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Taifun : le programme de MRAP russe

Lors de la première décennie du XXIe siècle, les forces américaines déployées en Irak et en Afghanistan sont confrontées à l’importance des distances à parcourir en zones d’insécurité. Ainsi, lors des trajets effectués par les convois entre chaque emprise, les troupes sont exposées à des IED, vecteur principal des attaques des insurgés irakiens et afghans.

En novembre 2006 l’USMC demande donc à ce qu’une nouvelle gamme de véhicules, les MRAP (Mine resistant ambush protected vehicle), soit mise en service dans les plus brefs délais. Le MRAP va rapidement s’imposer comme le moyen le plus efficace pour protéger les troupes embarquées, ce qui ne va pas laisser insensible l’état – major russe qui, anticipant des conflits futurs, désire doter ses unités de ce type de véhicule multirôle alors inconnu dans ses rangs. Ainsi est-il décidé de lancer au plus vite un ambitieux programme pour doter les forces russes d’une famille de MRAP, plate – forme générique, devant partager différents composants tels que la motorisation, le châssis, ainsi que les trains roulants 4 × 4 ou 6 × 6. Dénommé Taifun, le programme est lancé en 2010. Pour ce faire, près d’une centaine de firmes sont associées, mais Ural et surtout Kamaz en sont les principaux maîtres d’œuvre.

Ces dernières sont alors invitées à faire des propositions et après étude de leurs projets respectifs, c’est Kamaz qui remporte le principal marché en proposant deux modèles à six roues motrices et cabine avancée : le 63968, dénommé Taifun-K, et le 63969, plus original. Ural n’est pas évincé du programme pour autant, et poursuit le développement de son modèle, qui s’apparente à un gros camion blindé : l’Ural 63095 ou Taifun-U.

Les Taifun-K

Produit par Remdizel JSC, une filiale de Kamaz, le 63968 Taifun-K est présenté pour la première fois en 2011. Comme tous les autres modèles de la famille, il est destiné aux missions de reconnaissance, de commandement, de reconnaissance et de surveillance NBC, d’appui-feu ou d’escorte de convois. En 2012, un contrat portant sur l’acquisition de 12 Taifun-K est signé, pour les essais en unités. Leur première sortie s’effectue à Nijni-Tagil en 2013, mais il faut attendre 2014 pour qu’ils soient présentés au grand public lors du défilé sur la place Rouge, au cours duquel leur aspect moderne est remarqué.

Quarante exemplaires sont immédiatement commandés, et les livraisons vont s’échelonner jusqu’en 2016. Certains d’entre eux ont été engagés en Syrie, principalement au sein d’unités de police militaire où ils sont équipés de brouilleurs contre-IED RP-377UVM1. Avant le conflit en Ukraine, environ 290 Taifun-K étaient en service au sein des forces russes. Mais ce chiffre doit être revu à la baisse, car 14 exemplaires ont été détruits, principalement au sein des forces tchétchènes ou « Kadirovsky ».

Le 63968 Taifun-K est un 6 × 6 permanent aux deux essieux avant directeurs autorisant un rayon de braquage de moins de 10 m. Le système de suspensions hydropneumatique fait varier la garde au sol de 270 mm en position parc à 430 mm en position route et à 630 mm en position tout-terrain. Le pilote peut ajuster la pression des pneumatiques alvéolés à partir de son siège en fonction de la nature du terrain, asphalte, sable ou neige. La base de la caisse en « V » permet d’encaisser le souffle d’une charge pouvant aller jusqu’à 8 kg de TNT. Le blindage structurel de la caisse (de 9 m de long, 2,55 m de large et 3,32 m de hauteur) se compose de plaques mécanosoudées en acier, renforcé par des plaques à base de céramique. La protection est de classe STANAG 4569 niveau 3, comme les parties vitrées. Elle est donnée pour résister aux munitions de 7,62 mm et de 14,5 mm à une distance de 200 m.

L’agencement du Taifun-K est singulier au sein de la famille des MRAP, avec la cabine à l’avant. Elle abrite le pilote à gauche, un personnel au centre (en option), et le chef de bord à droite. Ils accèdent à leur siège anti-IED grâce à une porte latérale à commande électrique équipée d’une vitre blindée. Derrière le pilote, à gauche, est implanté le GMP (Groupe motopropulseur), auquel on accède par une trappe latérale. Pour les opérations de maintenance plus lourdes, la cabine bascule vers l’avant. Le GMP se compose d’un moteur Kamaz V8 turbodiesel de 450 ch couplé à une boîte de vitesses automatique Allison à six rapports ou YamAZ à huit rapports. Il est surmonté par une grille d’admission en air, l’extraction d’air chaud s’effectuant par les grilles latérales.

Ce GMP permet aux 22 t (dont quatre de charge utile) du véhicule une vitesse maximale de 105 km/h sur route, sur une distance de 630 km. Les deux réservoirs sont implantés à l’extérieur, de part et d’autre de la caisse, entre le second et le troisième essieu, ce qui augmente grandement le niveau de protection des personnels. Le vaste compartiment arrière abrite 14 fantassins. Assis face à face, ils accèdent à leurs sièges anatomiques, pourvus de harnais cinq points, absorbeurs de blast et fixés au plafond, par une rampe, avec porte intégrée dont l’ouverture à commande électrique est actionnée par le pilote ou le chef de groupe. Le compartiment est surmonté de six trappes de toit pour l’évacuation d’urgence et est muni de deux petites fenêtres d’observation latérales. Tous les personnels bénéficient d’une protection NBC collective, de la climatisation et d’un système de vision à 360°, grâce à cinq caméras couplées à un moniteur dans la cabine, permettant d’évaluer la menace immédiate. Il est à noter qu’un modèle 8 × 8, le 63988, est disponible, mais ne semble pas être actuellement en service.

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