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Armes légères d’infanterie : quel futur pour l’OTAN ?

Le 6,8 mm, nouveau calibre OTAN ?

Les Américains, avec le pragmatisme qu’on leur connaît, sont partis de la menace pour ensuite définir la munition, et enfin créer la plateforme : le XM‑7 concernant le fusil, et la XM‑250 pour la mitrailleuse légère. Le changement de calibre de l’arme de service commune à tous les militaires d’une armée est probablement l’un des plus compliqués à entreprendre, non seulement parce qu’il implique le plus grand nombre d’armes et des stocks de munitions importants ayant une très longue durée de vie.

Comparativement, la dernière fois que les Américains ont changé de calibre pour leurs ALI remonte à la guerre du Vietnam avec l’introduction du M‑16 en 5,56 mm, en remplacement du M‑14 en 7,62 mm OTAN. Mais ce dernier calibre était utilisé par d’autres systèmes d’armes tels que les mitrailleuses légères M‑60 et rotatives M‑134 Minigun, les fusils de sniping Remington M‑40 et M‑700 et le futur M‑21, permettant une transition en douceur, car les stocks de munitions en 7,62 mm ne devenaient pas obsolètes.

Dans le cas du 6,8 mm, c’est un peu différent, car les stocks de 5,56 mm devront être écoulés avant de retirer du service les armes concernées, sauf à être
revendus ou simplement donnés, comme c’est le cas avec l’aide à l’Ukraine. Ce qui a peut-être contribué à faciliter la décision du Pentagone alors que le remplacement de la carabine M‑4 a fait l’objet de différents programmes depuis 1986 et que les premiers tests opérationnels du calibre 6,8 mm remontent à 2004.

Quant à savoir si le nouveau calibre 6,8 × 51 mm peut ou va devenir le futur calibre de l’OTAN, il suffit d’observer les motivations américaines pour deviner la réponse : les recherches concernant un calibre plus puissant datent de l’Irak et de l’Afghanistan, deux conflits ayant eu lieu sur les deux terrains où le 5,56 mm montrait le plus ses limites : en combat urbain où les forces américaines ont fait face à des protections balistiques de plus en plus résistantes, et en montagne où les distances d’engagement sont les plus longues, appelant à une balistique mieux adaptée que celle du 5,56 mm. En Ukraine, les performances du 5,56 mm face aux protections balistiques portées par les soldats russes ont achevé d’entériner l’obsolescence de ce calibre sur les théâtres d’opérations du futur. Les opérations de contre-insurrection et les interventions en Afrique ou au Moyen-­Orient ont cédé la place à la compétition entre grandes puissances, qui redéfinit ce que seront les cibles de demain.

Et les armées de l’OTAN, pour ne pas dire les armées occidentales dans leur ensemble, partageront les mêmes raisons de suivre le mouvement engagé par les Américains, faute de quoi elles se retrouveront dépassées et surclassées par leurs adversaires communs. Le changement de calibre est donc inéluctable à plus ou moins long terme, et la menace russe pourrait accélérer encore les choses.

Les défis qui attendent les États membres résident dans leur compréhension des capacités de la munition XM‑1186 choisie par le Pentagone, étroitement liées à son étui hybride en alliage de laiton et d’acier et dont le brevet est détenu par Sig Sauer. Cet étui particulier permet de contenir plus de poudre et offre 25 % de puissance supplémentaire, ce qui en fait ici un réel game changer et devient le point principal devant retenir notre attention et celle des décisionnaires.

Pour rappel, le 6,8 mm SPC testé en Afghanistan en 2005 avait été abandonné parce que sa balistique n’offrait pas la puissance désirée à longue portée, contrairement au 6,8 × 51 mm qui a donné toute satisfaction. Les besoins de l’US Army étaient non seulement de perforer les gilets pare-­balles contemporains ou proches du NIJ level 4, mais aussi d’offrir une précision suffisante pour engager efficacement des cibles au-delà de 600 m.

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