dans des sites enterrés et durcis. Nombre d’entre eux sont mobiles et peuvent être déplacés. La recherche de leur destruction entraînerait une campagne aérienne longue et dangereuse qu’Israël ne semble pas en mesure de conduire seul.
À moins d’une provocation outrancière de l’un ou de l’autre, un conflit ouvert majeur entre Israël et l’Iran est donc peu crédible, à moins qu’il ne s’inscrive dans le cadre d’une confrontation plus globale dans laquelle seraient impliqués les États-Unis. Le scénario le plus probable reste celui d’une poursuite de l’affrontement discret entre Israël et l’Iran dans le domaine invisible, particulièrement si Washington et Téhéran parvenaient à s’entendre a minima sur des questions bilatérales, face à un Benyamin Netanyahou otage de sa coalition d’extrême droite ultranationaliste et religieuse.
Note
(1) En 2021, selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), Israël a importé des armes pour une valeur de 610 millions de dollars, dont 550 millions en provenance des États-Unis. Le matériel acquis se divise entre des avions (463 millions de dollars), des véhicules blindés (90 millions), des missiles (38 millions) et des moteurs (19 millions). Les données sont consultables sur : https://armstrade.sipri.org/armstrade/page/values.php
Légende de la photo en première page : L’armée iranienne fait une démonstration de force dans les rues de Téhéran, le 29 avril 2022, en montrant des missiles prêts à attaquer Israël. © Shutterstock/Mohasseyn