En conclusion, la Russie tire en ce moment avantage du sentiment antiaméricain au Moyen-Orient, en Asie, en Amérique latine et en Afrique pour promouvoir un ordre mondial alternatif. Estimant représenter un médiateur plus impartial que Washington, la Russie, par sa proactivité diplomatique actuelle, vise moins à soutenir le Hamas ou à condamner le gouvernement israélien qu’à démontrer au reste du monde que la Fédération russe peut jouer un rôle constructif dans le règlement de ce conflit. Les autorités russes se réjouissent ainsi de la possibilité de présider aux reprises des négociations sur la question palestinienne, bien qu’en privé, elles expriment néanmoins davantage de pessimisme quant à cette perspective. Elles sont conscientes que leur pays ne dispose pas seul des ressources nécessaires pour contraindre durablement les parties impliquées à respecter les conditions imposées par l’entité onusienne.
Cependant, les événements régionaux en cours offrent à la Russie l’occasion de réaffirmer son soutien à une résolution durable du conflit israélo-palestinien, avec l’établissement inévitable à terme d’un État palestinien. Elle appelle en outre la communauté internationale, et en particulier le monde non occidental, à envisager les contours d’un changement systémique majeur de l’ordre international visant à inclure un plus grand nombre d’acteurs internationaux dans la résolution des conflits passés, présents et futurs.
Notes
(1) En février 2019, un sommet pour la réconciliation nationale palestinienne s’est tenu à Moscou. Comprenant de nombreux mouvements politiques palestiniens (dont le Fatah et le Hamas), celui-ci a finalement échoué.
(2) Les accords d’Abraham prévoyaient au départ la normalisation des relations entre Israël et deux pays arabes : les Émirats arabes unis et Bahreïn. Ils seront prolongés quelques mois plus tard avec le Maroc et le Soudan.
(3) Bahreïn a d’ailleurs annoncé le 2 novembre dernier la rupture de ses relations avec Israël et le rappel de son ambassadeur.
(4) Le 6 avril 2017, la Russie est devenue le premier pays à reconnaître officiellement Jérusalem-Ouest comme capitale de l’État d’Israël et Jérusalem-Est comme capitale du futur État palestinien.
(5) Voir Erik Burgos, « Entre opportunités et risques : la Russie au cœur de la nouvelle gouvernance du Moyen-Orient ? », Les Grands Dossiers de Diplomatie, n°67, avril-mai 2022, p. 61-62.
(6) Après une décennie d’exclusion, le président syrien a réintégré en mai dernier la Ligue arabe.
Légende de la photo en première page : Début décembre 2023, le président russe était reçu avec faste en Arabie saoudite (ici en photo) et aux Émirats arabes unis, à l’occasion d’un déplacement au Moyen-Orient qui, au delà de narguer l’Occident qui le voulait seul et isolé sur la scène internationale, montre que la Russie demeure un acteur non négligeable au Moyen-Orient, dans une région en plein conflit entre le Hamas et Israël. (© Kremlin.ru)