L’Iran et la Chine ont aussi mené à bien un certain nombre de projets de coopération agricole, notamment sur les variétés améliorées, les technologies de production, l’industrialisation… En 2006, avant le lancement des nouvelles routes de la soie, les deux pays ont conclu un accord pour un investissement de 13 millions d’euros dans la construction de la « China Agricultural Machinery City » dans la ville de Saari, principalement pour la vente de machines chinoises. À l’époque, les iraniennes étaient importées du Japon, d’Europe et des États-Unis ; le matériel chinois était rare sur le marché.
En mai 2014, la Chine et l’Iran ont officiellement signé un mémorandum qui renforce la coopération dans les domaines des légumes, des fruits, de la mécanisation agricole et des nouvelles technologies de plantation. En 2015, les deux ministères de l’Agriculture ont signé un accord visant à étendre la coopération dans les secteurs de la culture sous serre, de l’élevage, de l’aviculture et de la pêche. Cette dernière a pris une part croissante dans les relations sino-iraniennes. En 2016, une réunion de jumelage des entreprises de pêche entre les deux pays a ouvert la voie à 3 milliards de dollars d’investissements.
La coopération avec l’Arabie saoudite est moins développée, mais a connu certains succès. En 2008, la Cité des sciences et technologies du roi Abdallah a investi 20 millions de dollars pour coopérer avec l’Institut génomique de l’Académie chinoise des sciences à Pékin afin de mener à bien le projet de recherche sur le génome du palmier dattier. Cinq ans plus tard, des scientifiques chinois et saoudiens ont annoncé avoir réussi à en dresser la carte pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, qui a joué un rôle important dans la production de palmiers dattiers, l’amélioration variétale et la lutte antiparasitaire. Les échanges entre la Chine et l’Arabie restent cependant centrés sur l’utilisation de l’eau. En décembre 2022, à l’issue des pourparlers entre les dirigeants des deux pays à Riyad lors de la visite d’État du président Xi Jinping (depuis 2013) dans le royaume, un partenariat direct entre les secteurs privés chinois et saoudien a été mis en place.
Si la Chine souhaite partager son expérience agricole, elle recherche également des partenariats dans le but d’améliorer la résilience de son agriculture, notamment dans l’utilisation de l’eau. Elle sait ainsi tirer profit des avancées qui ont lieu partout à travers le monde. Entre 2005 et 2017, les investissements chinois en Israël ont totalisé 13,2 milliards de dollars, dont un tiers, soit 4,4 milliards, ciblaient le secteur agricole (2). Ce montant est équivalent à celui investi dans le divertissement et devant ceux des transports ou de l’énergie. Dès 1993, les deux parties ont créé un centre de formation à l’université agricole de Pékin, établi une ferme de démonstration dans la banlieue de Pékin et une base de démonstration agricole de grandes cultures, de plantation de fleurs, d’élevage laitier, d’économie d’eau dans les provinces du Shandong, du Shaanxi, du Yunnan et dans la Région autonome ouïghoure du Xinjiang. De nombreuses régions et villes chinoises ont envoyé des représentants pour participer à des recherches agricoles et ont ainsi établi une relation de coopération spécifique avec Israël. L’accent est mis sur l’introduction de la technologie israélienne d’irrigation agricole économe en eau, des technologies chinoises de culture et d’élevage, comme la mise en œuvre d’une ferme de démonstration de coopération dans le Fujian ou du projet de centre d’agriculture aride sino-israélien dans la Région autonome ouïghoure du Xinjiang.
Le nombre de projets de coopération entre la Chine et Israël dans le domaine des sciences et technologies agricoles se révèle ainsi élevé, et implique un large éventail de provinces, de régions autonomes et de municipalités, ce qui est rare pour la coopération agricole chinoise et montre l’importance que la Chine donne à ces échanges. En 2014, les deux gouvernements ont signé à Jérusalem un mémorandum de coopération agricole dans le cadre des nouvelles routes de la soie. Toutefois, la Chine a peu investi dans l’agroalimentaire en Israël. Le seul achat notable a été celui de Tnuva, la première société laitière israélienne, par la chinoise Bright Food. Cet investissement a été réalisé moins dans le but de prendre pied sur le marché israélien que pour acquérir de la technologie et de nouveaux produits.
D’un point de vue agricole, le Moyen-Orient n’est pas pour la Chine une région d’approvisionnement en biens pour lesquels elle est déficitaire à cause d’une forte demande intérieure, comme les produits laitiers, les viandes bovine et ovine… ni une zone où développer ses exportations. La diplomatie agricole chinoise le considère donc plus comme un objet politique. Les transferts de technologie peuvent servir sa stratégie d’influence en améliorant son image et en resserrant les liens avec des pays où elle est encore peu présente et où elle a des intérêts commerciaux, notamment énergétiques, forts.
Notes
(1) Sajid Fiaz, Mehmood Ali Noor et Fahad Owis Aldosri, « Achieving food security in the Kingdom of Saudi Arabia through innovation : Potential role of agricultural extension », in Journal of the Saudi Society of Agricultural Sciences, vol. 17, no 4, octobre 2018, p. 365-375.
(2) Noureddin Zaamout et Gordon Houlden, A New Great Power Engages with the Middle East : China’s Middle East Balancing Approach, China Institute/University of Alberta, 2019.
Légende de la photo en première page : Israël et ses riches exploitations de fraises (en 2020). © Shutterstock/StockStudio Aerials