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Rosoboronexport(e) plus ?

S’il est une constante depuis l’attaque russe lancée sur l’Ukraine, c’est de voir la sous-évaluation chronique des conséquences que cette attaque allait avoir sur la Russie, son économie, sa vie politique, son image médiatique, sa place dans le monde, etc. On peut maintenant écrire avec certitude que le monde ne sera plus jamais le même après le 24 février 2022. La mobilisation massive des alliés de l’Ukraine pour aider cette dernière et les déboires des forces armées russes font que celles-ci reçoivent ce que l’on peut déjà qualifier de « sévère correction » par un ennemi que beaucoup voyaient s’effondrer rapidement face à « l’Ours russe ».

Il ne fait nul doute que cette « opération militaire spéciale » va laisser d’énormes traces en Russie et en Occident, que ce soit d’un point de vue doctrinal, opérationnel ou technique. Les contre – performances de l’armée russe et du matériel qu’elle a employé laissent plus d’un observateur perplexe. Or il est un aspect que le « maître stratège » du Kremlin semble avoir oublié dans son raisonnement d’ensemble : une mauvaise publicité ne fait franchement pas bon ménage avec les affaires.

Le secteur de l’exportation d’armements est, après les hydrocarbures et les ressources naturelles, l’un des plus lucratifs de l’économie russe, générant des rentrées en devises (principalement en dollars américains) réinvesties dans le budget de l’État et surtout dans la production industrielle militaire. Cette manne financière sert notamment à financer la modernisation de l’outil de production ainsi que le développement de plusieurs programmes militaires destinés d’abord à rééquiper l’armée russe et qui seront par la suite proposés à l’exportation. Il y a donc une sorte de cercle économique « vertueux » où les ventes à l’exportation financent (en partie) les investissements consentis dans les forces militaires russes. Néanmoins, il est utile de préciser que les projets considérés comme « stratégiques » par la Russie (Sarmat, Su-57, Borei-A, etc.) ne sont pas concernés par ce mécanisme : l’investissement dans ces derniers ne repose que sur le budget de l’État russe et n’est donc pas soumis aux fluctuations liées à d’éventuelles ventes à l’export (1).

Si la Russie été pendant de très nombreuses années le deuxième exportateur d’armements au monde (2) après les États-Unis, les chiffres de ventes annuels (en volumes et montants) croissant régulièrement entre 2001 et 2012, un premier coup d’arrêt dans cette tendance avait été enregistré après l’annexion de la Crimée et la prise d’une partie du Donbass en 2014, suivi d’un deuxième en 2017 avec la promulgation par les États – Unis du CAATSA (3) entré en vigueur le 2 août 2017 (4) sous la présidence Trump. Enfin, un dernier ( ?) coup d’arrêt est intervenu avec la mise en place des différents paquets de sanctions contre la Russie depuis le 24 février 2022.

Malgré cela, les ventes russes restaient relativement solides, bien que le nombre total de clients n’augmentât pas : l’essentiel des ventes est réalisé auprès d’un cercle restreint d’utilisateurs que l’on peut qualifier de « captifs » vu leur situation géopolitique et les relations qu’ils entretiennent avec la Russie et les autres fournisseurs d’armements dans le monde.

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