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L’émergence des minidrones de combat

À Taïwan, Drone Vision a mis au point l’AR‑1, un drone hexarotor doté d’un affût stabilisé permettant d’y monter un fusil d’assaut ou une carabine en 5,56 mm, ou encore un pistolet mitrailleur en 9 mm. Mesurant 123,1 cm de large sur 149,9 cm de long en ordre de vol, son poids à vide de 11 kg (porté à 15 kg avec les batteries) lui permet d’emporter une charge utile de 8,5 kg avec une endurance de 20 minutes. Sa vitesse de croisière est de 46,8 km/h et il peut tenir face à des vents de force 6. Une fois replié, il mesure 44 cm de large sur 85,1 cm de long, ce qui le rend plus facilement transportable à pied sur de grandes distances. Une fois en vol, son rayon d’action oscille entre 10 et 15 km. Ces caractéristiques donnent une certaine idée de la capacité d’emport en munitions selon l’arme qui sera montée sous l’appareil. Un fusil d’assaut en 7,62 × 51 mm peut placer des tirs précis à longue distance s’il est utilisé correctement, a fortiori depuis les airs avec un angle avantageux.

C’est également Drone Vision qui a développé le Revolver 860, un octorotor largueur de munitions dont la particularité est d’être équipé d’un barillet contenant huit obus de 60 mm. Les précédents drones armés larguent généralement leur charge militaire en une fois avant de retourner à leur point de décollage pour recharger. Mais l’industrialisation de ces minidrones fait évoluer le volume de feu et le prochain pas en avant sera d’accroître le nombre de coups qu’ils peuvent porter en une seule sortie.

Enfin, le Smash Dragon développé par Smart Shooter, en Israël, est un drone hexarotor équipé d’armes d’infanterie et d’une conduite de tir informatisée, le Smash 2000. Celle-ci utilise des algorithmes de ciblage pour suivre et frapper des cibles avec précision. Si le drone de Smart Shooter n’est pas encore opérationnel, son logiciel de ciblage a déjà été utilisé avec succès en 2019 contre des drones du Hamas et des ballons incendiaires lancés depuis la bande de Gaza. Contre les minidrones évoluant à grande vitesse, l’algorithme offre une précision suffisante pour garantir un coup au but en mouvement dès le premier tir jusqu’à une distance de 120 m.

L’innovation ukrainienne

Du côté de l’armée et de la base industrielle de défense ukrainiennes, on voit apparaître depuis peu des images de drones armés d’ALI, notamment d’une mitrailleuse PKM en août dernier. La visée se fait de manière assez rudimentaire à l’aide d’une croix placée dans le cadre de la caméra, zérotée sur l’arme embarquée. En septembre, ce sont les Dragon Drones équipés de lanceurs de thermite qui sont apparus dans les médias.

La thermite est un composé incendiaire extrêmement puissant sous forme de granules d’oxyde de fer et de poudre d’aluminium. La chaleur générée par réaction chimique peut atteindre 2 200 °C et l’incendie reste inextinguible tant que la totalité de la thermite n’a pas fini de brûler, ce qui rend très efficaces les munitions incendiaires qui en contiennent : la thermite peut ainsi trouer le blindage et mettre le feu à des chars, et brûle y compris sous l’eau. Un drone FPV peut ainsi emporter 500 g de thermite et mettre le feu à une tranchée sur une longueur impressionnante. Associé à la vitesse très élevée que peuvent atteindre ces drones, la thermite produit ainsi un effet psychologique redoutable sur les troupes au sol, en plus de l’effet d’interdiction provoqué par l’incendie dans une tranchée.

Un drone MALE d’appui au sol

Dans un autre registre, la société américaine General Atomics a mené en avril 2024 un test à munitions réelles à l’US Army Yuma Proving Ground, en Arizona, lors duquel un drone Mojave a engagé de multiples cibles terrestres à l’aide de deux pods DAP‑6 armés de mitrailleuses Dillon Aero M‑134 Minigun. La M‑134 est une mitrailleuse rotative de type Gatling dont les six canons lui permettent d’atteindre une cadence de tir de 6 000 coups/min. Elle est fréquemment utilisée par les forces spéciales à partir de véhicules, d’embarcations ou d’hélicoptères, son volume de feu étant dissuasif pour faire baisser les têtes ou neutraliser des véhicules.

Les pods DAP‑6 permettent l’emport de 3 000 coups de 7,62 mm OTAN et le Mojave, un drone MALE dérivé du MQ‑1C Gray Eagle optimisé pour les décollages courts à partir de terrains sommaires, peut devenir une plateforme à longue endurance apportant de solides capacités de strafing telles qu’on les trouve sur l’hélicoptère d’attaque AH‑6 Little Bird utilisé par les forces spéciales américaines. Ce type d’appui peut avoir une utilité dans de nombreux schémas opérationnels où un tir de Hellfire ou de Small diameter bomb s’avérerait surdimensionné, tout en offrant, si l’on considère l’endurance élevée d’un Mojave ou d’un Reaper, un ratio coût/efficacité bien mieux adapté. 

Légende de la photo en première page : Le Smash Dragon en vol. Un drone armé d’armes légères permet la répétition des coups. (© Smart Shooter)

Article paru dans la revue DSI n°174, « Israël contre l’Iran (et ses proxys) : la confrontation », Novembre-Décembre 2024.
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