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Un outil de combat spatial. Le Commandement de l’espace en 2030

La montée en puissance des opérations spatiales militaires repose également sur la préparation opérationnelle du CDE. Cette dernière s’appuie notamment sur l’exercice « AsterX » dont le premier opus a été organisé en mars 2021. Cet exercice vise à entraîner au niveau tactique et opératif les unités du CDE aux opérations spatiales militaires, dans un environnement simulé, mais réaliste. L’édition 2022 d’« AsterX » se tiendra au premier trimestre et proposera des objectifs d’entraînement plus ambitieux. L’exercice sera également largement ouvert à nos partenaires étrangers, notamment européens, afin de promouvoir une compréhension commune des enjeux spatiaux lors de la présidence française du Conseil de l’Union européenne.

Les coopérations, un vecteur de résilience

Placées au cœur de notre préparation opérationnelle, les coopérations multilatérales et bilatérales constituent un élément essentiel pour compléter nos capacités et ainsi améliorer notre connaissance d’un environnement spatial de plus en plus complexe. Si ces coopérations ont historiquement été liées au développement et au partage de capacités spatiales, elles s’étendent progressivement au domaine des opérations, améliorant ainsi la résilience de notre outil de combat spatial. Les relations bilatérales avec l’Allemagne et l’Italie en sont de parfaites illustrations : initialement construites sur la base d’accords capacitaires dans le domaine de l’imagerie spatiale, elles ont peu à peu provoqué et irrigué des discussions de nature plus opérationnelle et stratégique.

D’autres relations bilatérales ont également été nouées ou approfondies avec des partenaires comme l’Inde, le Japon et bien sûr les États-Unis, acteur incontournable des opérations spatiales militaires. Par ailleurs, le CDE contribue activement aux programmes européens civils Galileo, Govsatcom et European space surveillance and tracking (EUSST). En parallèle, le CDE contribue aux débats menés au sein du ministère sur le projet de constellation de satellites de communication Secured Connectivity proposé par la Commission européenne. L’Union européenne est ainsi un acteur spatial qui porte des projets de sécurité et de défense majeurs appuyant nos capacités de manière significative.

La résilience de notre outil de combat spatial est d’autant plus importante que l’espace est un domaine historiquement doté d’un cadre juridique libéral qui laisse la place à de nouvelles menaces. Ce cadre juridique a le mérite d’inclure des principes de liberté d’accès, d’utilisation pacifique et responsable de l’espace et de non-­appropriation, qui régissent ses activités et demeurent plus que jamais pertinents. L’explosion du nombre des acteurs, des risques et des menaces a conduit la France à soutenir, voire à porter, des initiatives devant les instances multilatérales pour garantir la stabilité stratégique et éviter les risques de malentendus ou d’escalade. Ces initiatives visent à travailler à la définition partagée de comportements responsables dans l’espace pour contrer d’éventuelles actions déstabilisatrices entreprises par un compétiteur. Dans ce cadre, le CDE est, au sein du ministère des Armées, l’un des acteurs de la définition des positions françaises en matière de régulation des activités spatiales, avec la Direction générale des relations internationales et de la stratégie et la Direction des affaires juridiques, positions portées ensuite par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Les deux résolutions britanniques corédigées et coparrainées par la France sur la réduction de la menace à travers les normes de comportement responsables adoptées en 2020 et 2021 en sont un exemple concret.

Si beaucoup a été fait, de nombreux défis restent encore à relever : ressources humaines, génération et gestion de nouvelles compétences, capacitaires, opérationnels et enfin, coopérations concourant à notre résilience. L’enjeu pour le CDE consiste ainsi à réussir sa montée en puissance pour mettre en œuvre en 2030 un outil de combat apte à s’inscrire dans une stratégie militaire globale. L’établissement d’une SDA par un centre de commandement spatial connecté à ses pairs et aux unités opérationnelles à même d’opérer les plates-­formes satellitaires permettra d’anticiper et d’agir dans un contexte de compétition permanente, où des formes de contestation pourront régulièrement être observées. L’une de ces contestations pourrait concerner le développement de planeurs hypersoniques, qui constituerait un nouveau « moment Spoutnik ».

Notes

(1) Système de radiocommunication utilisant un satellite.

(2) Capacité de renseignement électromagnétique spatiale.

(3) Composante spatiale optique – Multinational space-based imaging system.

(4) Grand réseau adapté à la veille spatiale.

(5) Système d’acquisition et de trajectographie des avions et des munitions.

Légende de la photo en première page : Suivi de la situation spatiale au COSMOS, à Paris. Ce dernier est appelé à déménager à Toulouse. (© Jean-Luc Brunet/Armée de l’Air et de l’Espace/Défense)

Article paru dans la revue DSI hors-série n°82, « Armée de l’Air et de l’Espace : les ailes françaises volent vers 2030  », Février-Mars 2022.
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