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Méditerranée : des tensions croissantes

Face aux risques et aux menaces dans la zone, la coopération internationale Nord-Sud est un enjeu de premier plan, mais peu de chemin semble avoir été accompli depuis le processus de Barcelone en 1995 – et encore moins dans le domaine de la défense. Des coopérations autres que bilatérales sont-elles possibles ?

Une chose est sûre : sans un réengagement géopolitique fort, l’Europe ne parviendra pas à relancer une coopération qui est au point mort et qui reste parasitée par les acteurs extérieurs qui poursuivent des objectifs qui lui sont souvent hostiles. La deuxième certitude est que, si le volet économique est essentiel, il ne sera pas suffisant. Cette coopération devra répondre à des attentes multiples. Pour l’enclencher, il sera nécessaire de rassurer les régimes échaudés par les expériences libyenne, syrienne et irakienne, en ne conditionnant pas directement les partenariats à une européanisation des modèles et des valeurs. Le développement économique est un aspect clé qui pourrait bénéficier du mouvement de relocalisation régionale des chaînes de valeurs engagé après la crise de la Covid. Il devrait s’associer à un plan de formation professionnelle organisé avec les entreprises et à une gestion de la migration pour éviter une fuite de la main-­d’œuvre qualifiée. Au-delà des entreprises, cette coopération ne pourra pas s’envisager sans un plan massif de transfert d’aide au développement, plus conditionné par la viabilité des projets économiques que par le ralliement aux normes sociales et sociétales de la rive nord. Compte tenu des relations délétères entre les pays de la rive sud, les formats collectifs comme l’Union pour la Méditerranée, le Dialogue méditerranéen de l’OTAN ou même le 5+5 aboutissent difficilement à des résultats concrets. Il est donc probable que la coopération restera très largement bilatérale.

Propos recueillis par Joseph Henrotin, le 28 juin 2022.

Légende de la photo en première page : Le Charles de Gaulle, le Cavour et le Truman en Méditerranée. L’année 2022 y aura été marquée par un face-à-face avec la Russie, qui y avait déployé deux croiseurs de classe Slava alors que la guerre d’Ukraine allait commencer. (© US Navy)

Article paru dans la revue DSI hors-série n°85, « Guerre de haute intensité », Août-Septembre 2022.
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