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Djibouti, un État contre nature ?

Le 22 février 2015, le président de Djibouti, Ismaël Omar Guelleh (au centre en jaune sur la photo) effectue une visite officielle en Somalie. En fonction depuis le 8 mai 1999, il a été réélu en avril 2016 pour un quatrième mandat avec 86% des voix. (©AMISOM/Ahmed Qeys)
Nulle critique implicite ne se cache derrière ce titre, mais un simple constat : rien ne prédisposait ce petit morceau de territoire à devenir un État, créé de toutes pièces par la colonisation européenne. Et sa survie demeure étroitement liée à la protection assurée par des puissances étrangères.

« Quels hommes peut nourrir une terre pareille ? »
En 1887 déjà, Pierre Loti écrivait : « Quels hommes peut nourrir une terre pareille ? » (1). Effectivement, une terre pareille semble totalement inhospitalière.
La géographie physique est implacable. Djibouti est une fournaise désertique et minérale, où les sols caillouteux sont souvent basaltiques et restituent les très fortes chaleurs, sans que l’homme puisse trouver de l’ombre faute de végétation arborée. Les pluies sont faibles et rares, et les petites vallées sont désespérément sèches, car deux ou trois années peuvent se succéder sans aucune précipitation. Très présent, le volcanisme est encore actif, comme l’a montré l’éruption de l’Ardoukoba en 1978, et des traces du grand rift est-africain sont visibles au fond du Goubet. Les géologues surveillent d’ailleurs très attentivement la progression de son écartement.
Quelles populations peuvent donc vivre ici ? Forcément des nomades, car les terres cultivables sont rares, et les sols pauvres et peu arrosés ne donnent dans le meilleur des cas que de maigres pâturages saisonniers. Ainsi, avant l’arrivée des colonisateurs, l’espace était-il essentiellement parcouru par des éleveurs et leurs troupeaux, mais aussi par des caravanes qui assuraient les échanges commerciaux entre la mer Rouge et l’arrière-pays. Il s’agissait d’écouler les produits agricoles des montagnes éthiopiennes, de vendre le sel du lac Assal, et surtout d’alimenter un important trafic d’esclaves capturés à l’intérieur des terres et revendus de l’autre côté du Bab-el-Mandeb (la « Porte des Larmes »). Cette activité a d’ailleurs perduré, puisque Joseph Kessel faisait état dans Fortune carrée (1931) de 5000 à 7000 individus capturés et revendus chaque année.
Bien que très faiblement peuplé, cet espace était – relativement – administré par des organisations politiques traditionnelles, notamment par plusieurs sultanats qui contrôlaient de vastes territoires à partir de petites agglomérations sédentaires : le Rahayto autour d’Obock, le sultanat de Tadjourah, celui du Goba’ad autour de Dikhil, et celui de l’Aoussa à partir de Yoboki vers l’ouest. Naturellement, il n’y avait pas de frontières linéaires entre les territoires, comme toujours dans les régions désertiques parcourues par des nomades.

L’invention de Djibouti
C’est pourquoi « le territoire autour du golfe de Tadjourah n’est ni nommé ni pensé en tant que tel avant l’installation française dans le dernier quart du XIXe siècle » (2). On peut se demander pourquoi les Français ont prêté attention à cette région si déshéritée et si peu accueillante, alors qu’ils recherchaient des territoires susceptibles de favoriser leur développement économique. En fait, il faut se souvenir que les grands voyages maritimes de l’époque avaient impérativement besoin d’eau douce, de bois et de lieux de stockage du charbon. Il fallait donc identifier des lieux propices sur les côtes bordant les itinéraires des bateaux.
C’est dans cette perspective qu’au XIXe siècle, les Anglais avaient repéré et investi le petit port d’Aden, au Yémen, pour en faire un dépôt de charbon, et ils avaient pris pied en 1858 sur un rocher qui barre le Bab-el-Mandeb et qui devait avoir par la suite une grande importance stratégique : l’îlot Périm, où ils installèrent un relais télégraphique. Les Français jetèrent alors par défaut leur dévolu sur le littoral occidental de la mer Rouge, notamment sur Tadjourah, petit port bien protégé mais où ils n’étaient pas les bienvenus, car ils risquaient de faire de l’ombre à l’intense trafic d’esclaves qui disposait là de sa tête de pont.
Ils se replièrent donc sur Obock, « acheté » au sultan local en 1862 pour 10 000 thalers de Marie-Thérèse, où ils ouvrirent un port de charbonnage. Mais l’eau y était sulfureuse et c’est finalement le site de Djibouti qui fut choisi en 1888 pour y implanter une escale de ravitaillement, et pour devenir en 1896 le chef-lieu de la nouvelle colonie (la Côte française des Somalis). La « capitale » comptait alors à peine 5000 habitants.
Il est intéressant de noter que l’ouverture du canal de Suez en 1869, pourtant œuvre de la France, ne semble pas avoir modifié la perception géopolitique que les autorités françaises avaient de ce confetti d’empire. Pour Djibouti, la valeur ajoutée ne fut que relative. En fait, que la route maritime vers l’Asie passe par la Méditerranée ou par le cap de Bonne-Espérance ne changeait pas grand-chose à la position stratégique de Djibouti, qui restera un pis-aller par rapport à Aden.

La fabrique du territoire
Les premiers traités signés par la France étaient approximatifs sur les frontières à tracer dans l’arrière-pays. Et c’est pourtant ce lointain hinterland qui semblait intéresser les Français, comme l’écrivait à l’empereur le prince Napoléon en août 1958 : « La France a dans l’Abyssinie un centre de catholicisme qu’il est dans son intérêt de protéger ». Peut-être est-ce – en partie – pour cette raison que fut entrepris, en 1897, le gigantesque chantier du chemin de fer reliant Djibouti à Entotto, alors capitale de l’Éthiopie, à 2400 m d’altitude. Véritable colonne vertébrale de la région, longue de 783 km et achevée en 1917, cette voie ferrée allait irriguer et drainer le pays.
Pour autant, la puissance coloniale, qui n’avait jamais vraiment souhaité s’installer là, a géré Djibouti a minima, sans prendre de véritables initiatives de développement. Port d’escale charbonnier, la colonie l’est plus ou moins restée, évoluant parfois vers le port de l’oubli.
Les principaux problèmes rencontrés par les autorités françaises sont venus de la croissance de la population, qu’il fallait gérer sur un territoire sans ressources. La ville de Djibouti, qui comptait 17 000 habitants en 1947, et 62 000 en 1967, atteignait 118 000 habitants au début des années 1970 et cet entassement urbain ne manquait pas de créer des tensions sociales. Il a même fallu construire un véritable barrage en barbelés en 1966 autour de la capitale pour filtrer les migrants, c’est-à-dire les Djiboutiens, nomades en voie de sédentarisation, venant de l’intérieur du pays pour profiter des avantages de la ville. Cette ségrégation ne manqua pas d’exacerber les sentiments nationalistes et indépendantistes. Pourtant, après avoir refusé l’indépendance par référendum en 1958, Djibouti en écarta de nouveau l’opportunité à l’issue d’un vote (contesté) en mars 1967. La colonie devint alors le Territoire français des Afars et des Issas (TFAI) avec un début de délégation de pouvoir aux élites locales. Il fallut attendre le référendum de mai 1977 pour voir naître la République de Djibouti, à l’intérieur des frontières tracées lors de l’occupation française.
À l’évidence, pourtant, ces frontières étaient également « contre nature ». De l’autre côté, l’Éthiopie et la Somalie semblaient n’attendre que la décision d’indépendance du TFAI pour se partager ses 23 000 km2 de montagnes caillouteuses et stériles, peuplées d’Afars et d’Issas, donc logiquement rattachables à l’un ou à l’autre voisin selon l’appartenance identitaire. On rapporte qu’en juin 1970, à l’occasion d’une visite d’État à Paris, l’empereur d’Éthiopie Hailé Sélassié aurait déclaré au président français Georges Pompidou que « Djibouti resterait à l’Éthiopie »…
S’il n’en fut rien, c’est parce que l’intérêt stratégique du lieu n’avait jamais été perdu de vue par la France. En se retirant, celle-ci avait laissé derrière elle une base militaire de plus de 3000 hommes (aujourd’hui réduite à 1900) disposant de toutes les facilités maritimes, aériennes et terrestres pour l’entraînement des troupes et la surveillance de la région. À la clé, il y avait un loyer de l’ordre de 30 millions de dollars par an, soit un pourcentage important du budget de l’État, lequel allait désormais reposer uniquement sur des ressources exogènes. En même temps, ce « parapluie militaire » assurait une forme de stabilité sociopolitique, qui explique en partie que le début de guerre civile entre Afars et Issas entre 1991 et 1994 fut assez rapidement réglé.

Djibouti, produit de la géopolitique mondiale
À partir des années 1990, l’importance, la croissance (et la survie ?) de Djibouti ont été directement liées à plusieurs événements internationaux.
Il y a d’abord eu la fin de la guerre d’indépendance de l’Érythrée, qui déboucha en 1993 sur une partition lourde de conséquences pour l’Éthiopie vaincue. En effet, l’ancien empire d’Hailé Sélassié était désormais coupé de tout accès direct à la mer, et son axe de désenclavement allait inévitablement passer par Djibouti, que ce soit par le chemin de fer – en réalité bien dégradé – ou par la voie routière. Et, depuis plus de vingt ans, de longues colonnes de camions assurent quotidiennement les importations et les exportations de l’Éthiopie entre Addis Abeba et le port djiboutien. C’est un étrange revirement de fortune si l’on a encore en mémoire les paroles du négus en 1970…
À peine dix ans plus tard, la stratégie américaine visant à traquer Oussama ben Laden (originaire du Yémen voisin) conduisit Washington à implanter en 2002 à Djibouti une base militaire encore plus lourde que celle de son homologue française. C’est ainsi que plus de 4000 soldats américains sont installés dans le camp Lemonnier (autrefois occupé par la Légion étrangère), disposant de toutes les facilités pour intervenir, notamment à l’aide de drones, sur une très large zone allant du Yémen au Mali. En contrepartie, les États-Unis versent un loyer annuel récemment réévalué à 63 millions de dollars, qui contribue à conforter encore davantage le budget de l’État djiboutien.
Progressivement, le site de Djibouti est donc devenu la plaque tournante des opérations régionales de stabilisation politique. La déliquescence de la Somalie et l’apparition d’une piraterie maritime intense au large de ses côtes ont amené l’Union européenne à lancer, en 2008, l’opération « Atalante », dont le quartier général est installé à Djibouti. Une quinzaine d’États fournissent des avions, des navires et des hommes, et les opérations semblent efficaces puisque les attaques sont passées de 168 en 2008 à 3 en 2014. La fin d’« Atalante » est programmée pour décembre 2016, et si Djibouti en a tiré de nombreux avantages en termes de retombées financières, on commence néanmoins à entrevoir les limites d’un modèle économique reposant sur l’hébergement de bases militaires dont l’existence est conjoncturelle.
Pourtant, il faut croire que la conjoncture est demeurée – paradoxalement – favorable, puisque le Japon, à son tour, a ouvert à Djibouti une base en 2010, illustrant ainsi la réalité de sa remilitarisation, en même temps que la nécessité de protéger ses navires de commerce dans cette zone troublée (3). Plus de 10 % du trafic maritime régional sont effectués sous pavillon nippon, et l’essentiel des produits japonais d’exportation emprunte le couloir de la mer Rouge. Et c’est ainsi que le Trésor public djiboutien empoche chaque année un nouveau loyer de 30 millions de dollars…
Last but not least, la Chine a fini par s’inscrire dans le paysage en ouvrant aussi une base militaire, qui devrait être opérationnelle en 2017 et compter jusqu’à 10 000 hommes. Le premier motif était le même que ses concurrents étrangers : protéger ses navires de commerce, notamment sur cette nouvelle « route de la Soie » qui doit la relier à l’Afrique australe. Il est d’ailleurs intéressant de lire l’exposé des motifs tels qu’ils ont été définis lors de la signature des accords en 2015 : « La Chine envoie des escortes navales dans le golfe d’Aden, et dans les eaux somaliennes. La question de leur ravitaillement en nourriture et en carburant s’est posée. Nous sommes parvenus à un consensus avec le gouvernement de Djibouti pour disposer d’un soutien logistique pour nos escorteurs  » (4). On se croirait revenu à la fin du XIXe siècle, lorsque Français et Anglais exploraient les sites les plus favorables pour faciliter la navigation de leurs bâtiments.
Mais, contrairement à la France, aux États-Unis et au Japon, la Chine ne verse pas de loyer pour compenser son implantation. Comme souvent ailleurs en Afrique, sa contrepartie consistera à développer une zone franche près des ports de Djibouti et Doraleh, pouvant créer jusqu’à 200 000 emplois directs, avec construction de routes, d’autoroutes, d’installations portuaires, ainsi que la réhabilitation du chemin de fer qui dessert l’Éthiopie. Il est également prévu d’exploiter les gisements de sel du lac Assal et de construire un port minéralier à Tadjourah. Cependant, cette aide est loin d’être gratuite, et, même si les perspectives sont impressionnantes, on ignore encore à quel niveau d’endettement cet appui conduira l’État djiboutien.

Quelle marge d’autonomie reste-t-il à Djibouti ?
Aussi exogène soit-elle, cette dynamique assure un PIB flatteur de près de 1700 dollars par habitant, soit trois fois plus que celui de l’Éthiopie, et dix fois plus que celui de la Somalie, ces deux voisins qui rêvaient d’annexer le petit territoire artificiel au départ des Français. Mais ces chiffres qui n’ont guère de sens cachent une réalité sociale moins reluisante : 42 % des Djiboutiens vivent au-dessous du seuil de pauvreté, 50 % de la population active est au chômage, et le pays se classe au 170e rang de l’indice de développement humain. L’immense bidonville de Balbala, qui borde la capitale à l’ouest de l’oued Ambouli, illustre le paradoxe d’un pays à qui la nature n’a pas donné les moyens d’assurer le minimum vital à ses 900 000 habitants.
La nature ? Comme on l’a vu, elle est inhospitalière, et les ressources dites « naturelles » ne sont encore aujourd’hui que des hypothèses. Il y aurait des indices d’or, de cuivre, d’uranium, de manganèse, de titane, mais rien n’a été prouvé. Quant au sel du lac Assal, il manque d’iode et ne peut être utilisé que dans l’industrie. Il reste l’espoir né de la géothermie, versant positif d’une nature par ailleurs peu généreuse, mais pour l’heure le potentiel de ce secteur est resté inexploité.
Toute l’économie tourne donc autour des activités du port. D’abord pour des raisons commerciales, qui dépendent à la fois de l’enclavement de l’Éthiopie et d’une conjoncture sous-régionale favorable à Djibouti. Mais si l’Éthiopie trouve un autre axe d’échange avec le littoral – ce qui n’est pas impossible quand on regarde la carte – et si les conditions offertes par le port de Djibouti perdent de leur compétitivité – ce qui est inévitable en économie de marché –, le pays sera confronté à une crise sérieuse.
Quant à son statut de plate-forme militaire stratégique de lutte contre le terrorisme, il lui a déjà valu quelques revers intérieurs (l’attentat de mai 2014), et pourrait s’estomper au fil du temps, soit parce que les menaces de déstabilisation diminuent, soit parce que les implantations étrangères deviennent budgétairement trop lourdes pour les États impliqués.
Dans ce cas, et faute d’avoir développé des projets de développement endogènes alternatifs, Djibouti se retrouverait face à la réalité des origines : un « État contre nature ».
Le contexte politique intérieur confirme d’ailleurs la spécificité du cas djiboutien, puisque le régime est resté le même depuis l’indépendance : Hassan Gouled Aptidon, premier président de la République en 1977, a été remplacé en 1999 par son ancien chef de cabinet, Ismaël Omar Guelleh, qui a été réélu le 8 avril 2016 pour un quatrième mandat. Après avoir déclaré en 2011 : « En 2016, je m’en irai. Cette fois-ci je peux vous le jurer », il s’était ravisé peu avant le scrutin en affirmant : « Les Djiboutiens m’ont interdit de partir ».
Sous le parapluie sécuritaire international, Djibouti pratique une démocratie très encadrée, où la liberté d’expression est admise mais peu utilisée. Prudent, un spécialiste écrit : « Sur le plan politique, le pays a encore une grande marge de manœuvre pour améliorer son système démocratique, instaurer un véritable État de droit, encourager la liberté d’expression, garantir des élections libres et transparentes, renforcer le dispositif sécuritaire, combattre la corruption et le clientélisme, remédier à la défaillance de l’administration publique et rétablir la confiance de la population dans la capacité du gouvernement à insuffler le changement tant attendu dans la gestion des affaires de l’État » (5).
Ce vaste programme pourrait se révéler urgent à mettre en œuvre car, à trop dépendre de l’extérieur, un pays peut rapidement se retrouver démuni. Un flash de politique-fiction suffit à inquiéter : si l’État islamique s’effondre au Moyen-Orient, si les pirates disparaissent des côtes somaliennes, si l’Éthiopie infléchit ses corridors de désenclavement, et si les promesses chinoises s’avèrent léonines, l’ancien confetti de l’empire français sera réduit à néant et devra prendre un nouveau départ. Avec un handicap (ou une richesse ?) incontournable : la capitale compte 475 000 habitants, contre 17 000 en 1947.
Cette hypertension démographique constitue un enjeu majeur. Au moment de quitter Djibouti, Dominique Ponchardier, l’un de ses derniers administrateurs français, estimait que la France n’avait rien fait d’autre sur ce territoire que laisser des cheveux blancs (« Tu sais ce que je veux leur donner ici ? Des cheveux blancs. Si la France part d’ici en laissant derrière elle quelques milliers de beaux vieillards, je saurai que j’ai fait quelque chose de plus dans ma vie que trente romans policiers » (6)). En multipliant les centres de santé et en diminuant sensiblement la mortalité dans un pays où la vie était particulièrement rude et les populations difficiles d’accès, la puissance coloniale avait favorisé la croissance démographique. Or, par un autre curieux revirement de l’histoire, c’est bien la transition démographique que les autorités djiboutiennes devront gérer avec clairvoyance.
Parmi les solutions, certains pensent à l’émigration. En 2008, un projet surréaliste de pont enjambant la mer Rouge entre Djibouti et le Yémen et prenant appui sur l’îlot Périm (clin d’œil de l’Histoire) était sorti des cartons. Long de 28,5 km, il aurait permis la création d’une ville nouvelle au nord d’Obock (Madina al-Nour). Il est probable qu’il aurait constitué la soupape par laquelle des milliers de jeunes chômeurs, parfois diplômés, se seraient expatriés au Moyen-Orient. Mais, là encore, l’initiateur était étranger puisqu’il s’agissait de Tarek ben Laden, frère de celui contre lequel s’était ligué une partie du monde. Il se disait prêt à financer la construction de l’ouvrage d’art, pour un montant de 70 milliards de dollars. Le dossier est provisoirement retourné dans ses cartons.
Ismaël Omar Guelleh se flatte d’avoir une vision pour son pays. Il est temps de la dévoiler, car tant que Djibouti sera offert en location au plus offrant, il s’exposera à des lendemains qui déchantent. Et l’impatience qui bout sous les tôles surchauffées du bidonville de Balbala est une bombe à retardement.

Notes
(1) « Obock, en passant », Revue Bleue, no 9, 1887.
(2) Simon Imbert-Vier, « L’invention de territoires djiboutiens », in Amina Saïd Chiré (dir.), Djibouti contemporain, Paris, Karthala, 2013, p. 41-64.
(3) Philippe Leymarie, « À Djibouti, la première base du Japon à l’étranger depuis 1945 », Le Monde Diplomatique, 20 janvier 2011.
(4) Sébastien Le Belzic, « Djibouti, capitale de la Chinafrique », Le Monde Afrique, 25 janvier 2016.
(5) Aden Omar Abdillahi, « Géopolitique de Djibouti : des incertitudes de la naissance à l’espérance de l’âge adulte », Djibouti contemporain, op. cit., p. 155.
(6) Cité par Romain Gary dans Les Trésors de la mer Rouge, p. 55. Ponchardier, ancien résistant, était également l’auteur de la série des Gorilles, aux éditions Fleuve Noir, sous le pseudonyme de Dominique Antoine.

Article paru dans Diplomatie n°81, juillet-août 2016.
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