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« La guerre est encore loin d’avoir épuisé ses possibilités d’évolution » – Entretien avec Christopher Coker

Christopher Coker est professeur de relations internationales à la London School of Economics. Il a notamment publié Future War, Polity, Londres, 2015, 244 p. Cet entretien a été publié dans DSI n°121, janvier-février 2016.

Votre position parmi les auteurs travaillant dans le champ des war studies est particulière – vous situant quelque part entre la philosophie, l’éthique, les études sur la science et la technologie et les relations internationales. Vous nous proposez une vision plutôt pessimiste de l’avenir. Sommes-nous piégés quelque part entre les avancées incessantes de la technologie, une incapacité à conduire une guerre humaine et la chute de l’Occident ? 

Mon approche de la guerre est en effet interdisciplinaire et cela pour une raison. Je me considère, faute d’un meilleur terme, comme un phénoménologue. La phénoménologie est pour moi un type d’enquête et sa mission première consiste à intégrer la haute théorie à l’expérience quotidienne. Toute investigation phénoménologique digne de ce nom tente de révéler les structures invariables du phénomène en question ; ce type d’investigation devrait chercher à mettre en lumière ce que William Hewell appelait « une consilience des inductions » (langage académique pour la convergence des preuves). Ainsi, la théorie de l’évolution est aussi établie grâce au soutien d’un nombre toujours croissant de sous-domaines : la géologie, la paléontologie, la biologie, l’herpétologie, l’entomologie, la biogéographie, la physiologie et l’anatomie comparative. Chaque scientifique travaille dans son propre domaine, mais s’il est à la hauteur de la tâche il tente de s’ouvrir aux recherches dans d’autres domaines. Le progrès dans un champ est habituellement accompagné par des progrès dans un autre – en clair, par une « consilience des inductions ». 

Clausewitz était également phénoménologue. Postuler, comme il le fait, qu’il existe une nature de la guerre nécessite des preuves de multiples sources : anthropologie, philosophie, physique, sociologie, économie, histoire, ainsi que littérature. Beaucoup manque dans son discours puisqu’il n’avait pas accès à certains outils de compréhension dont nous disposons. Il n’avait pas accès aux sciences comportementales ou à la psychologie évolutionniste et moins encore à la neuroscience. Il existe à présent une nouvelle « science » appelée neuro-marketing qui utilise la scanographie du cerveau pour révéler les mécanismes mentaux déterminant nos achats. Des recherches portent même de nos jours sur les voies neuronales des traders financiers qui nous ont conduits à la crise de 2008. C’est un début bien qu’il soit improbable que les traders portent un grand intérêt à ces études. Si nous pouvons mesurer la vision extatique des religieux à travers des scanographies du cerveau, ne pourrions-nous pas faire de même avec les djihadistes au Grand Moyen-Orient ?

C’est l’arrière-plan de mon approche de la guerre. Pour ce qui est de votre question – il est clair que la technologie poursuit sa trajectoire d’évolution (ce qui, soit dit en passant, ne doit pas être considéré comme téléologique !) et ce qui se produit pourrait très bien être une continuation de la guerre humaine sur laquelle j’ai largement écrit en 2001. Chacun de nous est physiquement attaché aux outils que nous utilisons par des procédés neurologiques que nous commençons tout juste à découvrir. Un exemple réside dans la manière dont les opérateurs de drones font déjà face à la surcharge cognitive, expression décrivant une situation dans laquelle la quantité d’information devant être traitée dépasse tout simplement la capacité de l’esprit à stocker ou à traiter l’information reçue. Dans une telle situation, soit nous oublions instantanément l’information disponible (ce qui rend impossible le fait de l’enregistrer ou de la récupérer par la suite), soit nous sommes incapables de savoir si elle infirme ou confirme l’information que nous avons déjà stockée. Et puisque nous avons besoin que notre mémoire se concentre, nous devons toujours nous rappeler ce sur quoi nous sommes censés nous concentrer. Notre attention a sans cesse tendance à se disperser. Nombre d’opérateurs de drones en effet souffrent déjà de problèmes d’attention et ont de faibles performances du fait des longues heures qu’ils consacrent à leur activité, parfois 8 heures d’affilée par jour. Le déficit d’attention n’est pas encore un « trouble » mais il s’agit certainement d’une difficulté. Les neuroscientifiques s’y consacrent depuis un certain temps. Le résultat a consisté à rendre les opérateurs plus « conscients » des dommages collatéraux en les amenant à se concentrer sur diverses choses, recâblant en réalité la fonction de leur système d’attention. Le fait de surveiller les rythmes de leurs cerveaux, le rythme cardiaque et les mouvements oculaires permet aux superviseurs de « scanner » leur attention et de s’assurer qu’ils se concentrent sur la mission. Un opérateur peut être « déconnecté » s’il vient à être stressé, le contrôle étant transféré à d’autres. Est-ce que cela fait de l’opérateur un automate ? Ou est-ce seulement l’une des manières par laquelle les machines, comme nous le disent ceux qui écrivent sur l’éthique de celles-ci, peuvent nous aider à agir plus éthiquement ?

Dans la mesure où c’est l’Occident (et largement les États-Unis) qui alimente ce phénomène, on peut le considérer comme une continuation de la guerre à l’occidentale ou comme un pas de trop et qui pourrait s’achever dans une finale stratégique. Mais il est probable que d’autres fassent de même, en particulier la Chine. Seul le discours – guerre humaine – pourrait rester typiquement occidental. La trajectoire semblerait constituer la prochaine voie d’évolution. Je suggérerais que – d’un point de vue phénoménologique – la guerre est loin d’avoir épuisé ses possibilités d’évolution. 

La thématique du soldat/guerrier imprègne nombre de vos ouvrages : il s’agit, de facto, d’un des acteurs principaux dans une guerre. Mais comment envisagez-vous la fonction et le rôle de l’officier dans la guerre ? 

Laissez-moi débuter avec une controverse dans l’armée américaine sur l’attribution de la Distinguished Warfare Medal. Nombreux sont ceux qui la considèrent comme plus importante qu’une Bronze Star ou que la Purple Heart. Le débat portait sur le fait de savoir si elle devait être attribuée à des opérateurs de drones et il fut finalement décidé que non (suite à l’intervention de vétérans américains en colère). Mais pourquoi devraient-on considérer les opérateurs de drones comme des « combattants » moins importants que, par exemple, les opérateurs de la Delta Force ou les Rangers ? Hegel affirmait que les « armes ne sont rien d’autre que l’être essentiel des combattants eux-mêmes ». Qu’est Achille sans son épée ? Qu’est un pilote de Spitfire sans un avion ? Bien sûr, l’épée nécessite d’aller près de l’ennemi et les pilotes de Spitfire ont été engagés dans des combats aériens lors de la bataille d’Angleterre. Mais, comme le relève Clausewitz, le caractère de la guerre change constamment. Et l’idée de combattant change également, en fonction des cultures, ainsi qu’au cours du temps au sein des mêmes cultures. Elle implique un dialogue entre le présent et le passé. Ce que je dis c’est que les combattants sont des points sur une bande passante mais la définition d’un combattant dépend de la fréquence sur laquelle nous sommes fixés.

Bien sûr, cela se réduit finalement à une question de courage. Les opérateurs des forces spéciales sont sur le terrain ; les opérateurs de drones sont sur base. Mais qu’ont à dire ces derniers ? L’un explique qu’il faut du courage pour piloter un drone et regarder la mort en direct et en couleur. Un autre raconte dans ses mémoires qu’il faut du cran pour vivre dans un monde virtuel sur une base et dans un monde réel une fois rentré chez soi, alors que souvent seul un trajet de 30 minutes sépare les deux. Il faut du courage, écrit un autre opérateur de drone, pour vivre en même temps dans deux univers parallèles. Et, comme nous le savons, les opérateurs de drone souffrent de stress post-traumatique. Un nouveau terme a été créé pour eux : le stress traumatique induit par la perpétration (Perpetration Induced Traumatic Stress, PITS). Ici Hegel serait confirmé dans son opinion selon laquelle l’arme est la personne. On considère dans ce cas que l’arme produit un trouble psychologique très spécifique.

L’exploration technologique que vous avez réalisée dans Future War est centré sur les opérations régulières, focalisée sur les armées pouvant se permettre la concentration de capital nécessaire aux hautes technologies. Mais quid de l’emploi de ces technologies par des groupes irréguliers, non-étatiques ? 

Dans mon ouvrage Future War (Polity 2015) je suggérais que la guerre est en train de passer, de manière assez rapide, entre les mains d’individus et de petits groupes qui évoluent sans disposer du bagage idéologique qu’avaient, disons, les mouvements de libération nationale des années 1960. Anonymous, par exemple, est un mouvement engagé et non de désengagement. Une « ruche de cerveaux sur internet et dépourvus de leader » était la phrase utilisée par le magazine Time pour déclarer Anonymous parmi les « personnes les plus influentes de 2012 ». Pourtant, ce n’est ni un individu, ni une organisation mais c’est auto-généré, ce qui est quelque chose de plutôt nouveau. Et comme nous le rappelle John Robb, les États sont assez désireux d’utiliser, eux-aussi, de telles entités. La guerre « open source » permet dorénavant à l’État lui-même de s’engager et de sous-traiter si et lorsqu’il le souhaite. 

La guerre connaît des coupes et cette tendance ne fera probablement que se poursuivre. Un des groupes terroristes actuels, l’État islamique, parle déjà de « terrorisme à prix cassés » et d’« attaques auto-amorcées » qu’il a posté sur les réseaux sociaux pour faire passer son message à des individus et à de petits groupes via des vidéos, des tweets et accompagnant le hashtag #Iraq_is_liberated (les hashtags (#) sont utilisés pour marquer des mots ou des sujets clé dans un tweet). Sa stupéfiante ascension témoigne, comme l’écrit un expert, de la « force des liens faibles ».

Maintenant, si l’échelle de la guerre tend se réduire et que cela se poursuit, cette évolution a mis un certain temps. Rien n’est véritablement « nouveau » ; souvent cela n’a simplement pas été observé. Dans la guerre comme dans la vie, l’utilisation du terme « sans précédent » est généralement sujette à la loi des rendements décroissants. Quelle fut l’arme la plus importante au cours de la guerre froide – la bombe atomique ou l’AK-47 ? Cette dernière a tué plus d’individus que la bombe atomique, le napalm et les mines terrestres réunis. C’était la marque de fabrique des mouvements de libération nationale dans les années 1960, et plus tard, lorsqu’ils ont cessé leurs activités, celle des cartels de la drogue en Amérique latine et des chefs de guerre en Afrique avec leurs armées d’enfants soldats. Il est probable que le drone devienne également celle des terroristes urbains du futur. 

La relation asymétrique entre haute et basse technologie n’est pas nouvelle. Elle est au moins aussi ancienne que l’histoire de David et de Goliath. Si David a remporté cette confrontation en particulier, c’est – nous aimons à nous le dire car nous privilégions les explications matérialistes – parce que Goliath souffrait d’acromégalie, dont l’un des symptômes est une mauvaise vue. Il ne pouvait, la plupart du temps, probablement pas voir son adversaire. Et David disposait de l’arme la plus meurtrière de l’ancien temps : la fronde. S’il avait été débriefé après la confrontation, David aurait presque certainement fourni une explication différente pour ce succès inattendu. Il aurait attribué sa victoire au fait que Dieu était de son côté ; pour les Israélites, la guerre ne tenait pas à plus. Autrement dit, il avait confiance en lui et Goliath non ; comme cela est désormais notre cas. Nous tirons notre confiance en nous, et c’est le cas depuis la moitié du XIXe siècle, de la technologie – « Quoi qu’il arrive, nous avons la mitrailleuse Gatling et eux ne l’ont pas » écrit Hilaire Belloc (ce sont les seules lignes par lesquelles nous nous souvenons encore de lui). N’est-ce pas là une forme d’auto-validation curieusement banale et, au final, est-elle moins délirante que la foi en Dieu ?

Y a-t-il un futur pour la guerre comme « phénomène cinétique » ? 

La guerre restera cinétique. Si dans Ghost Fleet, le nouveau roman « de faction » [mot-valise mêlant fact – fait réel et fiction, NdT] de Peter Singer, la guerre entre les États-Unis et la Chine se déroule en partie dans le cyberspace, elle est également profondément conventionnelle. Un Joint Strike Fighter est abattu par un missile tiré par un drone. La technologie anti-missile de l’avion est sabotée par des composants de remplacement infectés par des codes malveillants qui transforment un système d’évitement des missiles en un système les attirant. Dans le roman, tout est désactivé, des toilettes intelligentes aux réfrigérateurs intelligents des foyers américains. L’internet des objets est presque là, avec des centaines de millions d’ « objets » allant des voitures aux chaudières reliées par une connexion sans-fil à des réseaux qui permettront aux gouvernements (et aux terroristes) de semer le chaos. Nous créons, par la mise en réseau technologique, un degré de vulnérabilité sans précédent.

Il y a également dans ce roman des batailles qui réunissent toutes les nouvelles technologies en cours de développement, comme le nouveau canon électrique de l’US Navy. Les rayons de la mort de la science-fiction ont été reconfigurés sous forme d’armes à laser solide. L’US Navy a effectué ses premiers tirs dans le Golfe persique au début de l’année dernière. Et puis il y a l’espace. La menace la plus grave à laquelle nous pourrions être confrontés d’ici dix ans est la perspective d’une confrontation militaire en orbite terrestre basse, impliquant l’emploi d’armements cinétiques Antisatellite (ASAT) par n’importe lequel du nombre croissant d’États possédant actuellement les ressources technologiques de déployer ce type de capacités. On estime qu’en retirant, en janvier 2007, un de leurs satellites, les Chinois ont généré plus de deux millions de débris, allant jusqu’à 10 cm, ainsi que 2 500 objets de plus grande taille pouvant être systématiquement suivis par des capteurs terrestres. Un tel conflit engendrerait d’énormes dommages commerciaux et environnementaux.

La Chine a déjà développé un missile pouvant pénétrer encore plus loin dans l’espace et n’oubliez pas que les dommages générés n’atteindront pas seulement les satellites chinois ou américains. Aujourd’hui, seule une moitié des 1 200 satellites actifs sont toujours opérés par les États-Unis ou la Russie – globalement, plus de 50 nations ont un ou plusieurs satellites nationaux et fournissant des services exclusifs à ces pays. Le monde se prépare peut-être à ce qui pourrait être le conflit le plus dévastateur de tous, pas nécessairement en termes de perte de vies humaines, mais en ce que le monde pourrait régresser vers une économie des années 1950 (si nous avons de la chance) et même antérieure (si la chance n’est pas avec nous).

Dans Future war, vous utilisez la science-fiction comme outil en tentant de comprendre dans quelle direction nous nous dirigeons. Qui est votre auteur favori ? Quel livre saisit le mieux ce que vous percevez être notre avenir ? 

Dans mon livre Future War, j’ai insisté sur le roman de Joe Haldeman, The Forever War. Il s’agit en effet – que ce soit là une intention ou le fruit du hasard – de l’extrapolation la plus imaginative des tendances de son époque (les années 1970) dans notre présent. Une grande partie de ses prévisions à un horizon de cinquante ans sont aujourd’hui réalité.

Mais si vous me demandez qui est pour moi l’auteur de science-fiction le plus impressionnant, je vous dirai H. G. Wells. Dans sa première œuvre majeure de non-fiction, datant de 1901, il anticipait déjà le fait que la prochaine guerre européenne impliquerait une conscription universelle massive, et qu’elle finirait en guerre de tranchée, un conflit titanesque dans lequel des véhicules blindés erreraient sur les terrains sans entraves. Il a anticipé les missiles tirés depuis des sous-marins (les appelant « torpilles aériennes »), et bien sûr la guerre atomique, dans un roman de 1914. Il a même imaginé, dans la nouvelle « Le Bacille volé », le début de la guerre biologique. Etonnament, il a toujours considéré ses écrits de science-fiction comme de simples bagatelles. Même l’idée d’une future guerre aérienne qu’il a décrit avec force détails dans La guerre dans les airs (1908) était conçue comme un divertissement, ou comme, en ses propres mots, un « spectacle absurde ». Le problème, avec l’ensemble de la science-fiction, est qu’elle reflète l’époque à laquelle elle est écrite. La fiction de Wells est très cohérente avec celle du début du XXe siècle – la supposition non-écrite était très simple : la croyance que l’humanité allait rester purement humaine, qu’elle allait faire naître un futur viable de sa propre nature. À cet égard, son ouvrage était ancré dans la vision du progrès scientifique sans ses effets secondaires dévastateurs. La science-fiction actuelle est, au contraire, devenue une série de fables d’exogamie, un déploiement de diverses stratégies visant non pas à rester humaine, mais à faire un mariage exogame. L’humanité n’est plus considérée comme capable de faire face à son avenir sans aide – c’est pourquoi nous attendons avec impatience la Singularité, lorsque les machines commenceront à penser de manière autonome, ou le Novum, lorsque grâce à une intervention surnaturelle (pour l’instant non-identifiée), nous changerons totalement de direction.

Et si vous vouliez me demander quel roman révèle le mieux le génie de Wells, ça devrait être La guerre des mondes (qui demeure la plus populaire de ses histoires). Elle raconte l’invasion de la Terre par une race de martiens plus intelligents que nous et dont les armes sont plus meurtrières que les nôtres. Là aussi Wells a eu une longueur d’avance, anticipant l’emploi du gaz toxique sur les champs de bataille du front occidental. Mais dans une brillante observation vers la fin du livre, lorsque les martiens sont détruits de manière inattendue par des bactéries humaines contre lesquelles ils n’étaient pas immunisés, le texte sème le doute sur la pertinence qu’il y a à établir une distinction absolue entre un être humain et un martien. Car l’Homme aussi a en lui le potentiel de massacrer de manière inhumaine ses semblables. Comme le déclare l’Artilleur à la fin du roman, après avoir examiné l’un des appareils abandonnés par les martiens : imaginez ces machines – des rayons thermiques à droite et à gauche et à l’intérieur aucun martien, mais des hommes qui ont appris à s’en servir. Le triomphe envisagé par l’Artilleur donne en effet à réfléchir. Il anticipe la venue d’une époque dans laquelle le stade le plus avancé de l’évolution humaine serait marqué par la transformation de l’Homme non pas en être humain plus authentique (un être qui n’est pas resté totalement humain et qui n’a pas non plus éliminé ses imperfections mais un être qui est en réalité devenu une machine). C’est la question qui plane sur les systèmes autonomes que nous sommes sur le point de construire et sur les robots meurtriers que nous sommes sur le point d’envoyer au combat – comme toujours, Wells l’a vu en premier !

Propos recueillis par Joseph Henrotin, le 22 novembre 2015

Entretien publié dans DSI n°121, janvier-février 2016

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