Les espaces maritimes et littoraux naturels sont en péril, principalement en raison des activités humaines. Les indicateurs sont alarmants, notamment sur des problématiques telles que la pollution plastique, le réchauffement climatique, l’acidification des océans, la montée des eaux, la surpêche ainsi que la diminution de la biodiversité. Bien que ces défis soient intégrés dans certains accords internationaux, comme le traité pour la protection de la haute mer et de la biodiversité marine (BBNJ), ils doivent s’accompagner d’une transition profonde de nos sociétés, incluant l’économie maritime. Au-delà de la nécessaire reconfiguration des filières existantes, le secteur maritime offre également des alternatives prometteuses, que ce soit dans le domaine énergétique avec des énergies renouvelables, en matière d’alimentation avec une aquaculture en relais de la pêche respectueuse de l’environnement, ou encore dans le domaine sanitaire grâce à la découverte de nouvelles molécules.
La transition écoénergétique de l’économie maritime : une opportunité sous tension
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) dues au transport maritime international représentent seulement 2,89 % du total des émissions au monde (étude 2020 de l’Organisation maritime internationale — OMI). C’est le mode de transport le moins polluant à la tonne transportée.
Fort de ce constat, les organisations internationales et les États se sont engagés ces dernières années en faveur de trajectoires de réduction plus ambitieuses en ciblant spécifiquement l’économie maritime. L’Union européenne (UE), à travers le paquet « Fit for 55 », découlant du Pacte vert, et son initiative « FuelEU Maritime » adoptée en juillet 2023, doit contribuer à amorcer la production à grande échelle de carburants marins renouvelables bas-carbone, tout en garantissant la fluidité du trafic maritime. Ces initiatives doivent aussi permettre de placer le transport maritime sur la trajectoire des objectifs climatiques de l’UE pour 2030 et atteindre enfin la neutralité carbone en 2050. Pour y parvenir, l’UE s’est également engagée à soutenir le développement de la filière de l’éolien offshore en fixant l’objectif de porter la capacité européenne de production de 12 à au moins 60 GW d’ici à 2030. Sur ce volet, le président Macron a fixé l’objectif de la mise en service en France de 45 GW à l’horizon 2050 lors des « Assises de l’économie de la mer » de novembre 2023, ainsi que l’attribution de 2 GW par an dès 2025.
L’OMI a également renforcé ses positions concernant la décarbonation de l’économie maritime et des navires de ses États membres en adoptant en 2023 une stratégie révisée comprenant des objectifs revus à la hausse pour lutter contre les émissions nocives. Cette ambition commune doit permettre la réduction à zéro des émissions nettes de GES provenant du transport maritime international avant ou vers 2050. Pour ce faire, plusieurs mesures ont été suggérées par l’OMI, une norme sur les combustibles en fonction d’objectifs tendant à la réduction progressive de l’intensité des émissions de GES et une autre fondée sur un mécanisme de tarification des émissions du secteur.
Si les projets autour des e-carburants se multiplient et suscitent certains espoirs, ils sont pour l’heure particulièrement onéreux et demeurent loin de se concrétiser par une production à l’échelle industrielle. Ces opportunités nécessitent ainsi des investissements considérables et une collaboration plus étroite entre les pouvoirs publics, l’industrie ainsi que les autres parties prenantes. Ce sont ces apports collectifs qui permettront ensuite de poursuivre les investissements dans la recherche et le développement (R&D) de technologies de décarbonation innovantes, de même que dans les infrastructures de production de e-carburants nécessaires pour accompagner leur déploiement. Par ailleurs, la mise en œuvre d’une diplomatie nationale des carburants de synthèse doit conduire la France à sécuriser ses ressources les plus compétitives et à projeter son industrie dans les pays qui disposent de celles-ci.
Dans le même temps, le transport vélique, reposant sur une propulsion en partie ou en totalité par la force du vent, connait un essor certain à travers une multiplication des projets, notamment en France, et ce, malgré une exclusion de ce type de propulsion de la taxonomie européen de la catégorie zéro émission et des financements qui y concourent. Le slow steaming, reposant quant à lui sur la réduction de la vitesse des navires pour diminuer les émissions, évoqué lors du sommet du G7 de Biarritz en 2019 par le président Macron, constitue une autre possibilité, mais qui comprend des effets pervers potentiels qui ne peuvent être sous-estimés, la répercussion financière sur les supply chains et l’augmentation des flottes par les armateurs pour maintenir un niveau de service équivalent en termes de délais étant les craintes le plus évoquées.
L’économie bleue française : colonne vertébrale de la souveraineté nationale
L’économie bleue française s’impose aujourd’hui comme un pilier essentiel de notre économie nationale, contribuant directement à la souveraineté alimentaire, énergétique, industrielle et sanitaire de la France. Elle joue un rôle crucial dans la préservation et le développement de notre nation car 72 % de nos importations et exportations transitent par voie maritime. Nos communications sont toutes autant concernées : 95 % d’entre elles transitent par des câbles sous-marins, accroissant la dimension stratégique de ce secteur.
En pleine mutation et toujours en quête d’innovation, l’économie bleue française a généré une valeur de production de 116 milliards d’euros en 2023 (1), tout en offrant plus de 530 000 emplois directs. D’ici 2030, l’ambition du secteur est d’atteindre une valeur de production de 150 milliards d’euros ainsi qu’un million d’emplois.