Magazine Les Grands Dossiers de Diplomatie

L’enjeu migratoire pour les villes de demain

Le second paramètre, la qualité de la gouvernance, est déterminant. À New York, ville qui atteignait un niveau d’insécurité inédit pendant les années 1980, les autorités locales ont mis en place une politique beaucoup plus volontariste, ce qui a permis d’améliorer considérablement la sécurité des New-Yorkais. Les villes de demain seront-elles des territoires éclatés avec des quartiers fermés ou formeront-elles un espace public commun pour l’ensemble des citadins ? C’est une question centrale pour les villes qui attirent des flux migratoires internationaux et qui mettent en jeu leur politique d’intégration.

Le troisième élément de sécurité, en particulier pour les villes du Sud enregistrant une forte croissance démographique, réside dans la capacité des villes à développer leurs infrastructures (sanitaires, éducatives, réseaux d’eau potable, mobilité) aussi rapidement que leur croissance démographique. Mayotte, par exemple, a connu une forte croissance démographique mais des investissements qui, proportionnellement, étaient insuffisants pour satisfaire les besoins de la population.

La pollution deviendra aussi un élément clé pour garantir la sécurité sanitaire. C’est d’ores et déjà visible en Chine avec des problématiques de surmorbidité, voire de surmortalité, qui apparaissent. Lorsque la pollution urbaine se trouve à des niveaux élevés, les problèmes respiratoires deviennent fréquents et l’espérance de vie peut diminuer. Par ailleurs, les villes, par leur densité de population et leurs infrastructures, sont propices à créer des ilots de chaleur qui peuvent là aussi engendrer de la surmorbidité ou surmortalité. L’adaptation des villes aux changements climatiques, et pour les villes du littoral, l’adaptation à l’évolution du trait de côte, sera cruciale. Certains pays, comme les Pays-Bas ou les Maldives, se mobilisent pour apporter des réponses. Mais l’enjeu sera à l’avenir absolument essentiel pour la sécurité des populations.

En somme, les villes ne sont pas vouées à se paupériser, mais tout repose sur la qualité de leur gouvernance locale, sur leur politique d’intégration avec un travail de fond sur les inégalités, et sur leur capacité d’adaptation aux changements climatiques.

Propos recueillis par Alicia Piveteau le 17/01/2025.

Notes

(1) Source : Insee, recensements de 2016, 2022 ; État civil de 2011 à 2021.

(2) Jean-Marc Zaninetti, « États-Unis : une forte recomposition du peuplement depuis la pandémie », Population & Avenir, n° 770, novembre-décembre 2024 (https://​doi​.org/​1​0​.​3​9​1​7​/​p​o​p​a​v​.​7​7​0​.​0​017).

(3) Sur cette notion, voir : Gérard-François Dumont, Géographie des populations. Concepts, dynamiques, prospectives, Paris, Armand Colin, 2023.

Légende de la photo en première page : Vue de la ville de Lagos, au Nigéria, en 2021. Selon les estimations, la population de la capitale économique du Nigéria pourrait atteindre jusqu’à 88 millions d’habitants en 2100, et deviendrait ainsi la ville la plus peuplée au monde. Selon l’OIM, en 2020, au Nigéria, 60 % des migrants internes résident dans les zones urbaines. (© Shutterstock)

Article paru dans la revue Les Grands Dossiers de Diplomatie n°84, « Géopolitique des migrations », Février-Mars 2025.
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