Dans ce contexte, des solutions sont recherchées, d’une part en termes de souplesse grâce à l’effort du développement de drones fabriqués à bas cout permettant à des entreprises de plus petite taille, les PME, par rapport aux grands groupes, maitres d’œuvre de programmes complexes ou systèmes majeurs (Airbus, Dassault Aviation, DCNS, MBDA, Nexter, Safran et Thales) de proposer et d’intégrer des équipements innovants plus rapidement. Le passage à l’économie de guerre a été salué par Sébastien Lecornu qui a annoncé la commande de 2000 munitions téléopérées à plusieurs industriels à destination des armées françaises et de l’Ukraine (19). L’entreprise française Delair, tout en s’associant à Nexter, fait figure d’exemple en s’inscrivant dans cette dynamique soutenue par la Direction générale de l’armement (DGA) et l’Agence Innovation Défense (AID) (20). L’ambition française est d’être dotée d’une filière de munitions télé-opérées (MTO) et de maitriser la capacité de vol en essaims. D’autre part, ce changement de modèle permet un continuum pour le développement de programmes plus longs et forcément plus couteux ; la durée des cycles de programmes de développement des équipements militaires devenant ainsi moins prégnante. Prévoir des drones à la fois hautement sophistiqués et couteux ou favoriser le développement de plateformes rustiques à bas cout ne semble plus être un problème.
Il est important de rappeler que les technologies inhabitées ne concernent pas seulement la troisième dimension. D’ailleurs, la LPM prévoit l’intégration des premières unités robotisées dans l’armée de terre à l’horizon 2030, dont l’objectif est la coopération soldat-robots terrestres. De même que fin décembre dernier la DGA a conclu un accord-cadre avec Naval Group pour développer un sous-marin de combat sans équipage (Extra Large Unmanned Underwater Vehicle, XL-UUV). Ainsi, la France rentrerait à son tour dans le club des nations (États-Unis, Russie, Chine) maitrisant les grands drones sous-marins. Le développement de capacités dronisées adaptées aux différents contextes opérationnels est un important défi et les start-ups, les PME et grands groupes français ont tous les attributs pour mener à bien les intérêts souverains de notre pays.
En conclusion, les drones, outils polyvalents et de diplomatie technologique permettent de répondre à de nombreuses missions. Même si leur capacité est étendue, les conflictualités prennent des formes inattendues et touchent la planète dans son entièreté au point qu’un développement adapté aux différents contextes opérationnels est un enjeu de taille et assurément complexe.
Notes
(1) Patrick Brunet, « Les drones cherchent une plus grande polyvalence », Air & Cosmos-Aviation International, 18 juin 1999, p. 26.
(2) Ces six pays sont membres de l’OTAN.
(3) Il serait capable d’atteindre le territoire israélien depuis l’Iran et de transporter plus d’une dizaine de bombes.
(4) Cédric Perrin et al., « Se préparer à la « guerre des drones » : un enjeu stratégique », rapport d’information n°711, fait au nom de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées (https://digital.areion24.news/8t3), 23 juin 2021.
(5) Assemblée générale des Nations Unies, « Utilisation de drones armés pour des assassinats ciblés », Rapport de la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires (https://digital.areion24.news/tn0), 15 aout 2020.
(6) Océane Zubeldia, « Progrès technologiques et hybridité : l’exemple des drones aériens, de nouveaux game changer ? », Revue Défense Nationale, vol. 832, n° 7, 2020, p. 110-114 (https://doi.org/10.3917/rdna.832.0110).
(7) Ils peuvent être distingués suivant trois classes : I (inférieur à 150 kg), II (150-600 kg), III (supérieur à 600 kg).
(8) C’est-à-dire simples d’emploi et résistants, contrairement à un système plus sophistiqué, plus enclin à la « fragilité ».
(9) Elle vise à apporter une assistance financière à l’aide militaire fournie par les États membres à l’Ukraine.
(10) Laurent Lagneau, « La France et la Grèce auraient bloqué l’achat de drones turcs pour l’Ukraine via un financement européen » (https://digital.areion24.news/va8), 21 février 2024.
(11) Marc Guyot et al., « Chine, Russie, Iran, Corée du Nord : le nouveau pacte des autocrates ? » (https://digital.areion24.news/onw), 2 mai 2024.
(12) Ibid.
(13) À partir d’une charge utile de 500 kg et d’une portée de 300 km.
(14) Ce drone a une portée de 2500 kilomètres.
(15) De son côté la Corée du Nord fournit déjà des munitions et des missiles.
(16) Pierre Haski, « Iran-Russie-Chine : « axe du mal » ou alliance de circonstance ? » (https://digital.areion24.news/97o), 18 avril 2024.
(17) Stéphane Dolory, « Le développement des technologies balistiques hors du MTCR : conséquences pour le régime » (https://digital.areion24.news/s8m), 6 octobre 2017.
(18) Raphaël Briant, « La masse dans les armées françaises. Un défi pour la haute intensité », Focus stratégique, n° 105 (https://digital.areion24.news/vwo), juin 2021.
(19) Ministère des Armées, « Sébastien Lecornu annonce une commande de 2 000 drones kamikazes » (https://digital.areion24.news/qam), 1er mars 2024.
(20) De nombreuses entreprises au départ uniquement à vocation civile, comme par exemple l’entreprise française Parrot, ont rejoint également le développement d’équipements militaires et soulignent ainsi le caractère dual des drones.
Légende de la photo en première page : Le Bayraktar TB2, star de l’industrie de défense turque. Ce drone de combat de moyenne altitude et de longue endurance (MALE) capable d’effectuer des opérations de vol télécommandées ou autonomes, peut atteindre une vitesse de 222 km/h, dans un rayon d’action de 150 km et pour une endurance de 27 h. Mis en service en 2014, son cout unitaire est de cinq millions de dollars américains. Ces drones ont notamment été déployés par l’Azerbaïdjan lors de la deuxième guerre du Haut-Karabagh, par l’Ukraine depuis l’invasion russe, ainsi que par la Force de défense nationale éthiopienne lors de la guerre du Tigré. (© BaykarTech/X)