Enjeux et tensions
Si l’affaire dite du « ballon espion » chinois a certes mis en lumière les enjeux stratégiques à venir de la très haute altitude, elle a surtout permis de sonder le niveau de tension inédit entre les États-Unis et la Chine concernant un épisode dont les conséquences humaines étaient a priori sans commune mesure avec un précédent incident intervenu en 2001, celui de la collision entre un avion espion américain EP‑3 et un intercepteur chinois. Malgré le décès du pilote chinois et la détention des 24 membres d’équipage de l’EP‑3, une transaction avait pu être trouvée. Pareille capacité d’apaisement entre les deux puissances est inimaginable aujourd’hui : c’est ce que semble avoir confirmé l’affaire du « ballon espion ». À défaut de modération diplomatique, des pistes d’évolution juridique pour le statut de la très haute altitude pourraient être théoriquement envisagées. Toutefois, le processus de délitement qui semble toucher l’ensemble des régimes de sécurité issus de l’après-guerre froide hypothèque très sérieusement les chances d’aboutissement d’une telle perspective.
Notes
(1) Matthew Strong, « Taiwan dismisses story about Chinese spy balloon over Presidential office », Taiwan News, 10 février 2023.
(2) « Défense en très haute altitude : la bataille de demain », Air & Cosmos, 15 janvier 2023,
(3) À ce propos, cf. Stephan Hobe, « La délimitation entre l’espace aérien et l’espace extra-atmosphérique », in Clémentine Bories et Lucien Rapp (dir.), Actes du 54e colloque de la Société française pour le droit international : l’espace extra-atmosphérique et le droit international, Éditions Pedone, Toulouse, p. 99-106.
(4) Andrew G. Haley, « Space Age Presents Immediate Legal Problems », in Andrew G. Haley et Welf Heinrich (dir.), First Colloquium on the proceedings on the Law of Outer Space, Springer Vienna, Vienne, 1958, p. 5-27.
(5) John C. Cooper, Explorations in Aerospace Law : Selected Essays, 1946-1966, McGill University Press, Montréal, 1968, p. 229-304.
(6) Théodore Von Kármán avait en effet fait valoir qu’à partir de 100 km d’altitude, l’atmosphère devenait trop ténue pour des applications aéronautiques et qu’en conséquence, il pouvait être considéré qu’il s’agissait de la limite inférieure de l’espace extra-atmosphérique.
Légende de la photo en première page : Le ballon chinois de Myrtle Beach, après une première passe de F-22. (© Ed Weiner/Shutterstock)