Avec la prolifération des drones aériens civils et militaires, le risque de leur usage malveillant a considérablement augmenté depuis une décennie. Le développement de la lutte anti drones (LAD) s’inscrit donc désormais comme une priorité de sécurité nationale dans un contexte d’éternel combat entre le glaive et le bouclier.
Les incidents de sécurité se sont multipliés aux abords des pistes d’aéroports, des centrales nucléaires, des sites industriels sensibles, des bases militaires ou des prisons afin de livrer des produits stupéfiants, des téléphones ou des armes. Comme pour toute technologie disruptive, bon marché, facilement utilisable, le détournement du drone apporte à son utilisateur de la puissance dans l’action, de l’agilité, de la rapidité et de la sécurité pour très peu d’investissement initial. Au Mexique et en Colombie, les narco-cartels ont intégré l’usage des drones d’attaque dans leurs opérations contre la Police et contre les gangs rivaux. Les télépilotes de drones tueurs « Sicario » sont formés au sein d’unités structurées. En France, des équipes de cambrioleurs les utilisent comme outil de renseignement pour réaliser du repérage discret avant de cibler une propriété lorsque ses occupants sont sortis. D’une manière générale, les usages malveillants des drones aériens (et bientôt des robots terrestres) sont multiples. Le spectre d’impact est particulièrement large, allant du simple survol d’une zone interdite par défi de l’autorité jusqu’à l’assassinat mafieux ou l’attentat terroriste par drones kamikazes. La surface de risque est importante compte tenu de la vitesse de prolifération des technologies robotiques, de leurs capacités et de leur faible cout.
Connaitre les drones pour mieux s’en défendre
Historiquement, le concept de lutte anti-drone est né avec l’invention du drone mais sa mise en œuvre « opérationnelle » est arrivée beaucoup plus tard, faute de technologies efficaces. La raison de ce déphasage réside essentiellement dans le niveau de complexité de la fonction anti-drone. Il est en effet beaucoup plus simple de faire voler un drone dans une zone interdite que de lui interdire de pénétrer dans cette zone. Il est important de prendre en compte ce principe d’asymétrie de complexité entre les fonctions d’attaque et de défense. L’avantage est (et restera durablement) du côté de l’attaquant. La lutte anti-drones reste longue à mettre en œuvre. Elle est aléatoire, plus onéreuse que la prise en main et l’usage du drone par un acteur malveillant. En effet, le ratio financier « Attaque-Défense » est très inférieur à 1 (R = Cout de l’attaque par drone / Cout du bouclier anti-drone).
Une fois ce premier principe systémique posé, il est indispensable de bien connaitre la typologie des drones en s’appuyant sur de la veille technologique et sur les classifications existantes. Il existe ainsi une dizaine de méthodes de classifications des drones aériens en fonction de leurs poids, dimensions, caractéristiques de vol ou des réglementations locales.
Le classement américain en cinq groupes s’appuie essentiellement sur trois critères (la masse, la hauteur et la vitesse de vol du drone) :
• Groupe 1 : Ces drones ont une masse inférieure à 20 lbp (9,071 kg). Ils volent en fonctionnement normal à moins de 1200 pieds (365 m) au-dessus du niveau du sol, à des vitesses inférieures à 250 nœuds (463 km/h). Exemples : DJI MAVIC 3, PARROT ANAFI, AERBORNE Q800 BUZZARD.
• Groupe 2 : Ces drones ont une masse se situant entre 21 et 55 livres (de 9,52 kg à 24,94 kg). Ils volent normalement en dessous de 3500 pieds (1067 m) à une vitesse inférieure à 250 nœuds (463 km/h). Ex : EOS STRIX.
• Groupe 3 : Ces drones ont une masse située entre 55 et 1320 livres (de 24,94 kg à 598,74 kg). Ils opèrent normalement à moins de 18 000 pieds au-dessus du niveau moyen de la mer (5486,4 m) à des vitesses inférieures à 250 nœuds (463 km/h). Ex : EOS ENDURANCE 1200, EOS VELOCE 330.
• Groupe 4 : Ces drones ont une masse supérieure à 1320 livres (598,74 kg). Ils opèrent normalement en dessous des 18 000 pieds (5486,4 m), sans borne supérieure de vitesse. Ex : PREDATOR, FIRE SCOUT, GREY EAGLE.
• Groupe 5 : Ces drones ont une masse supérieure à 1320 livres (598,74 kg). Ils opèrent normalement à plus de 18 000 pieds (5486,4 m), sans limite de vitesse. Ex : REAPER, GLOBAL HAWK/TRITON Global, UCLASS.
En pratique, on parle de « petits drones » pour les systèmes appartenant aux groupes 1 et 2 et les « grands drones » sont catégorisés dans les groupes 3, 4 et 5. Les premiers drones tactiques figurent dans le groupe 3 et les drones aériens de grande taille (groupes 4 et 5) sont majoritairement dédiés à des applications militaires. Ils doivent être considérés comme des systèmes robotisés complexes, intégrant des infrastructures, des abris, des pistes, des aérodromes ou des aéroports, du personnel qualifié, du soutien logistique pour l’approvisionnement en carburant, en munitions et en maintenance.