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Quelles nouvelles munitions pour faire face à un conflit de haute intensité ?

En changeant de fonction, le général d’armée Thierry Burkhard a subtilement fait évoluer la stratégie française d’une préparation à un hypothétique conflit de haute intensité (« à l’ancienne », aurait-on tendance à dire) vers un combat d’intensité moindre, limité dans le temps, comme le résume son nouveau slogan « Gagner la guerre avant la guerre ! » (1). Loin d’être anodin, ce changement de portage traduit certainement l’évolution de la réflexion stratégique actuelle, qui part du constat que notre pays n’aurait plus les moyens, physiques, financiers, humains… de mener une guerre totale pour venir à bout d’un ennemi déterminé et surarmé. Il est donc temps d’adopter des munitions d’un type nouveau, permettant de traiter, individuellement, des objectifs unitaires et mobiles, sans transporter quantité de projectiles dont la plupart n’auront aucun effet sur un ennemi potentiel…

le constat

Reposant sur une armée de métier assistée de réservistes opérationnels en nombre restreint, notre modèle d’armée n’autorise qu’une montée en puissance très limitée. Or, pour faire face aux principales menaces supposées en Europe centrale et du Nord, il faudrait déployer, aussi bien en Pologne que dans les pays baltes, des forces terrestres qui, actuellement, nous font défaut. En effet, après avoir engrangé les dividendes de la paix, c’est-à-dire dissous des dizaines d’unités, terrestres, navales et aériennes, il nous manque des pans entiers de capacités, comme les moyens d’aide à la mobilité ou de contre-mobilité du génie, par exemple. La crédibilité de notre dissuasion conventionnelle s’en trouve largement entamée.

Voudrions-nous réellement contribuer à un combat de l’avant d’un nouveau genre que ce ne sont pas seulement des unités de mêlée ou d’appui, mais aussi de nombreuses unités de maintenance qu’il faudrait reconstituer et, surtout, des unités de transport logistique qu’il faudrait, tel le Phénix, faire renaître de leurs cendres. En effet, le combat de haute intensité est une sorte de « Moloch » ingurgitant, sans relâche, d’énormes quantités de munitions, de petit calibre, de char et, surtout, d’artillerie, via d’incessantes norias de trains, de camions, de bateaux ou d’avions.

Afin de dissuader un éventuel agresseur d’attaquer des membres de l’OTAN et de l’UE, c’est certainement le concept allemand de forces positionnées au plus près des frontières à défendre et disposant de gigantesques dépôts de munitions de proximité qu’il faudrait exhumer. L’effort à consentir serait donc titanesque, car il s’agirait de créer non seulement des capacités supplémentaires, mais aussi les unités de soutien logistique indispensables… le tout stationné dans un étranger un peu plus éloigné que pendant la guerre froide. En rester à notre chère logique de corps expéditionnaire ne résoudrait en rien l’équation, la consommation en munitions prévisible ne faisant que souligner, un peu plus encore, la précarité de stocks indigents et de moyens de transport comptés.

Changer de paradigme

Dans ce nouveau contexte, les recettes en cours sont toujours applicables, mais c’est faire fi de l’intensité des combats futurs et, surtout, de leur durée prévisible. Ainsi, dans le cas de l’artillerie (obusiers de campagne et mortiers lourds inclus), nous en restons à une « efficacité » à 24 coups pour le traitement d’un pôle (un pôle représentant une section d’infanterie déployée sur le terrain ou trois ou quatre véhicules en ordre de combat). Si la batterie est à six pièces, chacune d’entre elles tirera quatre coups ; en revanche, si la batterie est subdivisée en deux sections de tir à quatre pièces, chacune d’entre elles devra tirer trois coups, ce qui allongera la durée globale du tir d’une quinzaine de secondes environ.

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