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Quand les LIFT se font chasseurs

Depuis une quinzaine d’années, une nouvelle génération d’appareils d’entraînement est apparue. Les LIFT (Lead-in fighter trainers) sont parfois supersoniques, très manœuvrants et optimisés pour un entraînement réaliste. Ils peuvent également recevoir une charge utile volumineuse et diversifiée. Au point que, dans certains cas, ils constituent de véritables avions de combat à hautes performances, au coût maîtrisé. De quoi faire évoluer la distribution de puissance dans certaines parties du monde.

En 1992, la firme tchécoslovaque Aero Vodochody entend faire évoluer les L‑39 Albatros et L‑59 Super Albatros en se positionnant sur le segment des avions d’attaque légers, le L‑159 étant conçu pour les missions de soutien aérien rapproché, de reconnaissance et de chasse. Le seul L‑159B, version biplace de l’appareil, effectue son premier vol en 1997. Il est suivi en 1998 du premier monoplace (L‑159A), sur lequel la place autrefois arrière, également couverte d’un canopy, est occupée par des équipements électroniques et le système de génération d’oxygène. L’ALCA (Advanced light combat aircraft) conserve la configuration générale du Super Albatros : monoréacteur subsonique à ailes basses et droites ayant un train d’atterrissage non renforcé. Il est cependant doté d’une motorisation américaine.

L’appareil a été conçu pour demander le moins d’entretien possible. Il reçoit un radar multimode Grifo‑L à impulsion Doppler, qui prend place dans un nez reconfiguré et allongé. Le radar dispose de modes air-air et air-sol. Le cockpit du L‑159 est totalement revu, avec une visualisation tête haute, et comprend des écrans couleurs multifonctions et un système HOTAS (Hands on throttle and stick). Doté d’un système de navigation couplant gyroscope et GPS, l’appareil est également doté d’un récepteur d’alerte radar BAE Sky Guardian 200 et d’un éjecteur de leurres radar et thermiques.

Le L‑159 a été commandé en avril 1995 à 72 exemplaires, tous monoplaces, par la force aérienne tchèque. Ses premiers appareils lui ont été livrés en 2000, les derniers l’étant trois ans plus tard. En 2006, elle a demandé la transformation de quatre d’entre eux en biplaces dont le nez devait être doté d’un système de désignation laser (L‑159T1) pour des missions d’entraînement. Actuellement, seuls 24 L‑159 sont encore en service en République tchèque. L’appareil a longtemps intéressé l’Irak, la Bolivie, la Jordanie, la Pologne ou encore les Philippines ou le Bangladesh, mais seul Bagdad en a commandé 14, et il a également trouvé preneur auprès de firmes spécialisées en services, Red Air Draken et Lewis Fighter Fleet.

Le L‑39NG (New Generation) est une autre itération de l’Albatros. Les appareils, convertis (Stage 1) ou construits à neuf (Stage 2), sont des biplaces dotés d’un réacteur Williams FJ‑44. Les Stage 2 sont optimisés pour le combat, avec un cockpit tout écrans, cinq points d’emport et des renforts structuraux. Les réservoirs principaux sont placés dans l’aile et non plus en extrémité. Les systèmes liés au combat peuvent être installés en option sur les Stage 1. Plusieurs pays ont commandé des L‑39NG : le Sénégal (quatre), la République tchèque (six) et le Vietnam (12), ainsi que les sociétés Lom Praha, Draken, Skytech et RSW Aviation.

Les M-346

Au début des années 1990, Alenia et Yakovleff se lancent dans un programme commun de développement d’appareils d’entraînement avancé devant permettre de remplacer les L‑39 russes, mais aussi les nombreuses flottes de cet appareil alors en service. Les deux firmes développement alors ce qui devient le Yak‑130 et le font voler pour la première fois en 1996 avant que l’accord ne soit rompu en 2000. Alenia élimine alors les composants d’origine russe, essentiellement les réacteurs, remplacés par deux Honeywell contrôlés par FADEC, tout en conservant le design, et obtient un avion plus léger ayant une enveloppe de vol plus grande. La firme italienne fait voler le M‑346 pour la première fois en 2004. Biplace biréacteur, il est qualifié de transsonique et doit pouvoir se comporter comme un appareil de combat. Si son architecture le rend manœuvrant (il peut évoluer jusqu’à des angles d’attaque de 35°), son avionique le rapproche des appareils de combat. Elle comprend deux bus MIL‑STD‑1553B, un cockpit tout écrans optimisé pour l’utilisation de jumelles de vision nocturne (et permettant la projection de scénarios tactiques dans le cadre des missions d’entraînement), une visée tête haute (HUD), la compatibilité avec un viseur de casque et un transpondeur IFF.Doté de commandes de vol électriques à quadruple redondance, le M‑346 bénéficie également d’un système HOTAS et de systèmes de navigation incluant un GPS. Il reçoit aussi un système de simulation de combats aériens, permettant par exemple la projection d’informations sur les viseurs de casque, qui peut être commandé depuis le sol, grâce à des liaisons de données. L’appareil a été commandé par l’Italie (18 et quatre pour une académie conjointe entre Leonardo et l’Aeronautica militare), Singapour (12), la Pologne (16), Israël (30) et la Grèce (10).

Le M-346 peut également être optimisé pour les missions de combat. Une première variante est le M‑346FT (Fighter trainer), avec cinq points d’emport. La plus significative est le M‑346FA. Présenté pour la première fois au salon du Bourget de 2017, il dispose d’un radar Grifo et de sept points d’emport d’armements (quatre points sous les ailes, un point central, deux rails d’extrémité d’ailes pouvant accueillir des AIM‑9). La gamme de munitions emportées est particulièrement large. Le point central peut recevoir un pod de désignation de cible, un pod de reconnaissance ou encore un pod avionique incluant un récepteur d’alerte radar. Il peut également recevoir deux réservoirs auxiliaires. Selon le constructeur, l’appareil peut aussi être équipé de lance-­leurres. Le Turkménistan (6 exemplaires) et le Nigeria (24 en mars 2021) se sont portés acquéreurs de la machine.

On note que le M‑345, monoréacteur subsonique d’entraînement avancé constitue l’ultime évolution du S‑211, qui avait ensuite été modernisé en M‑311. Doté d’un cockpit modernisé, le M‑345 bénéficie également d’un système de navigation et d’un système IFF. Avec une masse maximale au décollage de 4,5 t, il peut embarquer jusqu’à environ une tonne de charge utile sur cinq points d’emport – en l’occurrence essentiellement des armements non guidés. Ayant volé pour la première fois en 2016, il n’a pour l’heure été commandé que par l’Italie.

<strong>Les LIFT armés</strong>

Les solutions sud-coréennes

En 2002, Séoul procédait au premier vol du T‑50 Golden Eagle, un monoréacteur supersonique très manœuvrant – notamment grâce à des commandes de vol électriques à triple redondance – conçu avec l’aide américaine et construit par KAI. Il peut recevoir un armement léger et est doté d’un radar APG‑67, mais le combat n’est pas sa fonction première. La Corée du Sud en a commandé 60 (dont 10 T‑50B pour sa patrouille nationale), la Thaïlande, 12, et l’Indonésie, 16.

Destiné à l’entraînement avancé, le T‑50 a donné naissance au T/A‑50, armé et répondant pleinement au concept LIFT. Doté d’un canon tritube de 20 mm, de divers types d’armements et de pods de même que d’un radar Elta EL/M‑2032, l’appareil n’a été commandé que par la Corée du Sud.

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